Patrimoine classé
L'église abbatiale Saint-Philibert : classement par liste de 1840 - La tuilerie du Moutier : inscription par arrêté du 12 avril 1927 - La tour du Trésorier ou de l'Aumonerie : inscription par arrêté du 12 avril 1927 - Les bâtiments claustraux (sauf les parties classées par l'arrêté du 28 mai 1951) : la maitrise : inscription par arrêté du 12 avril 1927 - Les restes de l'ancienne enceinte comprenant la tour de Quincampoix ou du Colombier et la partie de courtine attenante à l'Est (cad. 70) : classement par décret du 29 avril 1928 - Les restes de l'ancienne enceinte comprenant la partie de courtine attenante à l'Ouest à la tour de Quincampoix ; la tour Nord de l'entrée ; la tour Sud de l'entrée ; la tour dite du Portier sise à l'angle des rues des Droits-de-l'Homme et Fénelon (cad. 66) : classement par arrêté du 23 octobre 1928 - Le logis abbatial, salle capitulaire, réfectoire des Moines et deux caves anciennes dites Les Grandes Caves : classement par arrêté du 28 mai 1951 ; Les parties suivantes de l'ancienne abbaye Saint-Philibert, telles que délimitées sur le plan annexé à l'arrêté : en totalité les bâtiments, sols et sous-sols situés 6, 8 et 10 place de l'Abbaye, 5, 5bis et 7 rue des Tonneliers, 1, 3, 5 et 7 place des Arts, 1 et 5 via Marguerite Thibert, 13 et 15 Cour du Cloître, et les sols et sous-sols en totalité de la Cour du Cloître y compris le puits, de la Via Marguerite Thibert, de la Place de l'Abbaye, de la Place des Arts, de la rue Gabriel Jeanton et de la rue des Tonneliers, sur les parcelles n° 100, 101, 102, 103, 104, 105, 106, 107, 110, 111, 112, 113 (à l'exception des parties classées), 114, 115, 116 (à l'exception des parties classées), 216 et 217 de la section AM du cadastre, et sur les parties non cadastrées : inscription par arrêté du 11 avril 2023
Personnages clés
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| Saint Philibert |
Saint dont les reliques furent apportées en 875, donnant une nouvelle impulsion à l'abbaye. |
| Valérien |
Martyr dont le tombeau devint un lieu de culte primitif. |
| Goudji |
Artiste ayant réalisé un nouvel autel en 1999. |
| Victor Questel |
Architecte responsable des travaux de restauration au XIXe siècle. |
Origine et histoire de l'Abbaye Saint-Philibert
L'ancienne abbaye Saint-Philibert de Tournus, située à Tournus en Saône‑et‑Loire en Bourgogne‑Franche‑Comté, est un ancien monastère bénédictin dont l'église abbatiale figure parmi les plus importants monuments romans de France. De nombreux éléments conventuels sont conservés, notamment le réfectoire, le cellier, le cloître, la salle capitulaire et le logis abbatial. L'ensemble bénéficie de multiples protections au titre des monuments historiques et une association a été créée en 2014 pour demander l'inscription du site au patrimoine mondial de l'UNESCO.
Le site présente une longue histoire : un camp romain y a été implanté et le tombeau du martyr Valérien devint un lieu de culte primitif, puis un oratoire fut édifié sur sa tombe. Au haut Moyen Âge la présence d'un sanctuaire est attestée et, en 875, la communauté bénédictine venue de Noirmoutier y apporta les reliques de saint Philibert, donnant à l'abbaye une nouvelle impulsion spirituelle et matérielle.
Les bâtiments actuels datent majoritairement des XIe et XIIe siècles, après un incendie en 1006 qui entraîna d'importants travaux ; d'autres campagnes et transformations se poursuivent du XIIIe au XVe siècle, avec notamment la reconstruction de la salle capitulaire au XIIIe siècle et l'édification de chapelles et d'un palais abbatial aux XVe–XVIe siècles. L'abbaye fut saccagée par les Huguenots en 1562 et, au XVIIe siècle, elle connut une sécularisation qui transforma la communauté monastique en collégiale. Pendant la Révolution l'église devint propriété communale et fut successivement transformée en temple de la Raison puis rendue au culte en 1802.
