Origine et histoire de l'Abbatiale Notre-Dame-des-Ardents et Saint-Pierre
L'abbatiale Notre-Dame-des-Ardents-et-Saint-Pierre est une église catholique paroissiale située à Lagny-sur-Marne, en Seine‑et‑Marne ; elle est l'ancienne église abbatiale de l'abbaye Saint‑Pierre et a été classée monument historique par arrêté du 12 juillet 1886. L'édifice actuel occupe l'emplacement d'églises antérieures établies dès la fondation de l'abbaye par saint Fursy en 648. Ravagée par les Normands en 910, l'église fut reconstruite en 987 par le comte Herbert II de Troyes et son fils Étienne. À l'occasion de sa consécration, Robert le Pieux offrit des reliques issues du trésor de Charlemagne, dont une épine de la Sainte Couronne et la pointe d'un clou de la Passion, ce dernier ayant été volé en 1567 par des calvinistes. Les travaux s'achevèrent en 1017 et l'édifice fut consacré à saint Pierre, saint Paul et aux saints Innocents par l'archevêque de Sens Léothéric. Le mal des ardents, apparu en 1033 et réapparu en 1127, entraîna la dévotion à la Vierge et donna son nom à la chapelle Notre‑Dame‑des‑Ardents. Les papes Pascal II et Innocent II vinrent en pèlerinage en 1107 et 1131. Après plusieurs incendies au cours du XIIe siècle, l'abbé Jean Britel lança des travaux de reconstruction en 1206, selon un projet d'ensemble ambitieux qui ne fut pas entièrement réalisé. Des restaurations menées en 1686 conduisirent à supprimer les sept premières travées des bas‑côtés et à construire une nouvelle façade en ossature de bois et plâtre, suivies d'une consécration en 1687. Des travaux de 1750 entraînèrent la destruction pour raisons de sécurité de la nef du XIIe siècle et du clocher, puis la construction d'un nouveau clocher, de la chapelle Saint‑Joseph et de la sacristie formant l'entrée actuelle. La Révolution imposa à la commune le choix d'une seule église ; la population, qui comptait alors 1 723 habitants et quatre édifices, désigna Saint‑Pierre comme unique église, les autres fermant le 17 août 1792, tandis que l'édifice fut successivement renommé Saint‑Fursy puis temple de la Liberté. Des travaux de restauration et d'aménagement eurent lieu en 1860 avec la construction de la sacristie et du presbytère, la pose de verrières et le remplacement du dallage du chœur ; en 1870, l'occupation par des soldats allemands entraîna la destruction de boiseries et du mobilier, puis un don du roi de Prusse permit l'installation d'un nouvel orgue fabriqué par les établissements Stoltz. L'église fut classée monument historique en 1886, endommagée par des obus en 1944 et prit en 1950 le nom de Notre‑Dame‑des‑Ardents‑et‑Saint‑Pierre pour rappeler les épidémies et le miracle attribué à la Vierge.
Lors de son passage à Lagny en 1430, Jeanne d'Arc est créditée d'un miracle consistant en la résurrection d'un enfant mort depuis trois jours, récit qu'elle mentionna lors de son procès à Rouen ; une plaque et une inscription latine — « HIC REVIXIT INFANS SUPPLICANTE JOHANNA 1430 » — rappellent cet épisode. Le 5 mai 1430, elle confia à l'abbaye six épées, dont celle de Sainte‑Catherine‑de‑Fierbois ; la localisation actuelle de cette arme reste inconnue et des légendes la situent dans un souterrain ou murée dans un pilier de la chapelle de la Vierge des Ardents.
Parmi les personnalités et les saints associés à Lagny figurent saint Fursy, fondateur et patron, ainsi que des abbés et saints locaux tels qu'Emilien (Ymelin), Éloque, Momble, Kentigern, Algis, Déodat, Maldegaire, Landry, Fulbert, Ausilion (Ansilion), Sidoine et Sainte Jeanne d'Arc ; l'abbatiale abrite aussi les sépultures de personnages comme Herbert II de Troyes, Thibaut IV de Blois, saint Déodat et saint Ausilion.
L'abbatiale mesure 48 mètres de long sur 37 mètres de large et s'élève sur trois niveaux : grandes arcades, triforium et fenêtres hautes ; l'accès depuis le parvis se fait depuis le XVIIIe siècle par le porche‑clocher. À l'intérieur, d'imposantes piles munies de colonnettes et de chapiteaux sculptés de bourgeons, feuillages, oiseaux et monstres soutiennent les voûtes. De nombreux vitraux furent détruits pendant la Seconde Guerre mondiale ; les plus anciens conservés sont l'œuvre de Claudius Lévêque de Beauvais, tandis que des verrières datées de 1951 et 1956 sont signées Roger Calixte Poupart. À la Révolution, les huit cloches de l'église furent démontées et fondues.
La chapelle Saint‑Joseph, située dans le clocher, conserve un autel en marbre et un retable dont les colonnes furent offertes par Louis XIV ; la chapelle Jeanne d'Arc abrite une statue devant le pilier dit « pilier de Jeanne d'Arc ». La chapelle de la Vierge renferme un reliquaire et un cierge enchâssé en tube de cristal, fragments de la « Sainte Chandelle » offerts par Mgr Outoit en 1939, et l'église compte encore des chapelles dédiées à Saint‑Sauveur, Saint‑Denis et Saint‑Fursy où ont été déplacés des vestiges du portail du XIIe siècle. L'édifice actuel, commencé au début du XIIIe siècle et poursuivi jusque vers le milieu de ce siècle avec des réparations au XIVe siècle, conserve des traces des campagnes de construction antérieures, notamment des amorces de colonnettes au‑dessus du triforium témoignant d'un projet d'élévation plus importante. Deux statues en bois polychrome représentant saint Pierre et saint Blaise encadrent les portes du porche ; des toiles du XVIIe siècle illustrent la Résurrection et l'Ascension, et des châsses du XVIIIe siècle ainsi qu'une statue de saint Antoine de Padoue par Yvonne Parvillée complètent le mobilier.
Parmi les reliques mentionnées figurent des ossements des Saints‑Innocents, une épine de la couronne et la pointe d'un clou attribuées à Robert le Pieux, reliques qui furent brûlées par les calvinistes. Le square Jeanne d'Arc, où se trouve une statue d'Armand Roblot érigée après la canonisation, présente la figure de Jeanne tenant deux épées et porte une inscription rappelant qu'elle rapporta à Lagny l'épée de Franquet d'Arras après une victoire en mai 1430 ; les restes d'un ancien monument aux morts, détruit et jeté dans la Marne en 1940, ont été replacés pour former un nouveau monument dans ce square.
