Abbaye Notre-Dame de Bellaigue à Virlet dans le Puy-de-Dôme

Patrimoine classé Patrimoine religieux Abbaye Eglise romane

Abbaye Notre-Dame de Bellaigue

  • Bellaigue
  • 63330 Virlet
Abbaye Notre-Dame de Bellaigue
Abbaye Notre-Dame de Bellaigue
Abbaye Notre-Dame de Bellaigue
Abbaye Notre-Dame de Bellaigue
Abbaye Notre-Dame de Bellaigue
Abbaye Notre-Dame de Bellaigue
Crédit photo : Aubussonais - Sous licence Creative Commons
Propriété privée

Période

XIIe siècle, XIVe siècle, XVIIIe siècle

Patrimoine classé

Eglise abbatiale : classement par certificat du 6 mai 1922 ; Façades et toitures des bâtiments conventuels, y compris la galerie du cloître ; escalier principal à balustres et escalier à vis qui le surmonte ; salle du Chapitre au rez-de-chaussée et chambre du Prieur au premier étage avec leur décor (cad. B 232) : inscription par arrêté du 26 décembre 1980

Origine et histoire de l'Abbaye Notre-Dame de Bellaigue

L’ancienne abbaye Notre‑Dame de Bellaigue, située à Virlet (Puy‑de‑Dôme), est une ancienne maison cistercienne aujourd’hui bénédictine ; la communauté monastique emploie le missel romain de 1962 et célèbre les offices en latin. Le site, appelé d’abord « Bellaigues » puis « Bellaigue » (Belle Eau), se situe entre 490 et 500 mètres d’altitude et est bordé au sud par le ruisseau de la Vialle. L’ensemble comporte une église du XIIe siècle et des bâtiments conventuels largement reconstruits au début du XVIIIe siècle après un incendie en 1689 ; une seule aile conventuelle subsiste aujourd’hui. La porterie et une tour d’enceinte, qui commandent l’accès à l’abbaye, semblent remonter au XIVe siècle et constituent des éléments assez rares. Le logis abbatial conserve, au rez‑de‑chaussée, des ouvertures sur le cloître, le réfectoire et la chaufferie, tandis qu’à l’étage se trouvaient la chambre du prieur et les cellules ; l’escalier principal intérieur présente une balustrade en bois et se prolonge par un petit escalier hélicoïdal dont la vis est taillée en une seule pièce de bois.

Fondée comme prieuré bénédictin dépendant de l’abbaye de Menat par Odon et Adémard de Bourbon en 950, Bellaigue servit d’abord de nécropole pour ses fondateurs avant le transfert des tombeaux à Souvigny. En 1136, un arbitrage de l’évêque de Clermont permit au prieuré de devenir abbaye indépendante, et en 1137 des moines de Montpeyroux placèrent la communauté sous l’observance de Cîteaux, marquant son ralliement au mouvement cistercien. La construction de l’église s’inscrit dans ce contexte de grande expansion cistercienne et se révèle contemporaine d’édifices comme Clairvaux, Fontenay ou Cîteaux. Le monastère connut son apogée du XIIe à la première moitié du XIVe siècle, soutenu par d’importantes donations des seigneurs de Jaligny, Marcillat, Montaigut, de Montluçon et des sires de Bourbon, dont plusieurs donateurs furent inhumés dans l’abbatiale.

Une activité de tuilerie s’était développée à environ un kilomètre de l’abbaye et apparaît encore sur la carte de Cassini du XVIIIe siècle ; aucune source n’en atteste formellement la paternité monastique, mais les études récentes la considèrent comme l’option la plus probable. Les moines mirent en place un mode de culture caractéristique des Combrailles, proche de celui de la Dombes : les étangs, alimentés par les cours d’eau et enrichis en limon pendant trois ans, étaient ensuite vidangés pour la pêche puis mis en culture avant d’être remis en eau ; un chapelet de quatre étangs subsiste au fond de la vallée. Archambaud VIII de Bourbon et son épouse Béatrix de Montluçon reposent dans l’abbatiale ; leur tombeau a été restauré et le bouclier d’Archambaud conserve des éléments de l’ancien blason de Bourbon.

