Origine et histoire de l'Abbaye de Laval Dieu
L'église Saint‑Rémi de Laval‑Dieu, située dans les Ardennes, est l'une des trois églises de la commune de Monthermé et provient de l'ancienne abbaye prémontrée fondée en 1128 sous le vocable de saint Rémi. Elle fut établie au XIIe siècle par Ithier dit « le Dévot », comte de Rethel, avec l'archevêque Renauld de Martigné, pour des chanoines réguliers de l'ordre de Prémontré. Le site reçut de nombreuses donations aux XIIe et XIIIe siècles — terres, moulins, étangs et dîmes — qui, malgré leur nombre, restèrent insuffisantes pour assurer de gros revenus. Les comptes mentionnent deux cents livres parisis de décimes en 1346 ; lors de la déclaration de 1790, le temporel était évalué à vingt‑cinq mille livres de revenu. L'église abbatiale d'origine avait été rebâtie en 1641. Durant la nuit du 16 au 17 août 1696, un incendie volontaire provoqué par des éléments de la garnison de Maastricht endommagea l'édifice ; le roi accorda alors à l'abbaye une exonération de décimes pour trois ans. La façade occidentale fut réparée trois ans plus tard dans un style baroque flamand mêlant briques et pierres jaunes de Dom‑le‑Mesnil. Dissoute à la Révolution, la communauté vit ses biens vendus en 1791 à un Sieur Grimblot pour 43 100 livres. Les bâtiments transformés ensuite furent détruits lors des bombardements du 15 mai 1940, mais la chapelle subsista. Les archives de l'abbaye, composées d'environ trois cents pièces et d'une douzaine de plans, ont été transférées au dépôt central de Charleville‑Mézières et classées H238 à H260. La chapelle conserve des boiseries du XVIIIe siècle, plusieurs dalles funéraires médiévales et des plafonds datés de 1767 ornés de symboles de la Trinité et des Béatitudes, avec la Croix de Malte. Le compositeur Étienne Nicolas Méhul y fit ses premières expériences musicales sous la direction du chanoine organiste Guillaume Hanser, qui y avait fondé une école de musique ; seul subsiste aujourd'hui le buffet de l'orgue (1771). L'ensemble formé par l'église, les ruines du logis abbatial et le terrain descendant jusqu'à la Semoy est classé au titre des monuments historiques depuis le 18 juin 1963. Le site accueille aujourd'hui des manifestations culturelles, notamment le Printemps des Légendes. On peut encore voir les vestiges du prieuré et du logis abbatial ainsi que l'église, décorée de lambris et de stalles datés des années 1700‑1710. Le chevet, orné de bandes lombardes en calcaire blanc, et la tour appartiennent au parti roman de la première église, consacrée en 1134. Le portail, encadré de pilastres en marbre rose, porte une plaque en marbre noir gravée de la formule « Adorate et timete » ; la façade présente un oculus et, en sommet, une statue de Notre‑Dame de Laval‑Dieu. L'édifice conserve également des éléments mobiliers et décoratifs variés : fragments d'orgue et de plafond de la nef, vitraux, boiseries sculptées, stèles et plaques commémoratives, mosaïque du cloître, vestiges du cloître et anciennes roues d'un moulin. L'abbaye a connu quarante‑cinq abbés, de Pierre Ier, premier abbé nommé à la fondation en 1128, à Remacle Lissoir, dernier abbé de 1766 à 1791 ; parmi eux, Hubert Gobert devint abbé général des Prémontrés et mourut en 1497, et Nicolas Oudet présida l'abbaye au XVIIIe siècle. Remacle Lissoir, dernier abbé, mourut en 1806.
