Origine et histoire
L'ancien collège Saint-Raymond, restauré par Eugène Viollet-le-Duc, est un témoin de la vie universitaire toulousaine au Moyen Âge et illustre le gothique méridional en brique avec faux mâchicoulis et ouvertures en chemin de ronde sous le toit. Installé dans l'édifice du XVIe siècle jouxtant la basilique Saint-Sernin, le musée Saint-Raymond, musée d'archéologie de Toulouse, présente des collections de la protohistoire au haut Moyen Âge, principalement celtes, romaines et paléochrétiennes. Le site occupait à l'origine une nécropole chrétienne du IVe siècle autour de la tombe de Saturnin, à proximité de la basilique. Vers 1075-1080, Raymond Gayrard fonde à cet emplacement un hôpital pour pauvres et pèlerins sur la via Tolosane, financé par les comtes de Toulouse, et il est inhumé dans la chapelle attenante qui prend le nom de Saint-Raymond en 1122. Au XIIIe siècle, le lieu devient collège universitaire pour étudiants pauvres à l'occasion de la création de l'Université et conserve cette fonction jusqu'à la Révolution. Après un incendie à la fin du XIIIe siècle, Martin de Saint-André fait rebâtir l'ensemble ; le bâtiment actuel, daté de 1523, est l'œuvre du maçon Louis Privat, financé en partie par Martin et Pierre de Saint-André. Le rez-de-chaussée abritait le tinel avec sa grande cheminée, salle de réception et réfectoire, tandis que l'étage regroupait les chambres des étudiants. Abandonné à la Révolution, le collège est acheté par la ville en 1836 et utilisé pour diverses fonctions, écuries et caserne comprises. Lors du réaménagement de la place Saint-Sernin en 1852-1853, seul l'édifice qui abrite le musée échappe à la démolition grâce à l'intervention d'Alexandre Du Mège, Prosper Mérimée et Eugène Viollet-le-Duc. Viollet-le-Duc restaure le bâtiment entre 1868 et 1871 : il supprime les traces de la chapelle démolie, élève une quatrième tourelle d'angle, ajoute des murs de refend et de nombreuses cheminées crénelées, et construit une maison néogothique dans l'ancienne cour transformée en jardin ; l'édifice sert ensuite de presbytère à Saint-Sernin jusqu'en 1890, date à laquelle la ville choisit d'y installer un musée. Avec les collèges de Foix et de Périgord, il figure parmi les rares témoignages subsistants de l'architecture universitaire toulousaine de la fin du Moyen Âge.
Par arrêté municipal du 14 avril 1891, le bâtiment devient « musée d'art décoratif ancien et exotique » et il est inauguré le 24 avril 1892 par le maire Camille Ournac en présence de Jean Jaurès ; il est alors destiné aux « petites Antiquités » pour décharger le musée des Augustins. L'architecte Arthur Romestin adapte les espaces en supprimant cloisons et escaliers et en perçant de nombreuses fenêtres pour améliorer l'éclairage. Le musée est profondément réorganisé par Émile Cartailhac dès 1912 ; dans les années 1920, trois grandes fenêtres supplémentaires sont percées, modification qui entraîne un déclassement par la commission des Monuments historiques en 1925. Nommé « musée de Cluny de Toulouse » par Henri Ramet en 1935, le site voit la création de la Société des Amis en 1939 et fait l'objet d'un réaménagement par Robert Mesuret entre 1946 et 1950 ; en 1949 il devient le musée archéologique de Toulouse et reçoit les collections de l'Antiquité et du haut Moyen Âge. Classé monument historique par arrêté du 11 août 1975, le musée fait l'objet d'un projet de réhabilitation sous la direction d'Yves Boiret à la fin des années 1970 et de travaux de toiture en 1981-1982 qui restituent l'aspect d'avant la restauration de Viollet-le-Duc et permettent l'aménagement d'un deuxième niveau sous comble. La ville acquiert en 1980 l'immeuble voisin du 11 rue des Trois-Renards pour y reloger bureaux et services, et des réserves sont construites dans le quartier de Bourrassol entre 1992 et 1994. Une nouvelle étude de réaménagement est conduite en 1992 par Bernard Voinchet et, après décision municipale en 1994, des fouilles menées entre 1994 et 1996 mettent au jour la nécropole de Saint-Sernin et un four à chaux du Ve ou VIe siècle visible in situ. Le musée rouvre le 8 mai 1999, après plus de quatre années de rénovation, le bâtiment retrouvant son aspect de 1523 et une partie de la nécropole paléochrétienne ayant été mise au jour.
