Origine et histoire de l'allée couverte
L'allée couverte dite « cimetière des Anglais » se situe dans le bois des Loctaines, sur la commune de Vauréal (Val-d'Oise). Elle a été édifiée à partir de 3300 av. J.-C. et utilisée pendant environ mille ans. Connu localement depuis longtemps et partiellement pillé, le monument porte ce nom depuis le XIVe siècle en raison de l'occupation anglaise durant la guerre de Cent Ans, bien qu'il n'ait jamais accueilli de cimetière anglais et que les corps retrouvés soient néolithiques. Le site a fait l'objet de fouilles menées par le vicomte Amédée de Caix de Saint-Aymour en 1867. Il figure dans les armoiries de Vauréal conçues en 1943, a été classé monument historique le 16 avril 1969 et restauré en 1972.
L'allée couverte occupe le sommet d'un coteau, à 85 mètres d'altitude, dominant une boucle de l'Oise ; elle est orientée est-ouest, l'entrée étant tournée vers la vallée. Sa longueur totale est inconnue car de la construction d'origine il ne subsiste plus que la chambre. La chambre, d'environ 2,40 mètres de largeur, est délimitée par de grandes orthostates en grès bartonien, la face nord atteignant 13,10 mètres et la face sud 12,40 mètres, et comprend trois orthostates de plus de trois mètres et deux de plus de deux mètres. Les dalles des parois reposent sur une assise de plaquettes en calcaire et sont soutenues à certains endroits par des murs en pierres sèches destinés à stabiliser le sol sableux ; les interstices entre dalles ont été comblés de pierres sèches soigneusement agencées. Le chevet est constitué d'une dalle massive de trois mètres de largeur, haute d'environ deux mètres hors sol et épaisse d'environ 0,50 mètre. La plupart des orthostates sont en grès feuilleté local, mais deux proviennent du massif de l'Hautil et ont été choisies pour leur aspect décoratif ; certaines dalles pèsent estimativement jusqu'à cinq tonnes. La chambre est divisée en trois parties par deux murets transversaux en pierres sèches, bas d'environ 0,50 mètre et à fleur de sol, destinés à freiner l'érosion ; le sol était intégralement pavé de dalles dont deux ont été retrouvées lors des fouilles de 2018.
Des fragments de la dalle d'entrée, découverts à plusieurs centaines de mètres au nord dans les années 1970, correspondent à une dalle en calcaire à grains fins percée d'une ouverture en bouche de four d'environ 0,60 m sur 0,45 m et munie d'une feuillure, avec un petit trou de 10 par 8 cm estimé comme élément du système d'obturation. L'originale est conservée au musée de Guiry-en-Vexin et une copie en béton la remplace sur place ; la dalle est ornée d'une gravure représentant un bateau. Aucun témoignage ancien ne signale une couverture, mais un plan de Leguay dressé en 1827 montre quatre dalles en travers de la chambre pouvant être des fragments de tables de couverture, et des encoches pour des poutres dans les orthostates suggèrent l'existence d'un toit en bois antérieur à une couverture en pierre ; les dalles de couverture ont probablement été exploitées comme carrière avant les fouilles de 1867. À l'origine l'allée devait être enterrée, le sol sableux environnant ayant été perdu par érosion, de sorte que seule l'entrée était visible depuis la vallée.
Malgré des pillages antérieurs, la couche archéologique décrite par de Caix en 1827 était relativement intacte ; elle mesurait de 0,30 à 0,40 mètre d'épaisseur et contenait ossements, silex, charbons et divers objets. La plupart des ossements humains étaient en connexion, cinq squelettes étaient adossés aux parois, et au XIXe siècle le nombre d'inhumations fut estimé à environ quarante d'après 25 crânes et os longs. Les fouilles de restauration des années 1970 ont livré plus de 2 000 dents correspondant à 43 personnes, et les campagnes de 2018 et 2021 ont permis d'estimer à une centaine le nombre de personnes inhumées retrouvées ; en tenant compte des ossements disparus, le nombre total de défunts inhumés sur la durée d'utilisation du site pourrait atteindre 300 à 400 personnes. Les restes concernent majoritairement des adultes, quelques enfants figurent parmi les inhumations, les plus âgés ayant atteint 60 à 65 ans, la plupart des individus semblant être morts de vieillesse et les traces de mort violente étant rares. Certains os présentent des signes d'arthrose, un cas de tuberculose a été reconnu et un crâne porte une trace de trépanation. Le mobilier funéraire comprend de nombreux objets en silex — haches polies, nucléus, fragments de poignard, pointes de flèches — ainsi que des éléments de parure comme une hache-amulette en fibrolithe, perles et pendentifs ; un squelette féminin portait un collier complet de près de 300 perles en os, corne ou ardoise et une hache-amulette en jadéite. Les objets découverts sont conservés au Musée archéologique départemental du Val-d'Oise à Guiry-en-Vexin, et le matériel archéologique issu des fouilles d'Amédée de Caix de Saint-Aymour est conservé au musée de Senlis.