Origine et histoire de l'Abbaye de Flaran
L'abbaye Notre‑Dame de Flaran, située à Valence‑sur‑Baïse dans le Gers, est une ancienne abbaye cistercienne fondée en 1151 par des moines de l'abbaye de l'Escaladieu, au confluent de l'Auloue et de la Baïse. Joyau de l'art cistercien, elle conserve la totalité de ses bâtiments monastiques et son jardin médiéval et figure parmi les monuments historiques les mieux préservés du sud‑ouest de la France. La construction de l'ensemble s'étend du XIIe au XVIIIe siècle : l'église abbatiale date de la fin du XIIe ou du début du XIIIe siècle, la porterie est médiévale et a été modifiée au XIXe siècle, et de nombreux aménagements ont été réalisés aux XIVe, XVe, XVIe et XVIIIe siècles. Les bâtiments comprennent l'église romane, le cloître gothique, la salle capitulaire, le dortoir, la sacristie, l'armarium (bibliothèque), le chauffoir, le réfectoire, le logis abbatial avec son quartier d'hôtes, ainsi que les dépendances agricoles et le jardin des simples. L'église, construite entre 1180 et 1210, s'ouvre sur une porte en plein cintre sans tympan, est éclairée par de hautes baies et un oculus, et présente une nef de trois travées couverte d'une voûte en berceau brisé soutenue par six piliers. Le transept, plus vaste que la nef, est voûté d'ogives à section carrée et le chevet associe un chœur carré à une abside semi‑circulaire ornée d'absidioles et d'un modillon en forme de coquille. Le cloître, d'origine gothique XIVe siècle, comporte quatre galeries de facture différente : la galerie ouest conserve des colonnes géminées à chapiteaux, les autres galeries, reconstruites en 1485 après leur destruction pendant la guerre de Cent Ans, et l'étage du cloître conservent des peintures murales du XVIIIe siècle. La salle capitulaire du XIVe siècle, avec neuf croisées d'ogives reposant sur quatre colonnes de marbre réemployées, constitue un des chefs‑d'œuvre de l'abbaye ; le dortoir cellulaire se développe à l'étage. La sacristie est voûtée d'ogives réparties en quatre croisées sur une colonne centrale et l'armarium est accessible depuis le cloître et la salle capitulaire. Le réfectoire, éclairé par des fenêtres étroites, a été décoré au XVIIIe siècle de gypseries allégoriques représentant notamment des phénix et des pélicans. Le logis abbatial et le quartier d'hôtes, remaniés au XVIIIe siècle, présentent une façade classique sur la cour d'honneur et abritent des pièces de réception, un bel escalier et des salles spacieuses. Dès sa fondation l'abbaye connaît une prospérité étendue et reçoit des confirmations de possessions au cours du XIIe siècle ; cette richesse provoque des conflits locaux et conduit les moines à fortifier le côté le plus vulnérable par un mur et une porte crénelée. Au milieu du XIIIe siècle l'abbé, par un contrat de paréage avec le comte d'Armagnac, participe à la fondation de la bastide de Valence‑sur‑Baïse, située sur la rive opposée de la Baïse. L'abbaye subit les aléas de l'histoire : elle est endommagée par des routiers pendant la guerre de Cent Ans et sévèrement incendiée en 1569 par les troupes de Montgomery, qui détruisent le chevet, saccagent le cloître, brûlent les archives et causent des victimes parmi les moines ; des travaux de restauration sont entrepris à partir de 1573. Aux XVIIIe siècle des aménagements importants transforment les espaces conventuels — dortoir, réfectoire, appartement du prieur — et donnent naissance au grand jardin et au quartier des hôtes ; des éléments du domaine, comme le pigeonnier et la pompe à eau, datent également du XVIIIe siècle. À la Révolution le monastère est vendu comme bien national, devient un domaine agricole privé et ses bâtiments sont affectés à des usages agricoles, la salle capitulaire servant d'entrepôt et l'église de chai. Au XXe siècle la société archéologique du Gers évite le démantèlement du cloître et l'abbaye est classée monument historique en 1914 ; la porterie, le pigeonnier, le jardin et le bâtiment de la pompe à eau feront l'objet d'inscriptions ultérieures. Dans la nuit du 15 au 16 octobre 1970 un incendie criminel ravage une partie importante des bâtiments ; le département du Gers acquiert le site en 1972 et confie aux Monuments Historiques une vaste campagne de restauration. Les jardins actuels ont été restaurés en 1987, avec la réhabilitation du puits, du bassin circulaire, du mur de clôture, du pigeonnier et du pavillon abritant la pompe du canal. Depuis 2000 l'abbaye abrite la Conservation départementale du patrimoine et des musées du Gers qui y développe une programmation culturelle tout au long de l'année — expositions, animations pédagogiques, concerts et colloques — et assure la gestion scientifique du réseau des musées du département. Le site propose des actions de médiation et des activités pédagogiques pour scolaires, familles et groupes, présente deux expositions permanentes consacrées aux chemins de Compostelle dans le Gers et à l'histoire de l'abbaye, et accueille depuis 2004 le dépôt de la collection Simonow, composée de dessins, peintures et sculptures du XVIe au XXIe siècle. Un espace muséographique a été aménagé au dortoir en 2008 et des travaux ont permis d'installer rampes et ascenseur pour l'accessibilité. L'abbaye de Flaran reçoit près de 35 000 visiteurs par an ; l'entrée est gratuite le premier dimanche de chaque mois de novembre à mars inclus et l'accès est gratuit pour les moins de 18 ans en visite libre toute l'année. Hors des grands itinéraires, le site constitue une halte jacquaire pour les pèlerins venant de Condom qui empruntent une variante conduisant à Valence‑sur‑Baïse et visitent la collection jacquaire du lieu. L'ensemble architectural et paysager, complété par les dépendances et le jardin de plantes aromatiques et médicinales, témoigne de la vie monastique cistercienne et de son évolution du Moyen Âge à l'époque moderne.