Origine et histoire de l'Abbaye
Ancienne abbaye située à Saint-Maurin, dans le Lot-et-Garonne, l’ensemble se présente aujourd’hui comme des ruines couvrant plusieurs époques. On y distingue les vestiges de l’abbatiale romane — dont deux travées du chœur, le croisillon sud du transept avec son absidiole et le clocher — ainsi que des chapiteaux historiés parmi lesquels figurent deux scènes liées au martyre de saint Maurin. Un important corps de bâtiment du XVe siècle subsiste, comprenant quatre travées du cloître, une salle voûtée qui pourrait être l’ancien réfectoire, une grotte de rocaille et le vivier. Le cloître primitif longeait le flanc nord de la nef ; la galerie nord conserve encore des vestiges de quatre travées. Les bâtiments conventuels entouraient ce cloître : la salle capitulaire médiévale se trouvait au rez-de-chaussée, le dortoir à l’étage et le réfectoire était implanté dans le bâtiment nord avant d’être transformé en salle capitulaire.
La tradition locale, relayée par des sources monastiques, associe la fondation du lieu au culte de saint Maurin ; une basilique aurait été élevée sur le lieu de son ensevelissement. L’abbaye apparaît dans les documents médiévaux et, après des phases de construction et reconstruction, entre dans l’obédience clunisienne à la fin du XIe siècle. L’abbatiale semble résulter de campagnes successives ou d’un chantier complexe, comme l’ont proposé différents spécialistes : certaines parties relèvent d’un programme romain ancien, d’autres d’un réaménagement postérieur au XIIe siècle.
L’abbaye connaît son apogée aux XIIe et XIIIe siècles, grâce à une série d’abbés qui renforcent ses ressources et son influence. Elle subit d’importantes destructions pendant la guerre de Cent Ans, pillages et incendies entraînant la ruine partielle des bâtiments et la perte d’une grande partie de la communauté. À la fin du Moyen Âge et à la Renaissance, des abbés commendataires, notamment de la famille de Lustrac, font édifier et restaurer le château abbatial et reprennent des travaux sur le cloître et les logements conventuels.
Aux XVIe et XVIIe siècles l’abbaye est de nouveau pillée et incendiée lors des guerres de religion ; l’abbatiale est fortement endommagée et sa couverture modifiée. Des campagnes de restauration interviennent ensuite, notamment sous la direction d’abbés qui disputent l’entretien des bâtiments et font remonter ou adapter des élévations pour les appartements abbatiaux. Les pères de la congrégation de Saint-Maur arrivent en 1651 pour réformer la communauté et des projets d’aménagement sont dressés, sans tous être exécutés.
La Révolution provoque la vente des bâtiments comme bien national ; des démolitions ont lieu à partir de la fin du XVIIIe et au début du XIXe siècle, la nef de l’abbatiale étant en grande partie détruite et plusieurs galeries du cloître supprimées. Au cours du XIXe et du XXe siècle, des opérations de consolidation et de restauration sont menées ponctuellement, tandis que d’autres parties s’effondrent faute d’entretien. L’ensemble a été classé au titre des monuments historiques en 1908. En 1993 a été créée l’association "Les Amis de l’abbaye de Saint-Maurin" pour contribuer à sa mise en valeur.
L’abbaye possédait autrefois de nombreuses paroisses dans la région — parmi elles Saint-Martin d’Anglars, Saint-Pierre del Pech, Saint-Amans de Tayrac, Saint-Martin de Montjoi, Notre-Dame de Roquecor et d’autres — dont les revenus assuraient l’entretien et le paiement des pensions aux religieux. Au moment de la Révolution, les revenus déclarés incluaient des montants chiffrés pour la mense conventuelle, les prieurés et la mense abbatiale. Aujourd’hui, le site offre un témoignage composite de l’histoire monastique, médiévale et postmédiévale de la région, visible dans les éléments architecturaux conservés et les vestiges paysagers.