Origine et histoire du Théâtre
Le bâtiment occupe l’emplacement d’un théâtre privé du XVIIIe siècle où Jean-Philippe Rameau fut chef d’orchestre et directeur. À la fin du XIXe siècle, sur ce même site, Louis Mors fait édifier en 1894 un hôtel particulier et un salon de musique, destiné à succéder au théâtre de la Pouplinière. La salle, œuvre d’Alban Chambon, est réalisée en chêne sculpté dans un style néo‑Renaissance flamande et présente un décor homogène de motifs floraux et ornementaux, de cartouches et de macarons. Elle est organisée sur deux niveaux, orchestre et balcon, et couronnée d’un plafond à caissons peints. Le salon est inauguré le 14 mai 1895 par le chef d’orchestre Maton avec l’opéra comique L’Épreuve suisse. Sur le fronton de la porte d’accès figure la devise latine « Mihi amicisque meis », indiquant la vocation des récitals qui s’y déroulent ; Mors y présente également sa collection d’instruments anciens et reçoit des artistes comme Claude Debussy. Camille Chevillard, selon les sources, y aurait dirigé pour la première fois en France L’Or du Rhin de Wagner. Sous l’Ancien Régime ce site avait déjà attiré un cénacle d’artistes et d’intellectuels — Voltaire, Quentin de La Tour, Van Loo, Stamitz, Rameau — et la nouvelle salle poursuit cette tradition musicale à la charnière des XIXe et XXe siècles. L’hôtel particulier est ensuite détruit ; seule la salle de musique subsiste. Au début des années 1930, la salle est transformée en cinéma, opération qui respecte parfaitement son décor intérieur, et est d’abord dirigée par Charles Saint Pouloff et l’acteur Jean Galland. De 1957 au milieu des années 1970, sous la direction du peintre surréaliste Henri Ginet, le Ranelagh rejoint le réseau des cinémas d’art et d’essai et accueille de nombreuses personnalités ; Ginet ouvre en outre une galerie de peinture où se tiennent des expositions internationales d’art contemporain, dont la première exposition personnelle de Christian Boltanski en mai 1968. Les fils d’Henri Ginet reprennent ensuite la direction et présentent des artistes variés, tandis que la direction de 1974 à 1986 est assurée par Claude Condroyer et Micheline Daguinot. En 1979 est donnée la pièce La Cantate à trois voix de Paul Claudel. L’ancienne salle de cinéma est définitivement reconvertie en théâtre en 1985 ; Madona Bouglione en prend la direction l’année suivante et y développe pendant une vingtaine d’années une programmation mêlant théâtre, musique, cinéma et cirque, favorisant notamment l’émergence d’une nouvelle génération de clowns. Une vidéo intitulée L’année de tous les clowns est publiée en 1991. Philippe Avron y interprète, sous la direction artistique de Madona Bouglione, une trilogie jouée du 15 septembre au 2 janvier 2005. La salle et son décor ont été inscrits aux monuments historiques par arrêté du 6 octobre 1977 ; il s’agit de l’un des rares théâtres à la française de Paris encore préservés. Depuis 2005, la direction est assurée par Catherine Develay.