Origine et histoire de l'Abbaye de Montpeyroux
L’abbaye cistercienne de Montpeyroux, située sur le territoire de la commune actuelle de Puy-Guillaume dans le Puy-de-Dôme, est une implantation monastique fondée au XIIe siècle par des moines de l’abbaye de Bonnevaux. Elle occupe la rive droite de la Crédogne, à 314 mètres d’altitude, à l’endroit où la rivière quitte les gorges pour un cours de plaine avant de se jeter dans la Dore. Le site est ceint d’un canal de dérivation, captant la Crédogne et plusieurs ruisseaux, qui a alimenté deux moulins sous l’Ancien Régime ; on ne peut toutefois préciser si le tracé du canal est d’origine médiévale, même s’il apparaît sur le cadastre napoléonien et la carte de Cassini. Le lit de la Crédogne est canalisé au droit du monastère ; une prise d’eau desservait probablement le cloître et un conduit voûté, dont subsistent des éléments, rejetait les eaux usées et les drains de la plaine dans la rivière en aval.
La fondation remonte à 1126, à l’initiative de Foulques III de Jaligny, qui donna des terres aux cisterciens de Bonnevaux alors dirigés par Jean de Bonnevaux ; le premier abbé fut Jean Juvenel. L’abbatiale, achevée en 1175, fut consacrée par l’archevêque de Clermont, Ponce, ancien moine cistercien et abbé de Clairvaux. Au Moyen Âge l’abbaye se développa, reçut des donations importantes et jouit d’une situation favorable liée à la Crédogne, qui permit l’établissement de moulins et une activité économique prospère ; elle bénéficia également de la protection d’Alphonse de Poitiers en 1251, protection confirmée par la suite par Philippe III et Philippe le Bel.
L’abbaye connut des épisodes de violence et de pillage, notamment en 1485 lorsque Louis Ier de Montpensier chassa les religieux, puis lors des guerres de Religion un siècle plus tard. Un incendie majeur en 1685 détruisit une grande partie des bâtiments conventuels ; des reconstructions partielles eurent lieu ensuite, avec des travaux entre 1686 et 1691, mais des projets restèrent inachevés à la veille de la Révolution. À la Révolution française l’abbaye fut fermée et vendue comme bien national.
Les reconstructions ont profondément transformé le monastère : les bâtiments conventuels relevés à la fin du XVIIe ou au début du XVIIIe siècle présentent des ordonnances classiques et une conception qui les rapprochent d’un château, avec l’absence de dortoirs remplacés par des chambres individuelles et un vaste parc d’agrément. L’église subit des démolitions partielles au XIXe siècle après 1835, date du cadastre ancien, et le bâtiment conventuel a été remanié et rhabillé après cette même date ; une tour de style troubadour et une tourelle à l’aspect de minaret furent ajoutées au XIXe siècle. Au début du XXe siècle, le bas-côté ouest fut transformé en cuisine et des éléments architecturaux médiévaux, comme des remplages en andésite et des chapiteaux en granite, furent remployés dans des murs et dans la grange de la ferme voisine de Chez Pourrat.
Sur le plan architectural, l’ensemble respecte globalement le plan d’un monastère cistercien avec le cloître au sud de l’église. Quelques vestiges médiévaux subsisteraient dans l’aile orientale, notamment d’anciens dortoirs et la salle capitulaire, tandis que d’autres parties sont le fruit des reconstructions modernes. L’abbatiale, bâtie en granite, offrait une nef flanquée de deux collatéraux d’environ trente mètres de longueur et cinq travées pour une largeur totale de 17,3 mètres ; la présence d’une croisée d’ogives témoigne d’une maîtrise d’un gothique rudimentaire et la décoration, sobre selon les principes bernardins, comporte des crochets sur les chapiteaux et des griffes aux bases de colonnes. La façade occidentale, encore visible, est percée de trois portails et surmontée de cinq baies, dont deux en plein cintre encadrant trois lancettes ogivales, le tout dominé par une rose ; le chevet a disparu mais des représentations de la fin du XVIIIe siècle montrent un déambulatoire rayonnant autour du chœur.
L’abbaye de Montpeyroux est fille de Bonnevaux et a été mère de Bellaigue. Elle a fait l’objet d’études dès le XIXe siècle, la première monographie étant due à l’abbé Matussière en 1850 ; des travaux ultérieurs, notamment par Maurice Archimbaud et Alexandre Bigay en 1943, ont repris et complété ces recherches. L’ensemble est inscrit au titre des monuments historiques par arrêté du 7 novembre 2000, et la mairie de Puy-Guillaume étudie la faisabilité d’une réhabilitation pour réutiliser le site à des fins culturelles.