Origine et histoire de l'Abbaye Saint-Pierre
L'église Saint-Pierre, aujourd'hui église paroissiale, est l'ancienne église abbatiale de l'abbaye Saint-Pierre de Vigeois en Corrèze. Son origine remonterait à la naissance du christianisme : un premier édifice fut ravagé par les invasions barbares et ses ruines servirent de retraite à un ermite nommé Sébastien. Vers le VIIIe siècle, un incendie détruisit l'édifice, qui fut ensuite rebâti par Pierre de Mirabec. Vers l'an 1050, Archambault de Comborn s'empara de l'abbaye et de l'église et les incendia, puis les fit rebâtir par remords. L'église subit de nouvelles mutilations durant la guerre de Cent Ans et les guerres de Religion ; l'abbaye elle-même n'existe plus aujourd'hui. La nef a été rebâtie entre 1866 et 1868.
L'abbaye Saint-Pierre de Vigeois aurait été fondée à Vigeois par Arède d'Atane, dit saint Yrieix, et est citée dans son testament de 572 ; elle existait donc dès le VIe siècle. Comme beaucoup d'établissements religieux, elle fut dévastée lors des incursions vikings au IXe siècle, puis relevée. De statut bénédictin, l'abbaye dépendit de l'abbaye de Solignac au début du XIe siècle, puis de l'abbaye Saint-Martial de Limoges de 1082 à 1230. En 1082, Géraud de Lestrade, envoyé par Saint-Martial, fut nommé abbé, et le chroniqueur Geoffroy du Breuil, chanoine de Saint-Martial, fut prieur de Saint-Pierre. En 1635, à la suite des décisions du concile de Trente, l'abbaye s'unit à la Congrégation des Exempts de la Province de Guyenne, puis un arrêté royal de 1745 l'unit au séminaire des Ordinants de Limoges. L'abbaye fut supprimée par décret de l'Assemblée constituante du 13 février 1790 et ses moines dispersés.
L'édifice connut plusieurs destructions : un incendie vers 1070, des saccages pendant la guerre de Cent Ans, une reconstruction ordonnée par l'évêque de Limoges en 1489, l'incendie de la nef par les protestants en 1590 et un nouvel incendie en 1705. L'église abbatiale, l'un des plus beaux exemples d'architecture romane du Bas-Limousin, a été classée monument historique le 12 juillet 1886. Construite aux XIe et XIIe siècles, elle présente un chœur achevé avec transept et chapelles rayonnantes en 1124 ; la nef actuelle est d'époque moderne. Les sculptures des chapiteaux et des modillons sont remarquables : la corniche qui supporte le toit de l'abside et des chapelles repose sur des modillons sculptés de personnages. L'accès aux combles se fait par deux tourelles flanquant l'abside qui contiennent les escaliers, et le clocher, situé au-dessus du bras nord du transept, s'ouvre par une porte polylobée ornée des statues de saint Pierre et saint Paul. En 1908 des travaux ont été entrepris pour restaurer le chœur et reprendre l'absidiole du croisillon nord. Parmi les tableaux conservés figurent Le Salut au calvaire de Georges Jean‑Marie Haquette (1884) et La Vie ascétique de Claudius Jacquand (1840).
Les bâtiments monastiques furent en grande partie démolis après la Révolution pour servir de carrière de pierres et pour ouvrir la cour intérieure ; quelques constructions subsistent à l'est et au sud de l'abbatiale, transformées en habitations. Parmi elles, l'ancienne maison de l'abbé, qui s'avance sur la place en face du parvis est, est la maison natale de Marie‑Rose Bouchemousse (1889‑1966). Marie‑Rose Bouchemousse fit des études à l'École normale supérieure de Sèvres, obtint l'agrégation de lettres et un doctorat de philosophie, fut la première femme docteur en philosophie scolastique, puis secrétaire général de la Fédération Nationale Catholique et de la revue France Catholique sous la direction du général de Castelnau de 1924 à 1943, publiant sous le pseudonyme Jean Mora. Le 2 novembre 1943 elle accepta la charge de maire de Vigeois à la place du maire démissionnaire et se fit ainsi connaître comme la première femme maire d'une commune en France. Le 11 juin 1944, lors de l'investissement du bourg par des troupes allemandes, elle négocia avec les officiers, accompagnée de son premier adjoint M. Basty et du curé doyen Xavier Bourges, en faisant appel à un interprète ; les troupes quittaient la localité sans grands dégâts, et Marie‑Rose Bouchemousse souffrit ensuite d'un abcès purulent de la gorge.
L'abbaye Saint-Pierre a laissé un patrimoine architectural et historique important, et l'église abbatiale continue de servir la paroisse.
