Période
2e moitié XIIe siècle, 1ère moitié XIIIe siècle, XVIIIe siècle
Patrimoine classé
Ruines de l'église abbatiale : classement par arrêté du 17 février 1904 - Les façades des bâtiments du XVIIIe siècle sur la cour et la grille d'entrée de l'ancienne abbaye : inscription par arrêté du 30 mai 1928 - Ensembles bâtis et non bâtis constituant une partie de l'ancienne abbaye et non encore protégés au titre des monuments historiques (cad. AY 1, 3, 4, 6 à 11, 28 à 33, 39 à 41, 163, 183, 189 à 191, 193, 202, 229, 248, 249) : inscription par arrêté du 6 mai 1999 - Tous les éléments bâtis et non bâtis des parcelles AY 27, 34, 43, 44, 230 correspondant à une partie de l'ancienne abbaye : classement par arrêté du 4 janvier 2001
Origine et histoire de l'Abbaye Notre-Dame
L'abbaye Notre‑Dame de La Couronne, située à La Couronne en Charente, est un monastère de chanoines réguliers aujourd'hui en ruines dont l'abbatiale illustre l'introduction du style gothique dans l'Ouest de la France. La première pierre de l'église fut posée le 12 mai 1118 par Lambert et les religieux de La Palud ; le 12 mars 1122 les religieux entrèrent dans l'église primitive en présence des évêques Guillaume de Périgueux et Girard d'Angoulême ainsi que du comte Vulgrin II, Lambert ayant été élu abbé et consacré à Pâques. À la fin du XIIe siècle, sous l'abbé Junius, l'abbaye entreprit une importante reconstruction : la nouvelle église, commencée en 1171, a vu son chœur et sa nef achevés avant d'être consacrée en 1201 par l'archevêque de Bordeaux, tandis que les bâtiments conventuels furent largement repris et qu'un mur d'enceinte fut dressé. La comtesse Isabelle d'Angoulême fit édifier une chapelle funéraire dédiée à saint Nicolas en avant du collatéral sud ; les restes de son père, Aymar Taillefer, y furent transférés en 1218. Une tradition locale rapporte qu'Isabelle aurait été inhumée à La Couronne, mais des sources modernes indiquent qu'elle se retira et fut enterrée à Fontevraud. Au XIIIe siècle l'abbaye s'enrichit en mobilier et fit élever son clocher et la chapelle Saint‑Nicolas. La guerre de Cent Ans puis les troubles du XIVe et XVe siècles entraînèrent le déclin : les bâtiments furent considérés comme ruiné et les religieux dispersés, les voûtes occidentales et le clocher s'effondrèrent vers 1450. À la fin du XVe siècle l'abbaye connut une phase de renouveau avec la remontée d'une partie de l'église effondrée et la construction d'un nouveau logis abbatial, les restaurations se poursuivant au début du XVIe siècle et ne couvrant que six travées de la nef. Pillages et destructions liés aux guerres de Religion en 1562 endommagèrent à nouveau le mobilier, mais les bâtiments conventuels furent remis en état à partir de 1571. Au XVIIe siècle l'abbaye fut rattachée d'abord aux Jésuites puis, en 1644, à la congrégation de Sainte‑Geneviève, entraînant de nouvelles réformes et travaux ; une dernière campagne importante transforma les bâtiments conventuels au XVIIIe siècle. À la Révolution l'abbaye devint bien national, fut vendue en 1807, servit de carrière et fut progressivement démantelée et morcelée. Les parties visibles aujourd'hui datent principalement de la fin du XIIe siècle, à l'exception des deux travées occidentales de la nef et de la façade, reconstruites dans un gothique flamboyant après les guerres de Religion. L'abbatiale associe des éléments romans saintongeais dans le transept, la chapelle et le chœur, et des voûtes d'ogives caractéristiques du gothique dit « Plantagenêt » dans les travées orientales de la nef, offrant un bel exemple de l'évolution de l'art gothique. Les vestiges du cloître, de la salle capitulaire et du réfectoire datent du XIIIe siècle ; le plan développé par l'abbé Junius articule trois zones distinctes : le grand cloître des chanoines, l'espace des convers et l'infirmerie. Les bâtiments furent réorganisés autour d'une cour fermée dotée d'un portail monumental, en grande partie aménagée au milieu du XVIIIe siècle grâce à l'abbé Louis de Bompar, tandis que des interventions anciennes furent reprises pour harmoniser les façades. Le logis abbatial, élevé entre les XVe et XVIe siècles au sud de l'enclos, reprend des formes de type château avec tours carrées et toits pentus, et fit l'objet de reprises au XVIIe siècle ; des murs de clôture et une fontaine monumentale du XVIIe siècle subsistent encore. Parmi les dépendances, le manoir dit de la Tour‑Saint‑Jean conserve une tour ronde au toit en forme de cloche et un souterrain creusé dans le roc composé de deux salles dont l'une a pu servir de chapelle ou d'oratoire. Le site appartient aujourd'hui à deux propriétaires : le logis, la cour d'honneur, les bâtiments monastiques et le parc appartiennent aux établissements Ciments Lafarge, tandis que le cloître et l'abbatiale sont la propriété du Conseil général de la Charente. Classée monument historique au début du XXe siècle, la protection a été étendue à l'ensemble des bâtiments en 1999.