Origine et histoire
L'ancien asile des aliénés, aujourd'hui Centre Hospitalier Spécialisé de l'Yonne, a été implanté en 1840 sur l'emplacement de l'ancien hôpital général et agrandi en 1860. Conçu par le docteur Jacques-Henri Girard de Cailleux selon les principes d'un hôpital pavillonnaire, l'ensemble se compose de pavillons à deux étages disposés parallèlement et séparés par des cours plantées, avec un bâtiment central abritant l'administration et la chapelle. Les pavillons, reliés par des galeries couvertes soutenues par colonnes ou pilastres d'inspiration néo-classique, étaient organisés selon le programme thérapeutique de Girard de Cailleux, inspiré par la théorie d'Esquirol : des bâtiments isolés pour séparer les malades selon les pathologies ; deux pavillons à l'extrémité est accueillaient autrefois les cellules des agités. La réalisation du projet fut confiée aux architectes Jean Boivin puis M. Piéplu ; les travaux commencés au début des années 1840 s'achevèrent vers 1858 avec le soutien du baron Haussmann, alors préfet de l'Yonne. L'Asile d'Auxerre servit de modèle pour d'autres établissements, notamment pour des constructions réalisées dans les années 1860 en banlieue parisienne.
Sur un terrain clos de murs de 14 hectares, l'axe de symétrie est-ouest met en relation le bâtiment administratif et le parc, tandis que les jardins potagers entre les constructions et la clôture servaient à nourrir les malades ; le site comprend également le clos de la Chaînette, un vignoble ancien. La chapelle Notre-Dame de Lorette, de style néo-classique avec fronton triangulaire et bas-relief, donne sur la route de Paris et possède un accès depuis l'intérieur de l'ancien hôpital ; les sources se contredisent toutefois sur sa datation : elle est parfois datée de 1761, une inscription la fait ériger en 1762 par l'architecte Durand et Courtépée signale une bénédiction en 1764, ainsi que des travaux menés entre 1760 et 1774 par André Verrien Dupuy. L'hôpital général primitif, issu d'une fondation liée à l'évêque Nicolas Colbert et autorisé par lettres-patentes de 1675, fut construit au XVIIe siècle puis réuni à l'hospice civil en 1797 ; la manufacture de coton dite « à l'anglaise » y fut établie en 1759.
Au XIXe siècle l'établissement fut transformé en asile départemental après la loi de 1838 et, après plusieurs aménagements, prit en 1937 le nom d'hôpital psychiatrique de l'Yonne. Pour l'approvisionnement en eau de la cuisine, des bains, de la pharmacie et de la buanderie, une source, la fontaine Sainte-Marguerite, alimente un réservoir via un tunnel de 340 mètres prolongé par une canalisation de 1 110 mètres, travaux achevés en 1846. Pendant la Seconde Guerre mondiale, l'hôpital connut des conditions de vie très difficiles sous l'Occupation ; en 1944 il fut réquisitionné par la Waffen SS et des résistants y furent torturés, fait relaté par le docteur Pierre Scherrer, directeur de 1942 à 1975. Classées ou inscrites aux monuments historiques en avril 2002, les façades et toitures des bâtiments construits entre 1840 et 1860 ainsi que la chapelle et plusieurs constructions annexes — portail, mur de clôture, réservoir, bûcher, morgue, jardin et maison du médecin-directeur — bénéficient d'une protection.
À la fin du XXe siècle l'établissement s'est agrandi par la construction de nouveaux secteurs ; les bâtiments devenus inadaptés ont été en partie démolis et, entre 2003 et 2006, un nouvel établissement a été construit à l'arrière de l'ancien site tandis que les pavillons du XIXe siècle ont été transformés en logements formant la résidence dite « Le Clos des vignes ».