Origine et histoire de l'ancienne abbaye
L'abbaye de Vignogoul, située à Pignan dans l'Hérault en région Occitanie, est une ancienne abbaye cistercienne d'abord appelée Notre-Dame puis Sainte-Marie-Madeleine de Bon-Lieu de Vignogoul. Elle aurait été fondée entre 1104 et 1128 sous l'épiscopat de Gautier de Lille, évêque de Maguelone, et la première mention de la communauté date de 1150 lorsqu'un seigneur de Pignan lui lègue des vignes. À l'origine, la communauté regroupait hommes et femmes, puis devint un prieuré de religieuses bénédictines dépendant de l'évêque de Maguelone, enrichi par des donations formant un important domaine agricole. La transition de la règle bénédictine à la règle cistercienne demeure imprécise ; Jean Segondy propose une tentative d'adoption vers 1162-1165, et une bulle de 1178 du pape Alexandre III supprime la communauté d'hommes en rattachant définitivement les femmes à l'ordre de Cîteaux. Au début du XIIIe siècle, l'accroissement du nombre de religieuses avait réduit les ressources et empêchait la reconstruction du monastère, ce qui motive en 1211 des appels aux aumônes lancés par le légat Raymond III d'Uzès. En 1231, Jacques Ier d'Aragon prend le Vignogoul sous sa protection, et en 1243 le pape Innocent IV limite la communauté à quarante religieuses et charge l'abbé de Valmagne de veiller à l'instruction et aux sacrements. Par bulle de 1245, le prieuré est rattaché à l'abbaye de Valmagne et placé sous sa protection ; il est dédié depuis plusieurs décennies à Notre-Dame. En 1259 le prieuré devient abbaye et sa supérieure prend le titre d'abbesse : Élisabeth d'Alignan (1243-1256) y administre les biens, réalise d'importants travaux d'irrigation, des digues et des moulins, et en 1299 le roi Jacques II de Majorque autorise l'établissement d'une pêcherie. Au XIVe siècle, les incursions des Grandes Compagnies perturbent les revenus du monastère, et au début du XVe la communauté décline sous l'effet des épidémies et de la guerre de Cent Ans. En 1437 l'abbaye est rattachée aux sœurs dominicaines Prouillanes de Montpellier ; un procès aboutit en 1446 à une transaction qui rétablit l'indépendance du Vignogoul tout en entraînant des échanges de biens et de reliques, puis la prospérité revient et des abbesses successives, dont Marguerite de Planat et Marguerite Alamand, font surélever la nef. Les guerres de Religion apportent de nouveaux troubles : vers 1621-1622 l'église paroissiale Saint-Martin est détruite par les protestants et les offices paroissiaux se tiennent dans l'absidiole nord de l'abbatiale. Après le siège de Montpellier, les religieuses reçoivent l'autorisation du roi Louis XIII, des consuls et de l'évêque de venir s'établir en ville ; elles acquièrent une maison où une chapelle est bénie le 30 juin 1683 par l'évêque Charles de Pradel. L'église a fait l'objet d'une restauration en 1912-1913 par l'abbé Prévôt. Architectoniquement, l'abbatiale présente une nef unique de trois travées, initialement destinée à une charpente apparente puis surhaussée et voûtée au XVe siècle par des croisées d'ogives prismatiques retombant sur des culots. Le chœur, construit vers 1250, comprend une travée droite voûtée d'ogives et une abside à sept pans voûtée avec huit ogives et une lierne rayonnante issue d'une clé ornée de feuillages ; l'abside est éclairée par trois fenêtres et la travée droite comporte un triforium dont le mur de fond est percé d'un oculus polylobé, indice d'un projet initial d'extension du triforium dans la nef. Le chœur est flanqué de deux chapelles latérales formant un faux transept, édifiées vers 1290-1300, et deux escaliers à vis desservent les triforiums et les combles. L'édifice mesure environ 32 mètres de long, 8 mètres de large et la nef unique atteint 15 mètres de hauteur. Sur le plan des filiations, l'abbaye dépend de Valmagne à partir de 1245, est rattachée en 1437 aux Pouillanes de Montpellier puis retrouve son indépendance en 1446 ; elle est abandonnée par les religieuses après 1622 lorsqu'elles se retirent à Montpellier et l'abbatiale sert alors d'église paroissiale. Les prieures connues comprennent notamment Ermengarde (1181-1211), Marguerite de Frézol (élue 1211), Béatrix (1219-1239), Égline (1241) et Élisabeth d’Alignan (1243-1256). Parmi les abbesses se succèdent Guillemette Déodate (1259-1278), Gausionde d'Avène (1279-1309), Jausimonde d'Auriac (1313-1320), Huguette de Montdésir (1324-1328), Tiburge (1343-1347), Yolande (1356-1369), Béatrix de Combret (1364-1370), Béatrix Bérengère (1390-1392), Sibille d'Alèse (1407-1413), Marguerite d'Arammonies (1429), Marguerite de Panat (1447), Guisa de Nogaret de Trélans (1460), Marguerite d'Auriac (1465-1473), Marguerite Allemand (1480-1485), Marguerite Alamande (1504-1517), Jeanne Allemand (1527-1548 puis 1557), Françoise Allemand (1548), Jeanne Azémare (1575, démissionnaire en 1586), Jeanne Claret de Saint-Félix (pourvue en 1586), Jeanne de Montenard (coadjutrice en 1609 puis abbesse, décédée en 1622), Claudine de Saint-Bonnet de Thoiras (pourvue du pape en 1643, morte après 1680), Tiphaine Françoise de Saint-Bonnet de Thoiras (coadjutrice à partir de 1664, morte après 1711), Louise-Angélique de Bérard de Vestric de Bernis de Montalet (titulaire en 1713, morte en 1725), Françoise de Bérard de Vestric de Montalet (abbesse en 1724, morte en 1725), Élisabeth-Gabrielle de Bérard de Bernis de Vestric de Montalet (abbesse en 1724, morte en 1737), Marie de Bérard de Montalet (nommée en 1737) et Françoise de Foresta de Colongue (1768). Les armes datées de 1696 sont d'azur à une crosse d'argent accompagnée d'un sarment de vigne de sinople fruité de deux raisins de sable. L'abbaye fait l'objet d'un classement au titre des monuments historiques dès la liste de 1862.