Origine et histoire de l'Abbaye de Valmagne
L'abbaye Sainte-Marie de Valmagne est une abbaye cistercienne située à Villeveyrac, dans l'Hérault, en région Occitanie. Fondée en 1138 par Raymond Trencavel et confirmée l'année suivante, elle reçoit des moines venus de Notre-Dame d'Ardorel et dépend d'abord de Cadouin avant de se rattacher à Bonnevaux puis à l'obédience de Cîteaux en 1145, affiliation confirmée par le pape Adrien IV en 1159. L'abbaye suit alors les règles morales et architecturales de saint Bernard. Valmagne connaît une période de grande prospérité matérialisée par d'abondantes donations, la création de nombreuses granges et moulins, des possessions urbaines à Béziers et Montpellier et l'établissement d'un vignoble par des moines bourguignons. Cette puissance se traduit par la reconstruction d'une vaste église gothique à partir de 1257 et par le renouvellement du cloître au XIVe siècle, tout en conservant des éléments romans. Du XIIe siècle au début du XIVe siècle, Valmagne figure parmi les abbayes les plus riches du sud de la France et rassemble près de trois cents moines. La décadence débute avec la guerre de Cent Ans, la peste de 1348 et les passages de grandes compagnies, qui provoquent morts, départs et destructions et entraînent ventes de dépendances et difficultés financières. À partir de 1477, la nomination d'abbés commendataires issus de l'extérieur modifie la gestion et contribue au relâchement de la vie communautaire. Lors des guerres de Religion l'abbaye est presque abandonnée : en 1575 une attaque huguenote détruit les vitraux et cause d'importants dommages, notamment au cloître, et plusieurs moines sont massacrés. Après une période d'abandon et d'occupation par des brigands, les moines reviennent au début du XVIIe siècle et entreprennent d'importants travaux de restauration. À partir de 1680 le cardinal Pierre de Bonzi réalise des transformations notables — escalier d'honneur, élévation d'un étage au cloître et création d'un jardin à la française — avant de céder l'abbaye à son neveu Armand Pierre de La Croix de Castries en 1698. Au XVIIIe siècle les moyens déclinent, la communauté se réduit et, lors de la Révolution française, l'abbaye est à nouveau saccagée ; les trois derniers moines quittent le site en 1790 et l'abbaye devient bien national. Vendue en 1791 à Granier-Joyeuse, l'église est transformée en chai et aménagée avec de grands foudres, puis rachetée en 1838 par le comte de Turenne ; la propriété demeure ensuite dans sa descendance, qui entretient la viticulture. L'église, le cloître et la salle capitulaire ont été protégés au titre des monuments historiques et l'ensemble accueille des visites touristiques depuis 1975 ainsi que des manifestations culturelles occasionnelles. L'édifice actuel, de style gothique rayonnant, reconstruit à partir de 1257 sur des fondations romanes, mesure 83 mètres de long et présente une élévation ambitieuse malgré des contreforts partiellement effondrés. La façade est précédée d'un narthex encadré par deux tours ; l'intérieur comprend une nef de sept travées avec deux collatéraux, un transept peu saillant ouvrant sur neuf chapelles dont sept rayonnantes, et un déambulatoire creusé par des piliers en amande et un resserrement progressif de l'espace vers le chevet. La décoration, fidèle à la règle cistercienne, reste sobre et se limite à des clés de voûte et à quelques éléments végétaux sur les chapiteaux, tandis que la chapelle du chevet conserve une Vierge du XVIIe siècle ; la nef abrite encore les foudres hérités de la période de chai et un clocher-mur à trois ouvertures évoque le triplet cistercien. L'aile est du cloître, la plus ancienne, date du XIIe siècle; le reste appartient au XIVe siècle et s'organise autour d'une vaste cour bordée de galeries qui ouvrent sur la bibliothèque, la sacristie, la salle capitulaire et le parloir. Le lavabo, devant le réfectoire, est entouré d'une clôture octogonale ornée d'arcs et de colonnettes et alimente une fontaine décorée de têtes de griffons, alimentée par la source de Diane ; le jardin du cloître présente des roses de Cîteaux et des bambous noirs. La salle capitulaire, l'une des plus anciennes parties du monastère, offre une nef unique voûtée en anse de panier, un portail depuis le cloître et des colonnettes aux chapiteaux variés, certains en marbre probablement réutilisés ; des fragments du jubé mutilé lors des guerres de Religion y ont été réemployés et représentent plusieurs scènes bibliques. D'autres bâtiments complètent l'ensemble : réfectoires, caveau, dortoir et la chambre d'hôte aménagée dans le bâtiment épiscopal du XVIIe siècle, tandis que le jardin de Saint-Blaise, près de la porterie, reconstitue un jardin médiéval de plantes potagères et médicinales. La vigne est cultivée à Valmagne depuis le XIIe siècle; après la transformation en chai le site a été surnommé la "cathédrale des vignes" et la propriété actuelle couvre environ 75 hectares, avec deux terroirs distincts — un sol argilo-calcaire devant l'abbaye favorisant les blancs et une parcelle de marnes et grès rouges derrière l'abbaye produisant des rouges de qualité — et abrite un petit conservatoire de cépages.