Période
XIIIe siècle, 4e quart XVe siècle, XVIe siècle, XVIIe siècle, XVIIIe siècle
Patrimoine classé
L'église abbatiale : classement par liste de 1862 - Le porche ; la façade et le versant de toiture correspondant sur l'actuelle cour intérieure du bâtiment contigü au nord du porche ; les façades et toitures dans leurs dispositions d'origine de l'ancien bâtiment de concierge (cad. AN 243, 757, 760, 762) : inscription par arrêté du 9 octobre 1986 - Les façades, toitures et tous éléments anciens internes de structure de la salle capitulaire, du bâtiment dit ancien réfectoire (y compris les vestiges intérieurs du XIIIe siècle, mais sauf adjonctions contemporaines à démolir) , du bâtiment dit nouveau réfectoire (y compris la charpente en carène renversée) , du bâtiment dit des appartements de l'abbesse ; vestiges de l'ancienne infirmerie et de l'ancienne maison de l'hermitage ; l'ensemble des vestiges archéologiques contenus dans les sols des cours du cloître et de l'abbaye (cad. AN 267, 269 à 273, 652 à 654) : classement par arrêté du 31 mars 1992 - Les vestiges du colombier ; les vestiges anciens situés entre la place Carnot, l'actuelle rue Léon-Gambetta et la rue de la Poissonnerie (cad. AN 683, 236 à 241) : inscription par arrêté du 19 mai 1993
Origine et histoire de l'Abbaye
L'ancienne abbaye de Montivilliers, fondée au VIIe siècle par saint Philibert, est un monastère bénédictin féminin situé sur la commune de Montivilliers en Seine-Maritime. Mentionnée dès le IXe siècle, elle fut détruite lors des raids vikings avant d'être relevée au XIe siècle ; Richard II la plaça sous la dépendance de Fécamp puis, en 1035, elle recouvra son autonomie et redevint une abbaye de femmes sous l'autorité de Béatrice de Normandie, bénéficiant d'une exemption épiscopale. Dotée de nombreux biens locaux, la communauté entreprit la construction de la grande église abbatiale au XIe siècle, remarquable témoin de l'architecture normande de l'époque de Guillaume le Conquérant, et fut placée sous la protection du Saint-Siège à la fin du XIIe siècle. Au XVe siècle, la nef subit d'importantes transformations avec l'adjonction d'un vaste vaisseau gothique sur son côté nord, et du XVIe au XVIIIe siècle l'abbaye conserva un fort rayonnement, notamment sous l'abbatiat de Louise de L'Hospital qui procéda à sa réforme en 1602. Abandonnée par les religieuses en 1792, elle connut pendant la Révolution et au XIXe siècle des usages très variés, civils et industriels, avant que la municipalité n'engage, à partir des années 1970, une restauration qui permit l'installation d'une bibliothèque dans le Logis des Abbesses et la restitution des espaces historiques, l'aménagement d'une salle d'expositions temporaires et la création d'un parcours spectacle.
L'église abbatiale conserve un plan d'origine bénédictine remanié au XVe siècle et présente, à la croisée, un imposant clocher de la fin du XIe siècle. La façade, de la première moitié du XIIe siècle, devait comporter deux tours mais seule la tour nord subsiste ; un grand remplage gothique percé au XIVe siècle surmonte le portail roman. Dans la nef, le côté sud, restauré au XIXe siècle, reste roman tandis que l'ensemble de la nef, de style gothique flamboyant, est éclairé par de grandes fenêtres ouvrant sur six chapelles contiguës. Les voûtes et les arcs témoignent des remaniements successifs : une voûte du XVIIe siècle masque la voûte du XIIe siècle à la croisée, les bras du transept sont couverts de voûtes d'ogives archaïques et l'arc en plein cintre de l'absidiole sud présente vingt claveaux sculptés. Le chœur, profond de trois travées et fortement remanié au XVIIe siècle, laisse cependant deviner sa structure romane primitive. L'orgue, réalisé par Louis Debierre, a vu son centenaire célébré en 1992 par un récital de Pierre Pincemaille.
Le cloître, dont l'aspect primitif est inconnu, a été reconstitué lors des restaurations récentes ; il est bordé à l'ouest par le Logis des Abbesses, édifié au XVIIIe siècle. Au sud se développe un bâtiment en pierre et silex taillés, datable du XVe ou du début du XVIe siècle, qui abritait au rez-de-chaussée le réfectoire et à l'étage un dortoir dont la charpente en châtaignier remonte au XVIe siècle. À l'est, la salle capitulaire voûtée remonte au XIe siècle et, à sa suite, l'ancien réfectoire gothique du XIIIe siècle se distingue par ses voûtes d'ogives portant sur colonnettes et une file centrale de colonnes rondes. Les vestiges de l'ancienne infirmerie, du XVe siècle, se trouvent au chevet de l'église ; ces bâtiments ont accueilli successivement un collège et divers établissements scolaires au XIXe et XXe siècles.
Sur le plan patrimonial, l'église abbatiale est classée au titre des monuments historiques depuis 1862 et plusieurs éléments du site — porche, façades, toitures, salles historiques, charpentes et vestiges archéologiques — font l'objet de protections par arrêtés des années 1986, 1992 et 1993. Les armes de l'abbaye sont de gueules à une crosse d'or sur une montagne d'argent. La succession des abbesses, établie de 1035 à 1792, recense de nombreuses figures telles que Béatrice de Normandie, Élisabeth, Louise de L'Hospital de Vitry et Marie II Anne de Grossolles de Flamarens. Parmi les personnalités liées au monastère figure aussi Catherine-Angélique d'Orléans, évoquée dans les sources locales.