Le déclin monastique s’amorce à la fin du XVe siècle : la communauté se réduit progressivement, la place des frères convers disparaît et le régime de la commende, renforcé par le concordat de 1515, provoque rivalités, misère économique et démembrement du patrimoine. En janvier 1689, un incendie détruit une grande partie des bâtiments conventuels ; la reconstruction, menée sous l’abbatiat d’Élian, se fait sur un plan réduit et s’étend sur une longue période. En 1768, la Commission des Réguliers signale huit moines et un revenu net de 8 000 livres. La Révolution de 1791 supprime le culte et entraîne la vente de l’abbaye comme bien national en février ; elle est alors acquise par Constantin Tailhardat de la Maisonneuve, qui souhaite la restituer aux moines.

Par la suite, l’abbaye est utilisée à diverses fins et l’église sert à des usages agricoles ; l’abbatiale est classée au titre des monuments historiques en 1922 et les bâtiments conventuels sont inscrits en 1980. Un renouveau débute en octobre 2000 lorsque quatre moines bénédictins du monastère de la Sainte‑Croix du Brésil s’installent à Bellaigue et reconstruisent les voûtes de l’abbatiale, permettant la reprise du culte catholique ; le père Ange Araújo Ferreira da Costa, premier prieur de la nouvelle fondation, est décédé en 2008 et repose dans l’abbaye. En juin 2017 la commune lance le chantier de construction du futur monastère.

Les niveaux médiévaux se situent environ trois mètres et demi sous les niveaux actuels, un exhaussement résultant des grands travaux du XVIIIe siècle destinés à mettre le monastère hors d’eau ; le niveau originel est enfoui sous une épaisse couche de sable de rivière et un remblai, et aucun bief traversant le monastère n’a été mis au jour. L’abbatiale est bâtie en granite local avec un appareil mixte alternant moyen appareil régulier et petit appareil irrégulier ; la base du portail, marquée par quatre contreforts, des bases attiques et des arcs en plein cintre, évoque une phase romane vers le milieu du XIIe siècle, tandis que la partie haute de la façade, composée de trois baies largement ébrasées, daterait de la fin du XIIe ou du début du XIIIe siècle, résultat d’un second chantier lié au ralliement au cistercianisme. La nef comprend sept travées sur une longueur totale de 31 mètres, avec des variations d’appareillage visibles du bas en haut des murs et des interventions successives liées aux réparations après l’incendie de 1689 et à un effondrement survenu en 1880, date à laquelle la toiture a été abaissée sous le pignon occidental.

Le bras nord du transept est surmonté d’une tour quadrangulaire dite tour du clocher, placée au‑dessus des tombeaux d’Archambaud VIII et de sa femme et s’appuyant sur une base carrée de 3,50 mètres de côté pour une élévation de 4,95 mètres. Les piles séparant les travées de la nef sont de plan quadrangulaire en moyen appareil avec colonnes engagées et arcs en plein cintre ; les arcades et la croisée du transept sont voûtées en berceau brisé renforcé d’arcs doubleaux, et le chœur se termine par une abside en cul‑de‑four. Des fragments de carreaux vernissés décorant le chœur ont été mis au jour en 2004 et portent des motifs colorés — griffon d’or sur fond rouge, croix de Saint‑André, roue à rayons rouges sur fond or — dont la provenance demeure inconnue.

Des sondages réalisés en 2004 autour du cloître et des ailes occidentale et méridionale ont confirmé la correspondance du plan avec le cadastre de 1833 et révélé des galeries souterraines, larges d’environ 3,5 mètres, situées sous le préau et l’aile sud. La communauté actuelle, de tendance catholique traditionaliste, a été proche de la Fraternité Saint‑Pie X jusqu’en 2019, date de la rupture des liens à la suite de dissensions internes. La vie monastique inclut la fête patronale le 15 août, et en 2016 la communauté comptait trente et un moines, dont six pères ; en 2017 ont commencé des travaux d’extension des ailes sud, nord et ouest et la construction du cloître, et une fondation en Allemagne a été établie le 14 octobre 2017 à la suite de l’achat en 2009 du monastère de Reichenstein.

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