Origine et histoire de l'Abbaye de Royaumont
L'abbaye de Royaumont, ancien monastère cistercien situé à Asnières-sur-Oise dans le Val-d'Oise, a été fondée par charte en 1228 et construite sous l'égide de Louis IX entre 1228 et 1235. Dès 1234, l'église abbatiale devint nécropole royale où furent inhumés plusieurs enfants de la famille de Saint Louis. Installée au confluent de l'Oise, de la Thève et de l'Ysieux, l'abbaye fut rapidement l'une des plus importantes de France, comptant dès l'origine un effectif important de moines et de frères convers. Louis IX surveilla étroitement les travaux, dota généreusement l'établissement et participa activement à la vie du monastère, qui accueillit notamment le dominicain Vincent de Beauvais. Royaumont dépendait directement de l'abbaye mère de Cîteaux et jouit d'un statut exceptionnel, bénéficiant de rentes, de terres et de privilèges royaux.
Au cours du Moyen Âge l'abbaye connut son apogée, soutint la cause de la canonisation de Louis IX et étendit son influence foncière en Île-de-France et au-delà, acquérant hôtels et seigneuries. La guerre de Cent Ans porta toutefois un rude coup : pillages, rançons et désordres sociaux affaiblirent l'institution, qui vit son nombre de religieux baisser fortement et dut recourir à des remèdes disciplinaires et financiers. Les tentatives de restauration et les réformes de l'ordre cistercien alternèrent avec des périodes de relâchement, et des catastrophes comme l'incendie dû à la foudre en 1473 puis en 1760 entraînèrent d'importants travaux de réparation.
À partir du XVIe siècle, l'abbaye passa sous le régime des abbés commendataires, souvent absents et peu soucieux du spirituel, ce qui provoqua des tensions et une gestion plus tournées vers le temporel ; malgré cela Royaumont conserva une réputation de piété et, sous certains abbés, retrouva un meilleur ordre et des ressources. À la Révolution française l'ensemble monastique fut vendu comme bien national : meubles, livres, archives et tombeaux furent dispersés, et les bâtiments furent transformés en usine textile. Le marquis de Travanet et, plus tard, l'industriel Joseph Van der Mersch adaptèrent les locaux à une filature puis à une manufacture, aménageant roues hydrauliques, machines à vapeur et nouveaux bâtiments, avant la fermeture définitive de l'activité industrielle au milieu du XIXe siècle.
L'abbaye retrouva une vocation religieuse en 1864 avec l'installation des Oblats de Marie-Immaculée, puis fut confiée en 1869 aux Sœurs de la Sainte-Famille, qui engagèrent des restaurations et rebâtirent des parties détruites du cloître et du réfectoire selon les plans d'origine. En 1905 Jules Goüin racheta l'ensemble pour préserver le site d'une reconversion industrielle ; pendant la Première Guerre mondiale des bâtiments accueillirent un hôpital géré par des équipes féminines britanniques.
Au XXe siècle la famille Goüin ouvrit progressivement l'abbaye aux artistes et intellectuels ; Henry Goüin y anima dès les années 1930 un foyer de travail et de repos qui, après la Seconde Guerre mondiale, devint un centre culturel international accueillant colloques, stages et manifestations artistiques. En 1964 Henry et Isabel Goüin donnèrent l'abbaye à la Fondation Royaumont, première fondation privée à but culturel en France, chargée de conserver le monument et de développer des programmes de recherche, de formation et de création. La Fondation a réorienté les activités vers la musique et la danse tout en poursuivant la restauration et la valorisation du patrimoine, en lien avec des partenaires publics et associatifs.
Sur le plan archéologique, des fouilles récentes ont mis au jour de nombreux vestiges, dont dix sépultures, et confirment l'importance historique et matérielle du site. Aujourd'hui Royaumont conserve une grande partie de son architecture médiévale — cloître, réfectoire des moines, bâtiment des latrines, dortoir, bâtiment des convers et vestiges de l'abbatiale — et accueille le public ainsi que des résidences artistiques et des concerts dans un cadre patrimonial entretenu par la Fondation.