Origine et histoire
Le prieuré de La Chaise-Dieu est un ancien établissement de l'ordre de Fontevraud situé sur la commune de Chaise-Dieu-du-Theil, dans l'Eure en Normandie. Vers 1120-1125, l'ermite Hugues du Désert et ses disciples reçurent des dons de Robert de Meulan, comte de Leicester et de Breteuil, et établirent un ermitage nommé Notre-Dame du Désert. Peu après, Richer II de L'Aigle leur donna des terres dans la forêt de L'Aigle où la communauté construisit un monastère et une église en un lieu appelé Casa Dei, devenu Chaise-Dieu. En 1128, le monastère fut déplacé sur les bords de l'Iton ; l'ancien établissement prit le nom de La Vieille Chaise-Dieu et devint une ferme dépendante du nouveau. L'église de la « nouvelle » Chaise-Dieu, aujourd'hui La Chaise-Dieu-du-Theil, fut consacrée le 2 octobre 1132 par Audin, évêque d'Évreux, et Torsin, archevêque d'York, en présence de Richer II, de Julienne du Perche et de Béatrice. Le monastère accueillit à la fois des moines et des moniales. En 1135, Henri Ier Beauclerc prit la communauté sous sa protection et elle adhéra à l'ordre de Fontevraud, unique abbaye normande rattachée à cet ordre fondé par Robert d'Arbrissel. Le pape Innocent II confirma plusieurs donations : le 28 février 1137 celle de l'église Saint-Vandrille aux moniales, puis le 5 octobre 1138 celle des terres dites « appartenances de la Chaise Dieu » données par Richer. En 1150, Robert de Meulan dota le prieuré de terres en Angleterre à Vinburn et à Eaton, et en 1155 Julienne de L'Aigle devint l'une des premières prieures de La Chaise-Dieu-du-Theil. Le prieuré reçut aussi des dons de l'abbé de Conches en 1145, confirmés entre 1156 et 1159 par Henri II Plantagenêt ; en 1218 Félicie de L'Aigle devint prieure et Richer II et son épouse furent inhumés dans l'église. Des moniales de Chaise-Dieu furent appelées en Angleterre pour fonder un prieuré à Eaton (aujourd'hui Nuneaton) en 1154, à la demande du comte de Leicester et avec l'accord d'Henri II. En 1176, Adeline de Sainte-Suzanne, veuve de Richer III de L'Aigle, prit le voile et fut inhumée dans le chœur de la chapelle des religieuses ; son épitaphe est « Hic iacet Adelina Domina de aquila filia comitis de Sancta Suzanna ». À partir de 1235, la famille de L'Aigle cessa les donations, étant éteinte, et ses biens passèrent par mariage à la maison ducale de Bretagne. En 1460, après la guerre de Cent Ans, le prieuré disposait d'un revenu de 2 000 livres et était occupé par cinq religieuses sans prieure, un prieur et trois religieux. Le prieuré fut le deuxième à être réformé selon la volonté de Marie de Bretagne, abbesse de Fontevraud ; Prégente de Blaye, première prieure à appliquer la réforme en 1476, établit la clôture et fit entreprendre des travaux. Pendant les guerres de Religion du XVIe siècle, les religieuses durent quitter le prieuré sous le priorat d'Anne Mallar. En 1619, après le concile de Trente et sous le priorat de Louise de Belleau de Petiteville, le bréviaire de l'ordre fut remplacé par celui en usage à Rome. Jeanne-Baptiste de Bourbon, abbesse de 1637 à 1670, visita le prieuré en 1663 ; ses armes furent apposées sur le cadran solaire donnant sur la rue et à l'intérieur de la maison de la prieure, où figure la date de 1663. En 1665 la prieure Geneviève de Bernières de Percy finança la translation des restes de saint Juvence depuis Rome. Une tempête en 1722 endommagea des bâtiments ; la prieure Angélique d'Osmont de Launay fit réparer la nef et le sanctuaire de l'église. En 1788 le prieuré ne comptait plus que huit religieuses. En 1790 le prieuré fut déclaré bien national puis vendu pour 38 000 livres à un propriétaire privé, entraînant la dispersion des moniales. Subsistent de l'ancien prieuré l'église Saint-Jean et divers bâtiments conventuels — pavillon d'entrée, grand pavillon et petit pavillon (1559) — ainsi que des restes de l'ancienne église, inscrits au titre des monuments historiques par arrêté du 6 janvier 1971.