Origine et histoire de l'Abbaye de Saint-Maur
L'abbaye, initialement appelée abbaye des Fossés, a été fondée en 639 par le diacre de Paris Blidegisilus sur une presqu'île formée par un méandre de la Marne. Les premières chartes connues datent de la fin du VIIe et du début du VIIIe siècle, et la chapelle Notre‑Dame‑des‑Miracles marque l'emplacement de l'église primitive où fut inhumé Babolein. L'abbaye connaît plusieurs phases de reconstruction : une église est dédiée en 829 par l'abbé Benoît, une restauration partielle intervient vers 920, puis une vaste abbatiale romane est élevée et dédiée en 1030 sous l'abbé Eudes II. Aux XIIe et XIIIe siècles l'ensemble est développé : la chapelle Notre‑Dame‑des‑Miracles et le cloître aux statues‑colonnes sont construits au milieu du XIIe siècle, tandis que la fin du XIIe voit l'apparition de colonnes engagées, de chapiteaux, du voûtement de la nef et de tours sur les bras du transept. Au quatrième quart du XIIIe siècle l'abbé Pierre de Chevry fait élever le chœur et les chapelles rayonnantes et réaménager plusieurs bâtiments conventuels, dont le réfectoire où sont remployées des statues‑colonnes du cloître. Une enceinte fortifiée est mise en place dans la seconde moitié du XIVe siècle, dont la tour occidentale dite « tour Rabelais » est un vestige notable. L'abbaye accueille des pèlerinages à partir du XIIe siècle en lien avec les reliques de saint Maur transférées en 868, et devient un important lieu de dévotion en Île‑de‑France. Elle passe en commende à la fin du XVe siècle puis est sécularisée en 1533 et transformée en chapitre de chanoines. À partir du XVIIe siècle l'entretien des bâtiments se dégrade : l'église est frappée par la foudre et plusieurs constructions s'effondrent, et la collégiale est finalement supprimée en 1749 par l'archevêque Christophe de Beaumont, qui autorise aussi la démolition des lieux claustraux. Les ruines servent ensuite de carrière ; la chapelle Notre‑Dame‑des‑Miracles reste desservie jusqu'à sa vente comme bien national à la Révolution. Au XIXe siècle Édouard Bourières regroupe le site, fait fouiller la crypte romane et transforme les écuries des chanoines en une villa néo‑Renaissance, tandis qu'un projet de lotissement abandonné en 1886 permet la création d'un parc romantique. Au début du XXe siècle Adolphe Maujan acquiert le domaine, le relie à la chapelle par une galerie de cloître néo‑gothique et aménage des fabriques, travaux auxquels participent l'architecte Alexandre Paquet et le sculpteur Legastellois. Le domaine passe ensuite aux sœurs dominicaines de 1920 à 1958, puis à la Caisse des Dépôts ; la ville de Saint‑Maur en fait l'acquisition en 1962. En 1966 la plupart des vestiges de l'enceinte sont détruits lors de la construction d'une maison de retraite. Des fouilles anciennes, commencées par Bourières en 1861, et des interventions menées tout au long du XXe siècle ont mis au jour des sépultures carolingiennes, des inhumations médiévales, des murs et niveaux d'occupation allant de l'âge du Fer au haut Moyen Âge, ainsi que des éléments de l'abbatiale et de la chapelle Notre‑Dame‑des‑Miracles. Parmi les vestiges encore visibles in situ figurent le pilier nord du chœur (fin XIIIe siècle), le mur du cellier (début XIIe siècle), les bases de colonnes de la chapelle Notre‑Dame‑des‑Miracles (milieu XIIe siècle), la tour Rabelais (troisième quart du XIVe siècle) et la villa Bourières du XIXe siècle. Les vestiges de l'abbaye sont classés au titre des monuments historiques depuis le 13 juin 1988 et le domaine forme aujourd'hui le Parc de l'abbaye, lieu de promenades et d'animations culturelles.