Origine et histoire de l'Abbaye de Moutier d'Ahun
L'église de l'Assomption, d'origine ancienne, conserve des éléments datés des XIIe et XVe siècles : le chœur voûté, le transept, le chevet, le clocher carré et des vestiges de la nef, organisés sur un plan en croix latine, tandis que le portail relève du XVe siècle. Le clocher, placé à la jonction du chœur, des transepts et de la nef, est soutenu par quatre piliers et ouvert, au sommet, par vingt-quatre baies romanes disposées en arcatures groupées par deux. L'origine du monastère remonte à 997 lorsque Boson II, comte de la Marche, le donna à l'abbaye Saint-Pierre d'Uzerche ; quelques fragments de cette première église subsistent encastrés dans les façades du chœur, parmi lesquels une stèle funéraire et d'autres débris antiques. En 1113 le monastère se sépare d'Uzerche ; au XIIe siècle sont construits ou reconstruits le chœur, le transept et le clocher, la coupole ayant été ajoutée ultérieurement tandis que la nef était couverte en charpente. La façade fut détruite lors de la Praguerie en 1440 puis restaurée en 1449 avec la construction du portail. L'abbaye connut ensuite des troubles internes et passa en commende en 1559. En 1591, lors d'un siège mené par Gaspard Foucaud, gouverneur de la Marche, la nef et le transept furent incendiés et s'effondrèrent ; l'édifice fut ensuite restauré en réemployant les matériaux issus des destructions et est resté dans cet état. L'ensemble monastique, d'abord bénédictin, fut pillé et laissé à l'abandon après ces événements ; des pierres furent récupérées par les habitants, accentuant les dégradations. Quelques moines de l'observance clunisienne se réinstallèrent en 1610 et entreprirent une reconstruction à partir de 1612, l'essentiel des travaux semblant achevé vers le milieu des années 1610, le dortoir n'étant terminé qu'en 1648. La communauté resta toujours très réduite et dut affronter les fréquentes contestations avec les abbés commendataires ; la maison fut finalement dissoute à la fin de l'Ancien Régime, les scellés apposés en 1788, puis vendue comme bien national en 1790. Rendue au culte sous le Directoire, l'ancienne abbatiale devint église paroissiale en 1844 ; les derniers vestiges de la nef furent alors rasés et remplacés par un jardin planté de tilleuls marquant l'emplacement supposé des piliers. Dans ce jardin se trouvent aujourd'hui le monument aux morts de la commune, une borne leugaire gallo-romaine indiquant l'ancienne distance d'Ahun à Limoges et une stèle funéraire gallo-romaine enchâssée dans la paroi du porche. Le principal intérêt de l'église réside dans ses boiseries sculptées, classées parmi les monuments historiques depuis 1889 : commandées par les prieurs Jean et Étienne Le Moyne, elles ont été réalisées en deux campagnes (1673-1674 et 1678-1681) par l'atelier du sculpteur auvergnat Simon Bouer. De la première campagne provient le grand retable à colonnes torses ; la seconde a livré les entourages des portes des chapelles latérales, vingt-six stalles richement sculptées de visages, motifs floraux et animaux fantastiques, le jubé de 1681, ainsi que le lutrin et un Christ biface, formant un remarquable ensemble du baroque provincial. Recouvertes d'une couche d'enduit pendant la Révolution, ces boiseries furent difficilement dégagées : une tentative de décapage en 1896 échoua, puis l'abbé Victor-Julien Malapert, curé de 1904 à 1963, mena la restauration qui leur rendit leur aspect d'origine ; un nettoyage et un traitement du bois ont été réalisés plus récemment pour protéger cet héritage. Les monogrammes des religieux ayant commandé les travaux sont gravés sur la partie inférieure des boiseries, de chaque côté en avant des stalles.