Origine et histoire de l'Abbaye de Maubuisson
L'abbaye de Maubuisson, fondée au XIIIe siècle par Blanche de Castille, est une maison royale de moniales affiliée à l'ordre cistercien. Placée sous haute protection du fait de son statut, elle a servi à la fois de lieu de retraite pour de jeunes filles de haute naissance, de résidence royale et de nécropole pour des membres de la famille royale et de la grande noblesse. L'installation des moniales intervint dans les années qui ont suivi la fondation et l'abbaye fut rattachée à l'ordre de Cîteaux au milieu du siècle. L'église abbatiale, qui abritait de nombreux tombeaux et objets précieux, fut détruite à la Révolution et une partie de son mobilier dispersée. Après la fermeture de l'établissement sous l'Ancien Régime, les bâtiments furent transformés successivement en hôpital militaire, puis partiellement démantelés et réutilisés comme carrière de pierres, filature et ferme. Parmi les éléments conservés figurent la grange datée du XIIIe siècle, avec sa charpente d'origine, et un bâtiment du réfectoire composé de salles voûtées en croisées d'ogives ; un pont actuel remonte à la fin du XVIIIe siècle. L'ensemble a été classé au titre des monuments historiques et, devenu propriété du conseil général du Val-d'Oise, a fait l'objet de fouilles archéologiques et de campagnes de restauration à la fin du XXe siècle. Depuis 2001, l'abbaye accueille un centre d'art contemporain dont la programmation articule création actuelle, patrimoine architectural et environnement naturel. Le cloître et les bâtiments conventuels s'organisaient autour de l'église abbatiale, de la salle capitulaire, du dortoir, du chauffoir, des cuisines et du réfectoire ; le parloir était l'espace réservé aux échanges sous l'autorité de l'abbesse. Le site disposait d'un système hydraulique complexe alimenté par le ru de Liesse et par un aqueduc, avec des digues formant plusieurs étangs et un canal qui actionnait un moulin et assurait l'évacuation des eaux usées. Les latrines desservaient un caniveau et comportaient plusieurs sièges en bois ; leurs ouvertures sont aujourd'hui vitrées et la salle présente un ensemble d'arches remarquables. Maubuisson fut aussi le théâtre d'événements politiques marquants : c'est depuis l'abbaye qu'un ordre royal important fut donné contre un ordre militaire médiéval. La nécropole de l'abbaye, bien conservée, a livré de nombreux ossements qui ont permis des études anthropologiques et archéologiques approfondies. Ces analyses ont mis en évidence des taux élevés de plomb osseux chez de nombreuses moniales, avec des fluctuations et des pics de contamination entre le XIVe et le XVIIIe siècle. Les recherches ont exploré plusieurs sources possibles de cette contamination : l'usage très répandu dans l'abbaye de vaisselle en céramique glaçurée au plomb, la présence d'émaux et de carrelages glaçurés, l'emploi de cosmétiques à base de plomb, ainsi que la contamination éventuelle de l'eau ou du vin. L'étude du dépotoir médiéval et du mobilier céramique a montré une proportion exceptionnelle de vaisselle à glaçure au plomb, susceptible d'avoir contaminé aliments et boissons par contact ou par migration des oxydes de plomb. Si des sections de conduite en plomb furent installées à une époque tardive, les données indiquent que la contamination osseuse existait déjà avant ce changement du réseau hydraulique. Des programmes scientifiques conduits par des équipes nationales et internationales ont replacé ces résultats dans une problématique plus large sur l'évolution de la contamination métallique en Europe, en choisissant Maubuisson pour la qualité de sa conservation et l'abondance de sa documentation. Les travaux historiques et archéologiques menés sur le site ont enfin permis de reconstituer l'organisation des sépultures, des espaces conventuels et des aménagements techniques qui structurent encore aujourd'hui le parc et les vestiges bâtis.