Abbaye de Fontaine-Daniel à Saint-Georges-Buttavent en Mayenne

Patrimoine classé Patrimoine religieux Abbaye

Abbaye de Fontaine-Daniel

  • Rue Fontaine Daniel
  • 53100 Saint-Georges-Buttavent
Abbaye de Fontaine-Daniel
Abbaye de Fontaine-Daniel
Abbaye de Fontaine-Daniel
Abbaye de Fontaine-Daniel
Propriété privée

Patrimoine classé

Restes de l'abbaye comprenant le bâtiment de l'ancienne entrée, la grande salle voûtée du rez-de-chaussée servant actuellement de garage, les restes du cloître, la façade du bâtiment du XVIIIe siècle et les boiseries du XVIIIe siècle de la salle à manger : inscription par arrêté du 10 décembre 1927

Origine et histoire de l'Abbaye de Fontaine-Daniel

L'ancienne abbaye cistercienne de Fontaine-Daniel se situe à Fontaine-Daniel, dans la commune de Saint-Georges-Buttavent (Mayenne). Elle a été fondée en 1204 par Juhel III de Mayenne, revenu de Terre-Sainte, et placée sous l'autorité de l'abbaye de Clermont tout en relevant de la filiation de Clairvaux au sein de l'ordre cistercien. Après un premier établissement à la Herperie, jugé peu propice, les moines furent transférés sur les rives de l'Anvore dans la forêt de Salair; ils prirent possession du nouveau site le jour de l'Ascension, le 19 mai 1205. Juhel III dota largement l'abbaye : ses possessions s'étendaient dans la baronnie de Mayenne et au-delà, jusqu'en Normandie et en Anjou, comprenant moulins, métairies, prés, revenus et droits de pêche sur la Mayenne. La fondation et les donations reçurent de nombreuses confirmations, émanant de membres de la famille fondatrice, d'autorités ecclésiastiques et de souverains, et furent ratifiées au pape Grégoire IX en 1226. La construction du monastère se poursuivit grâce à des legs et engagements, notamment d'Isabelle de Meulan et de Dreux V de Mello, qui conféra par ailleurs en 1243 le droit de haute justice sur les vassaux de l'abbaye. L'église abbatiale, d'une ampleur comparable à celle de la cathédrale du Mans, fut consacrée en 1243; elle présentait un plan en croix, une nef de près de 60 m et un chœur entouré de chapelles rayonnantes, remanié au XVe siècle par Jeanne de Laval. Fontaine-Daniel devint une seigneurie importante et une des maisons cisterciennes les plus considérables du Maine, mais connut à plusieurs reprises des périodes de troubles et de pillages. Pendant la guerre de Cent Ans l'abbaye subit l'occupation anglaise et paya pour obtenir des sauf-conduits ; au XVe siècle elle fut au centre d'affrontements violents liés à la nomination d'abbés et à l'introduction de la commende, qui entraînèrent sièges, prises d'assaut et dégâts matériels. Les conflits entre abbés réguliers et abbés commendataires se poursuivirent aux XVIe et XVIIe siècles, alimentant procès et réductions du nombre de religieux jusqu'à une situation d'affaiblissement durable. En 1608 le temporel fut partagé en deux menses d'égale valeur, l'une pour l'abbé et l'autre pour la communauté, arrangement qui scella la division des revenus et suscita de nouvelles difficultés pratiques et judiciaires. Au milieu du XVIIe siècle fut négocié un échange de biens avec le cardinal Mazarin, transaction partiellement mise en œuvre puis annulée par une transaction en 1678 qui rendit aux moines leurs droits antérieurs. Les guerres de Religion et les événements militaires, notamment des brigades anglaises en 1592, provoquèrent pillages, expulsions et réparations coûteuses; un religieux fut encore tué lors de troubles en 1679. Au XVIIIe siècle la vie monastique déclina : les effectifs tombèrent, la discipline se relâcha et les moines se heurtèrent parfois à leur hiérarchie; en 1789 il ne restait que sept religieux qui optèrent pour la sécularisation l'année suivante. Les immeubles de l'abbaye furent mis en vente par la Nation dès 1791 et les archives conventuelles furent détruites par le feu en 1793, sauf les copies conservées dans le fonds Gaignières et publiées ultérieurement. L'église abbatiale, vendue et vidée de ses éléments mobiliers, fut démolie en 1806 pour récupérer les pierres de taille; subsistent aujourd'hui principalement des vestiges, notamment les murailles sud de la nef qui fermaient le cloître. Après la Révolution le site prit un usage industriel : acquis en 1806 par la famille Horem, l'ancien couvent accueillit une filature puis des ateliers de tissage employant plusieurs centaines d'ouvriers au XIXe siècle, la force motrice de l'eau et l'implantation textile locale favorisant cette reconversion. Sur le plan architectural, l'ensemble conventuel formait un vaste quadrilatère autour d'un cloître central, avec les bâtiments claustraux à l'est, l'abbatiale au nord, l'hôtellerie et les magasins à l'ouest et la maison abbatiale au sud; des celliers voûtés, des dortoirs, une salle capitulaire et des ressources hydrauliques figuraient parmi les aménagements notables. L'église renfermait jusqu'à la fin du XVIIIe siècle des tombeaux et pierres funéraires, notamment celui du fondateur Juhel III et d'autres abbés, ainsi qu'un grand retable et un orgue vendu sous la Révolution. Le cartulaire de Fontaine-Daniel, conservé en copie, reste une source essentielle pour l'histoire des familles et des terres attachées à l'abbaye, alors que les archives originales ont disparu. Fontaine-Daniel illustre la trajectoire de nombreuses grandes abbayes cisterciennes : fondation et prospérité médiévale, épreuves guerrières et conflits d'autorité, appropriation partielle des revenus par la commende, déclin monastique puis transformation fonctionnelle après la Révolution.

Liens externes