Origine et histoire de l'Abbaye Notre-Dame de Bonport
L'abbaye Notre-Dame de Bonport est une ancienne abbaye cistercienne située sur la commune de Pont-de-l'Arche (Eure), sur la rive d'un bras mort de la Seine. Elle a été fondée en 1189 par Richard Cœur de Lion et les moines de Cîteaux s'y sont installés dès 1190. La construction des bâtiments s'est étalée durant la première moitié du XIIIe siècle ; seuls subsistent aujourd'hui quelques éléments du XIIIe siècle, comme le cellier et le réfectoire, la plupart des constructions actuelles relevant de l'époque classique. Une charte rédigée à Chinon le 22 juin 1190 atteste que Richard concéda aux moines des terres, une partie de la forêt de Bord et des parcelles dans la forêt d'Eawy pour y établir une grange, élever du bétail et prélever du bois de charpente, en leur accordant divers droits d'usage. Les premiers religieux seraient venus de l'abbaye Notre-Dame du Val et commencèrent par défricher les terrains avant d'entreprendre les travaux. La tradition rapporte que la fondation découle d'un vœu fait par Richard après avoir failli se noyer, d'où le nom de « Bonport », mais Jules Andrieux note l'absence d'une charte de fondation explicite. Au début du XIIIe siècle, une bulle du pape Innocent III plaça l'abbaye sous sa protection. L'abbaye connut son apogée aux XIIIe et XIVe siècles grâce à des revenus réguliers et à l'activité des moines copistes, et le pape Innocent IV accorda en 1244 une indulgence aux fidèles qui visiteraient le lieu, attirant de nombreux pèlerins. La guerre de Cent Ans causa pillages et dégâts infligés tant par les forces françaises que par les Anglo-Navarrais ; le roi Charles VI accorda des subsides pour réparer le cloître et l'église endommagés. En 1418 Henri V accorda une sauvegarde aux moines après y avoir séjourné lors du siège de Pont-de-l'Arche, et, trente et un ans plus tard, des ambassadeurs de France et d'Angleterre se rencontrèrent au monastère pour tenter d'établir la paix. En 1465 le roi Louis XI dédommagea également l'abbaye pour des dommages subis lors des troubles de la Ligue. À partir du XVIe siècle, l'instauration du régime de la commende provoqua un long déclin : les abbés ne résidèrent plus sur place, l'un d'eux reçut la charge à l'âge de deux ans, et la communauté diminua d'environ moitié. Malgré la raréfaction des vocations, les moines engagèrent des travaux importants pour moderniser des bâtiments vétustes et accueillir des hôtes prestigieux. La vente comme bien national en 1791 mit fin à l'activité monastique : l'abbaye fut cédée en plusieurs lots, l'église et le cloître furent détruits, et le mobilier ainsi que la bibliothèque dispersés. Les orgues et la clôture du chœur furent acquis par l'église Notre-Dame de Louviers, d'autres éléments furent déposés à Notre-Dame des Arts de Pont-de-l'Arche, et les cloches furent fondues ; l'église abbatiale servit de carrière de pierre jusqu'au milieu du XIXe siècle. À l'achat du site par la famille Lenoble en 1874, ne subsistaient que la ferme, le colombier, le dortoir, le réfectoire et la cuisine. Aujourd'hui l'abbaye appartient à des propriétaires privés qui entreprennent des travaux de restauration. Les archives identifiées comprennent un cartulaire du XIVe siècle réunissant 87 chartes, des chartes originales conservées aux archives départementales de l'Eure et de la Seine-Maritime, et les 374 chartes relatives à l'abbaye datées entre 1190 et 1467 ont été éditées par Jules Andrieux. Le poète Philippe Desportes est mort à Bonport le 5 octobre 1606. L'abbaye est classée au titre des monuments historiques depuis le 11 juillet 1942.