Origine et histoire
Le camp de la Transportation, ou bagne de Saint-Laurent-du-Maroni, était le principal dépôt pénitentiaire de la Guyane française, organisé dès 1840 après des premières déportations à Cayenne puis à Saint-Laurent-du-Maroni. La ville de Saint-Laurent-du-Maroni, fondée en 1858, comportait trois secteurs distincts : le quartier officiel, la ville coloniale et le quartier du camp. Les mesures de déportation trouvent leur origine dans la loi du 26 août 1792 et les textes qui ont suivi, et des convois avaient déjà été envoyés en Guyane à la fin du XVIIIe siècle, avant l'interruption imposée par le blocus britannique et les épidémies. Au milieu du XIXe siècle, la politique pénitentiaire fut relancée : Louis Napoléon préconisa l'utilisation des travaux forcés au service de la colonisation et, en 1852, un premier convoi partit vers les îles du Salut. Le camp de Saint-Laurent fut inauguré le 21 février 1858 sur le fleuve Maroni ; il comprenait plus d'une dizaine de bâtiments — rangées de cases-cellules autour d'une cour, hôpital, cuisines, bâtiments du personnel, lavoir et bibliothèque — et servait de point d'entrée pour tous les condamnés arrivant de France métropolitaine avant leur répartition vers d'autres camps. La commune pénitentiaire de Saint-Laurent fut créée en 1880, ses habitants étant majoritairement des gardiens ou d'anciens bagnards, et un hôpital y fut construit en 1912. Le camp connut plusieurs étapes de fermeture : il fut abandonné en 1936, la fermeture du bagne fut engagée par un décret-loi de 1938 et l'établissement cessa officiellement son activité en 1946, tandis que les derniers relégués partirent en 1952. Le site a été classé monument historique par arrêté du 14 février 1995 et une partie a été restaurée pour accueillir un musée.
Fonctionnant surtout comme dépôt temporaire, le camp servait à recevoir, trier et répartir les condamnés : les récidivistes et « chevaux de retour » étaient généralement envoyés aux îles du Salut, considérées comme difficiles d’évasion, tandis que les forçats jugés moins dangereux pouvaient rester et être employés dans l’administration locale. On procédait aussi à des classements par origine : certains camps étaient spécifiquement destinés à des condamnés d’Indochine, et d’autres statuts sociaux ou nationaux influençaient les attributions de tâches. La présence d’un hôpital attirait des condamnés feignant la maladie pour gagner du temps ou préparer une évasion, pratique évoquée par plusieurs récits. Les détenus restés à Saint-Laurent jouissaient généralement de conditions plus favorables : travaux simples, liberté de circulation relative dans l’enceinte et cellules essentiellement destinées au sommeil (environ 2 m sur 1,80 m), excepté pour les bagnards punis qui étaient enfermés au quartier disciplinaire, constitué de cases collectives avec bat-flancs en ciment et « barre de justice ». Le site restauré présente aujourd’hui des vestiges du camp et abrite un musée d’interprétation consacré à ce passé pénitentiaire.