Origine et histoire de l'Abbaye Notre-Dame de Boquen
L'abbaye Notre-Dame de Boquen, dont le nom signifie « bois blanc », a été fondée en 1137 par Olivier II, comte de Dinan, et son épouse Agnorie de Penthièvre, et peuplée au départ par des moines venus de l'abbaye cistercienne de Bégard. Installée dans les landes du Mené, au sud de Plénée-Jugon, elle occupe un vallon traversé par l'Arguenon, bordé au sud de massifs forestiers et limité au nord par des hauteurs dominant la région ; la voie romaine dite chemin de l'Etrat passe non loin, dans la forêt. Les XIIe et XIIIe siècles correspondent à une période de prospérité pendant laquelle les seigneurs locaux multiplient les donations — parmi elles figurent un moulin fourni par le seigneur de Dinan et la pêcherie du Gouessan offerte par le seigneur de Lamballe — et les possessions territoriales de l'abbaye s'accroissent jusqu'à la fin du XIIIe siècle. Par la suite, l'abbaye subit des attaques et des pillages, notamment de la part de seigneurs voisins convertis au protestantisme, et connaît un long déclin. Gilles de Bretagne fut inhumé au pied du maître-autel de l'abbatiale ; le duc François Ier, son frère, fit ensuite des donations aux moines. Le chœur a été reconstruit et doté d'un chevet gothique allongé. À la suite de la mise en commende au XVIe siècle, les abbés commendataires réduisirent l'entretien des bâtiments et du personnel monastique, firent abattre des arbres et laissèrent se détériorer les constructions, allant jusqu'à faire démolir les bas-côtés de la nef pour éviter des réparations. Les troubles de la Ligue à la fin du XVIe siècle entraînèrent la dispersion des moines et de nouveaux pillages; les tentatives de réforme au XVIIe siècle n'inversèrent pas complètement la dégradation et, en 1682, il ne restait plus que quelques religieux. En 1791, l'ensemble des bâtiments et le domaine, qui s'étendait sur près de 33 hectares, furent vendus comme biens nationaux, puis l'abbaye passa entre de nombreux propriétaires et servit longtemps de carrière de pierres de taille. Au XXe siècle, Dom Alexis Presse engagea la restauration et la renaissance monastique : les ruines de l'église et les vestiges de la salle capitulaire furent classés monuments historiques en 1938, des bâtiments conventuels furent édifiés entre 1937 et 1947, une source ancienne fut canalisée, des ateliers construits en 1952, et la restauration de l'église débuta en 1953 pour aboutir à sa consécration en 1965. La communauté fut finalement dissoute en 1973; à la demande d'anciens moines, de l'évêque et d'habitants, les Petites Sœurs de Bethléem s'installèrent en 1976, donnant au monastère le vocable de Notre-Dame de la Croix Vivifiante. Depuis 2011, l'abbaye appartient à la communauté du Chemin Neuf. Sur le plan architectural, l'église élevée à la fin du XIIe siècle a perdu ses bas-côtés et ses grandes arcades de la nef sont murées, mais subsistent les colonnes cylindriques et leurs chapiteaux ornés de feuilles d'eau ; le chœur reconstruit possède de larges baies équipées de réseaux de pierre finement découpés. Du cloître il ne reste rien visible, tandis que la salle capitulaire, quoique mutilée, conserve de belles arcatures retombant sur des groupes de colonnettes à chapiteaux sculptés et présente des fûts et éléments de sculpture encore en place; sous la terre, le sol de terre cuite d'origine subsiste. Entre l'angle est du transept nord et la salle capitulaire se trouve une cave voûtée, et le transept porte la trace d'un ancien escalier qui menait probablement au dortoir. Les bâtiments au nord-ouest du cloître, très remaniés, conservent néanmoins des vestiges intéressants tels que cheminées, chapiteaux et éléments de fenestrage, et au nord de l'ensemble subsistent les traces d'un vivier alimenté par un ruisseau.