Le musée a été dirigé successivement par Ernest Roschach, Casimir Destrem, Henri Rachou, Émile Cartailhac, Jules Fourcade, Eugène-Humbert Guitard, Robert Mesuret, Jacqueline Labrousse, Daniel Cazes, Évelyne Ugaglia et, depuis 2018, Laure Barthet. Les principales opérations de transfert et de répartition des collections ont concerné la séparation en 1892 des œuvres monumentales et des petits objets entre les musées des Augustins et Saint-Raymond, le transfert de la collection ethnographique au Muséum de Toulouse en 1931, le transfert des collections lapidaires antiques du musée des Augustins en 1950, l'envoi en 1961 au musée Paul-Dupuy des collections postérieures à la période mérovingienne, et, en 2023, le retour au musée Saint-Raymond de la momie In Imen et de la collection égyptienne du musée Labit.
Les collections trouvent leur origine dans des fonds saisis à la Révolution et formant le Museum provisoire de la République, ainsi que dans les sculptures et objets issus des fouilles de la villa de Chiragan menées sous la direction d'Alexandre Du Mège entre 1826 et 1830 ; Du Mège devient conservateur à partir de 1832. La Société archéologique du Midi de la France, fondée en 1831, et divers collectionneurs et donateurs — Antoine Bibent, le comte de Clarac, Edward Barry et l'État pour une partie de la collection Campana — ont considérablement enrichi le fonds. À partir de 1961, sous la direction de Robert Mesuret, le musée se spécialise en archéologie et les fouilles du service régional contribuent fortement à l'accroissement des collections depuis les années 1980-1990.
Les collections protohistoriques comprennent bracelets, fibules et haches de l'âge du bronze, ainsi que torques en or de Fenouillet et de Lasgraïsses attribués à l'époque des Volques Tectosages, les autres pièces de l'âge du fer provenant des sites du Cluzel, d'Estarac et de Vieille-Toulouse. Les ensembles grec et étrusque sont dominés par des céramiques, sculptures en terre cuite et monnaies datées du VIe au IIe siècle av. J.-C., acquis en partie au XIXe siècle, parfois sans contexte archéologique précis, et complétés par des achats et dépôts successifs dont ceux d'Antoine Bibent, du comte de Clarac, d'Edward Barry et le dépôt Campana. La collection romaine rassemble lampes à huile décorées, céramiques sigillées de Montans et La Graufesenque, clefs et figurines en bronze, mosaïques provenant de Sigognac, Granéjouls, Saint-Rustice et Saint-Pierre-des-Cuisines, inscriptions lapidaires, autels votifs et une importante série de bustes, en grande partie issus de la villa de Chiragan et de découvertes à Béziers, qui place le musée au second rang après le Louvre pour ce type de corpus. Le médaillier compte un peu plus de 11 000 monnaies gauloises, grecques, romaines, byzantines et haut-médiévales, dont le noyau provient du dépôt en 1847 du cabinet de Charles-Clément Martin de Saint-Amand, et il a été enrichi par des acquisitions et des trésors locaux, notamment en 1976. Les collections paléochrétiennes et haut-médiévales comprennent sculptures, inscriptions, lampes, vases liturgiques, céramiques, bijoux, fibules et plaques-boucles wisigothiques, ainsi qu'un ensemble de sarcophages paléochrétiens parmi lesquels figure le Tombeau de Saint-Clair destiné à un enfant.
La muséographie a évolué : en 1892 les collections étaient réparties en six salles thématiques, une salle d'exposition temporaire est inaugurée en 1923, et la présentation est modernisée en 1950 sous Robert Mesuret. Depuis la rénovation des années 1990, le musée est presque exclusivement consacré à Toulouse romaine et paléochrétienne ; ses espaces d'exposition se déploient sur quatre niveaux, le second étage traitant de Tolosa et sa région durant l'Antiquité, le premier étage présentant les sculptures de la villa de Chiragan, le rez-de-chaussée accueillant les expositions temporaires dans l'ancien tinel et le sous-sol exposant la nécropole paléochrétienne avec sarcophages, inscriptions funéraires et le four à chaux. Outre la conservation et la valorisation de ses collections, le musée gère plusieurs sites archéologiques et un monument historique, parmi lesquels l'amphithéâtre romain de Purpan-Ancely et la piscine des thermes d'Ancely, l'église Saint-Pierre-des-Cuisines et la basilique Saint-Sernin.