Période
XIe siècle, XIIe siècle, XIIIe siècle, XVe siècle, 4e quart XVIIe siècle, 1er quart XVIIIe siècle, 1er quart XXe siècle
Patrimoine classé
Chapelle Saint-Jean-de-Moustiers (précédemment dénommée Eglise basse de Saint-Césaire) : classement par liste de 1840 - Ancienne église Saint-Blaise : classement par arrêté du 16 novembre 1908 - Porterie du Grand Couvent, rue du Grand-Couvent : tour, passage au-dessus de la rue, logis de l'abbesse, portail d'entrée, maison 1906 et les éléments anciens qu'elle renferme (cad. AE 349, 350, 501 à 504) : classement par arrêté du 21 juillet 1989
Origine et histoire de l'Abbaye Saint-Césaire
L'ancienne abbaye Saint-Césaire, située à Arles dans les Bouches‑du‑Rhône, occupait l'angle sud‑est du rempart de la cité et a conservé le nom de Saint‑Césaire jusqu'à la Révolution. Fondé le 26 août 512 par l'archevêque Césaire, le monastère, d'abord appelé monastère Saint‑Jean, eut pour première abbesse sa sœur Césarie. Une première implantation hors des murs, vers 506‑507, fut détruite lors du siège et de la prise d'Arles en 507‑508. Vers 567, une épouse du roi Gontran y fut enfermée, et la présence de la reine Radegonde vers 568‑569 favorisa la diffusion de la Règle de Césaire et le rayonnement du monastère. La Vita de Rusticule, quatrième abbesse, signale l'existence dans le couvent de plusieurs églises, dont une dédiée à la Sainte‑Croix puis à l'archange saint Michel, une autre plus vaste pour accueillir des reliques de la Sainte‑Croix, et une basilique Saint‑Pierre attestée au Xe siècle. Les textes mentionnent aussi la vénération de saints tels que Gabriel, Raphaël, Thomas, Maurice, Sébastien et Pons. Le 12 août 632, l'archevêque Théodose assista aux funérailles de l'abbesse Rusticule, considérée par la suite comme sainte. Le monastère semble avoir connu une interruption d'activité entre les VIIe et IXe siècles, puis retrouver progressivement son statut lorsque l'archevêque Rotlang obtint de l'empereur Louis II l'autorité sur l'établissement à la fin des années 860, date complétée par l'historien Jean‑Pierre Poly en 869. En 883, l'archevêque Rostang fit restaurer la tombe de saint Césaire après le pillage de la ville par les Sarrasins, et son testament de 887 donna un nouvel élan à l'abbaye. À cette époque, l'abbaye possédait trois ensembles domaniaux : des terres proches d'Arles (Trébon, Gallignan), des domaines en Camargue (dont Gimeaux, Malmissane, Notre‑Dame‑de‑la‑Mer, Ulmet, Agon et Saint‑Césaire de Bozaringue) et des propriétés dans le Vaucluse et le Tricastin (Nyons, Vinsobres, Visan et Saint‑Paul‑Trois‑Châteaux). Du Xe au XIIIe siècle, Saint‑Jean/Saint‑Césaire se consolida comme important propriétaire foncier, enrichi par les donations, des achats et des restitutions, telles que la villa de Niomes citée en 972 et la restitution des Albergues sur la villa d'Agon après 1060. L'abbaye possédait également l'un des trois cimetières des Alyscamps, comme l'atteste une sentence arbitrale de 1121. En 972, l'abbaye retrouva son autonomie sous l'abbesse Ermengarde, nommée par l'archevêque Ithier, et reçut ensuite des restitutions importantes, tandis qu'en 1194 le pape Célestin III la plaça sous sa protection directe. Du XIVe au XVe siècle, l'abbaye évolua vers une gestion agricole de ses domaines camarguais, passant de l'exploitation directe au métayage ou au fermage en raison de l'insécurité et de l'augmentation des coûts de main‑d'œuvre. La crise démographique liée aux épidémies de peste réduisit fortement la population d'Arles et le nombre des moniales, qui chuta de 108 en 1343 à 22 en 1428, entraînant tensions internes et conflits avec l'archevêque et une désorganisation de la discipline conventuelle. Aux XVIe et XVIIe siècles, l'abbaye dut faire face à des problèmes d'indiscipline et de sécurité : en 1559 l'abbesse Marguerite de Clermont obtint la fermeture d'un passage entre le monastère et le rempart pour empêcher des intrusions, et en 1628 l'archevêque du Laurens préconisa la création d'une prison pour religieuses rebelles. Dans les années 1630, l'archevêque Jean Jaubert de Barrault introduisit la réforme bénédictine de la congrégation de Saint‑Maur au monastère. Le couvent fut fermé pendant la Révolution puis vendu comme bien national en 1792 et largement détruit. En 1877 la congrégation des Sœurs de Notre‑Dame‑des‑Sept‑Douleurs s'installa sur le site pour y créer un hospice pour personnes âgées ; les travaux de réaménagement confiés à l'architecte Auguste Véran aboutirent à l'inauguration de l'hospice Saint‑Césaire le 16 octobre 1898. Les bâtiments furent définitivement abandonnés en 1995. Sur le plan architectural, le site conserve la chapelle Saint‑Jean‑du‑Moustiers (XIe‑XIIe siècles), l'ancienne église Saint‑Blaise (XIe et XIIIe siècles) avec sa façade nord et une fenêtre à meneau côté ouest, ainsi que la porterie du Grand Couvent dont les phases datent du XVe siècle, du quatrième quart du XVIIe siècle, du premier quart du XVIIIe siècle et du premier quart du XXe siècle ; des vestiges voûtés subsistent dans l'enclos Saint‑Césaire. La propriété de la chapelle Saint‑Jean‑de‑Moustiers, anciennement détenue par l'État (ministère de la Culture), a été transférée à la commune par convention du 9 juin 2008. La succession des abbesses est documentée de Césarie en 512 jusqu'à Marguerite de Moreton de Chabrillan à la veille de la fermeture révolutionnaire, illustrant la longue continuité institutionnelle de la maison.