Origine et histoire de l'Abbaye (et les restes du cloître)
L'église Saint-Michel appartient à l'ancienne abbaye bénédictine de Saint‑Génis‑des‑Fontaines, située au cœur du village du même nom dans les Pyrénées‑Orientales. Selon une inscription, le linteau sculpté du portail daterait de 1019‑1020, ce qui en fait la plus ancienne sculpture romane datée de France. L'abbaye, fondée autour de 819 et mentionnée dès cette date avec l'abbé Sentimirus, fut sans doute détruite par des incursions de « païens » et partiellement rebâtie en 981, selon un acte de Lothaire. Le chevet conserve des maçonneries pouvant remonter au Xe siècle : chaînes d'angle en très grands blocs posés sur champ et murs en galets assisés, dessinant des arêtes de poisson, vestiges appartenant à l'église de 981. Sont notamment identifiés des éléments importants du transept — son plan et la plupart des piédroits des arcs orientés vers l'est et la nef — ainsi que la façade sud, l'absidiole nord entière, la travée droite de l'abside centrale et le départ de l'absidiole sud. Il est possible que la partie orientale de la nef ait été élevée au début du XIe siècle et que le linteau ait été sculpté pour un portail aujourd'hui disparu ; ce linteau aurait ensuite été replacé à son emplacement actuel à la fin du XIIe siècle ou au début du XIIIe. Des travaux du XIIe siècle ont visiblement allongé la nef, voûté l'ensemble et surélevé les goutterots, et l'abside a été décorée de peintures murales dont subsistent deux fragments ; l'église fut consacrée après ces transformations en 1153. Dominée par deux clochers‑tours, dont le plus élevé se dresse sur la croisée du transept, l'église présente aujourd'hui un plan en croix latine avec une nef unique débouchant sur un transept pourvu de trois absides. Le mobilier comprend surtout plusieurs retables baroques, le retable central étant un ensemble en bois peint daté du début du XVIIe siècle. Classée au titre des monuments historiques par arrêté du 28 septembre 1966, l'église reste paroissiale depuis son rétablissement au culte en 1846, après la dispersion des moines à la Révolution et la vente des bâtiments conventuels. Le cloître en marbre, daté de la fin du XIIIe siècle et achevé selon une épitaphe en 1271, fut ajouté au nord‑est de l'église mais fut fragmenté et vendu comme bien national ; au début du XXe siècle l'antiquaire Paul Gouvert acquit la majeure partie des galeries, les démonta et fit sculpter des copies, expédiant des éléments en divers lieux dont les Mesnuls, Philadelphie et le Louvre. Dans la seconde moitié du XXe siècle, l'État racheta le cloître des Mesnuls et le Louvre restitua deux arcades, ce qui permit la réinstallation du cloître à Saint‑Génis dans les années 1980 en s'appuyant sur des clichés anciens ; les travaux menés entre 1986 et 1987 se poursuivirent jusqu'en 1994 pour remplacer les éléments manquants par de nouvelles sculptures. Le cloître, qui illustre un style roman tardif des années 1250‑1260 avec jeux de couleurs sur différents marbres et un trait de sculpture sobre, est doublement classé aux monuments historiques (arrêtés de 17 juillet 1924 et 5 mai 1975). Parmi les chapiteaux, certains présentent des reliefs appuyés aux angles et des faces traitées en méplats, et l'on remarque sur le seizième pilier des représentations d'une tortue, d'un rat et d'un hibou évoquant la faune locale. La façade principale de l'église comporte des ossuaires et des sculptures romanes, ainsi que le portail en marbre blanc qui porte le fameux linteau ; des inscriptions funéraires y signalent des sépultures de moines et de bienfaiteurs, et plusieurs pierres tombales montrent des défunts couchés, les bras croisés. Enfin, le cloître ayant été restitué au site et l'église conservée comme église paroissiale, les bâtiments subsistent malgré la disparition des moines depuis la Révolution, tandis que d'autres constructions conventuelles sont devenues des propriétés privées.