Les travaux de restauration se sont succédé aux XIXe et XXe siècles, avec des interventions notables de l'architecte Questel au milieu du XIXe siècle et des campagnes de décapage intérieur menées entre 1908 et 1915. Le Centre international d'études romanes a été créé au XXe siècle pour défendre et étudier le site, et la consécration d'un nouvel autel réalisé par l'artiste Goudji a eu lieu en 1999 ; le millénaire de la consécration du chœur a été célébré en 2019.
L'abbatiale présente un plan complexe : une crypte, un rez‑de‑chaussée comprenant un chœur à déambulatoire avec chapelles rayonnantes, un transept à chapelles orientées, une nef à trois vaisseaux et une avant‑nef (narthex) à étage qui se superpose aux vaisseaux du rez‑de‑chaussée. Deux tours datent du XIIe siècle tandis qu'une troisième est plus ancienne ; l'ensemble des toitures utilise essentiellement la tuile creuse.
La crypte, peu enterrée en raison de la pente vers la Saône, est organisée pour la circulation liturgique et comprend une salle centrale à trois nefs voûtées, portée par deux files de cinq colonnes et entourée d'un déambulatoire desservant sept chapelles ; on y trouve un sarcophage attribué à Valérien. Certains éléments de la crypte sont des réemplois antiques tandis que d'autres sont médiévaux, et son plan reprend celui de la crypte de Noirmoutier.
Au niveau du chœur, le déambulatoire supérieur est surmonté d'un étage sculpté du début du XIIe siècle et comporte des chapiteaux d'influence corinthisante ; la mosaïque de pavement du haut déambulatoire, attribuée à la fin du XIIe siècle et représentant zodiac et mois, a été redécouverte en 2000 et n'est conservée aujourd'hui que pour quatre médaillons. La chapelle axiale, devenue chapelle Saint‑Philibert, renferme une châsse moderne de l'artiste Goudji ; des reliques ont été profanées en 1998 et certains os volés n'ont pas été retrouvés.
La croisée du transept est coiffée d'une tour‑lanterne et affiche un décor roman riche, particulièrement visible dans les étages supérieurs de la tour de croisée, réalisés au cours du XIIe siècle ; les façades et la structure traduisent des influences contemporaines de grands chantiers romans. Les deux bras du transept présentent des dispositions et un décor très différents et abritent notamment des chapelles d'abbés et des inscriptions commémoratives.
La nef se distingue par un système de voûtement singulier : de grandes arcades diaphragmes portent des berceaux transversaux qui se contrebutent mutuellement, formant un ensemble de voûtement exceptionnel par sa précision et sa stabilité. Cette vaste salle à trois vaisseaux, lumineuse et largement ouverte, conserve des dalles funéraires et des chapelles gothiques adossées au mur nord, ornées de vitraux contemporains. Le grand orgue, daté du XVIIe siècle et restauré à la fin du XXe siècle, est un instrument remarquable qui fait l'objet d'un festival annuel.
L'avant‑nef ou narthex, complexe et moins large que la nef, se développe sur deux niveaux et reprend en réduction certains principes de la basilique de Maxence ; l'étage abrite la chapelle Saint‑Michel et les tours occidentales, dont l'une porte un clocher caractéristique.
Le cloître conserve surtout la galerie nord d'époque romane et dessert aujourd'hui des collections lapidaires, la bibliothèque municipale et des salles d'exposition ; la salle capitulaire gothique, reconstruite au XIIIe siècle, prolonge le transept sud. Les bâtiments conventuels comprennent un réfectoire du début du XIIe siècle, d'importantes caves médiévales et des dépendances qui illustraient jadis un réseau de prieurés et d'églises relevant de l'abbaye.
Tournus et son abbaye constituent ainsi un ensemble patrimonial majeur, riche d'ouvrages manuscrits préservés, d'un bâti monumental très lisible et d'un long travail de conservation et d'étude mené par des institutions et des chercheurs.