Origine et histoire de l'Appartement du docteur Gagnon
Immeuble dit maison du docteur Gagnon
La maison, située 20 Grande Rue à Grenoble, donne sur la Grande-rue, la place Grenette et le Jardin de ville. Construite au XVIe siècle, elle a été agrandie au XVIIe siècle et modifiée au XVIIIe siècle par le père du docteur Gagnon. L’ensemble comprend deux maisons mitoyennes sur deux étages et ses appartements occupent le deuxième étage d’immeubles placés à l’intérieur de l’enceinte romaine. C’est dans cet ensemble bourgeois que le jeune Marie-Henri Beyle, dit Stendhal, vint habiter chez son grand-père, le docteur Henri Gagnon, à partir de 1790 après le décès de sa mère. L’appartement servit au romancier d’« laboratoire d’observation de la bonne société grenobloise » et participa à sa formation intellectuelle. Stendhal a vécu ici durant son enfance et le lieu inspira une part importante de son œuvre.
La ville de Grenoble est propriétaire des lieux et l’appartement fait aujourd’hui partie du Musée Stendhal, qui réunit trois sites et un itinéraire littéraire dans le centre historique. La collection Stendhal de la Bibliothèque municipale, rattachée au musée, comprend environ 700 pièces muséales, quelque 40 000 pages de manuscrits et 10 000 ouvrages imprimés. L’appartement natal de Stendhal, situé à quelques dizaines de mètres au 14 rue Jean-Jacques-Rousseau, a été rénové et inauguré en 2002 et contribue aux activités littéraires et pédagogiques du musée. L’appartement du docteur Gagnon a été acquis par la ville en 1962, transformé en musée et ouvert au public de manière régulière à partir de 1978 ; il prit le nom de Maison Stendhal en 1983.
L’ensemble immobilier est inscrit aux monuments historiques depuis le 12 décembre 2000, labellisé Musée de France en 2003 et distingué Maisons des Illustres en 2011. Un projet de réaménagement piloté par les architectes Cédric Avenier et Pierre-Antoine Rappa avec la scénographe Marianne Klapisch a restitué les volumes originels, restauré des éléments historiques et introduit des dispositifs contemporains pour évoquer l’époque de Stendhal ; l’ensemble a été inauguré lors des Journées européennes du patrimoine de septembre 2012. L’appartement dispose d’une salle d’exposition temporaire et d’outils multimédias permettant de consulter les manuscrits et la collection numérisés.
L’entrée ouvre sur un grand salon à l’italienne, pièce d’apparat où le docteur recevait la société grenobloise ; on y disposait pour Stendhal une table de travail face à une des fenêtres donnant sur la cour, et l’ameublement inclut des lustres, des tableaux et des meubles dus à l’ébéniste Hache, ainsi qu’un portrait du professeur de dessin Louis-Joseph Jay. Un cabinet d’histoire naturelle, décor caractéristique des appartements bourgeois éclairés, présentait autrefois minéraux, oiseaux, coquillages et un crocodile naturalisé, ainsi qu’une carte du Dauphiné de quatre pieds de large ; certains spécimens proviennent aujourd’hui du Muséum d’histoire naturelle de Grenoble. À côté se trouve un cabinet d’été ou de travail, destiné à l’écriture et à la lecture, où figurent un buste de Voltaire et une bibliothèque en partie reconstituée d’après l’inventaire de succession de Romain Gagnon daté de 1830. Une chambre dite « de Romain Gagnon », dédiée aux expositions temporaires, évoque les mœurs plus licencieuses de la ville au XVIIIe siècle et rappelle des références littéraires citées par Stendhal. Enfin, une terrasse avec pergola surplombant le Jardin de Ville, aménagée sur le mur d’enceinte romain de Cularo, illustre les jardins d’agrément du docteur Gagnon, avec caisses de châtaignier, portiques pour la vigne et un observatoire où il montrait les étoiles au jeune Stendhal.
Le musée a également présenté des expositions temporaires récentes, notamment en 2014 sur les dessins des manuscrits stendhaliens de Grenoble et en 2015 sur l’aspect politique de l’œuvre de Stendhal. L’exposition permanente prend en compte la signification des pièces, des tableaux, des bustes et des gravures exposés, ainsi que leurs liens avec les manuscrits et l’œuvre de l’écrivain.