Origine et histoire de l'Aqueduc du Plat de l'Air
L'aqueduc gallo-romain du Gier, dit aussi du Mont-Pilat, est l'un des aqueducs antiques qui alimentaient Lugdunum ; il est le plus long des quatre conduisant l'eau à la ville et ses structures figurent parmi les mieux conservées. Long d'environ 85 km, il puise les eaux dans le bassin du Gier, affluent du Rhône, et a conservé 72 arches remarquables dont il n'existe pas d'autres exemples en Gaule méridionale. Cet ensemble fait l'objet de multiples protections au titre des monuments historiques, avec des classements portant notamment sur le pont-siphon de Beaunant, certaines arches, le réservoir de Soucieu et les piles des Crêtes. La datation de l'aqueduc a fait l'objet de nombreuses hypothèses : la découverte de tuyaux de plomb marqués du nom de Claude, l'inscription dite « pierre de Chagnon » liée à Hadrien et une fontaine portant l'inscription CLAVD AVG ont successivement orienté la datation vers Claude, Hadrien ou l'époque d'Auguste. Des restes de coffrages en bois mis au jour dans les fondations du pont-siphon de Beaunant ont été datés par dendrochronologie de l'an 110, ce qui situe la construction de cet ouvrage sous le règne de Trajan, sans exclure une finition sous Hadrien. Les recherches savantes sur l'aqueduc remontent au XVIe siècle et se sont intensifiées aux XVIIIe et XIXe siècles, avant que la thèse de Germain de Montauzan en 1908 ne pose les bases de l'étude moderne de l'ouvrage. À partir des années 1970 et surtout dans les décennies récentes, prospections et travaux ont précisé le tracé, le nombre de tunnels et la localisation des regards ; en 2001 moins d'une centaine de regards avait été identifiée parmi le millier estimé. Des campagnes de restauration menées en 2009-2010 à Chaponost ont restitué des niveaux de sol, supprimé des végétaux et réparé des maçonneries selon des techniques inspirées des pratiques romaines, et l'aqueduc a été retenu pour le loto du patrimoine en 2018. Le tracé, bien reconstitué d'après les vestiges et la localisation des regards, part des hauteurs de Saint-Chamond dans le massif du Pilat, traverse la Loire et le Rhône en passant par Mornant, Orliénas, Chaponost et Sainte-Foy-lès-Lyon pour aboutir à Lyon. La dénivelée totale est de 105 mètres, la pente moyenne de l'ordre de 1,1 m par kilomètre et le débit estimé à 15 000 m3 par jour ; l'ouvrage comprend quatre siphons destinés au franchissement des vallées. Le captage ne prend pas exactement la forme d'une source mais relève d'une prise d'eau sur le Gier, souvent identifiée au niveau d'un barrage considéré comme premier artefact de l'aqueduc. Sur son parcours l'aqueduc franchit de nombreuses vallées par des ponts-aqueducs et des siphons : sont à citer le pont sur le Janon, les vestiges du Langonand, le réservoir de chasse et le pont-siphon de la Durèze à Genilac, où l'on conserve un réservoir avec sept départs pour tuyaux de plomb sur dix d'origine. Dans le secteur de Chagnon un canal ordinaire de 11,5 km double le siphon de la Durèze et comporte un tunnel accessible appelé « Cave du Curé », tandis que la « pierre de Chagnon » marque la protection de l'ouvrage. Plusieurs communes conservent des témoins importants : à Saint-Martin-la-Plaine le tunnel de Fontanes et des planches de coffrage, à Saint-Joseph la borne de protection dite « pierre du Rieu », à Saint-Maurice-sur-Dargoire les ponts-canal de Jurieux et des Granges, et à Mornant un tunnel de 825 m et un puits de regard de 19 m. À Soucieu-en-Jarrest subsiste le mur de Granchamp et une série d'arches dont l'une, surnommée le « Chameau », conduit au réservoir de chasse du siphon du Garon ; ce réservoir a été classé en 1930. Le pont-siphon du Garon à Brignais et son lot d'arches ont été partiellement conservés, de même que des murs et arches remarquables à Chaponost où l'alignement du Plat de l'Air présente 72 arches sur 92 et de beaux parements en opus reticulatum alternant avec des épaisseurs de briques. Le réservoir de chasse et le rampant du siphon de l'Yzeron, au Plat de l'Air, ainsi que le réservoir de chasse et le début de la descente du pont-siphon de Beaunant à Sainte-Foy-lès-Lyon, livrent des informations précises sur la conduite : le siphon de l'Yzeron devait mesurer 2 600 mètres entre réservoirs, présenter une flèche de 123 mètres et une partie basse en pont-canal de 270 mètres de long sur 17 mètres de haut, la canalisation comportant un faisceau de douze tuyaux de plomb de 27 cm de diamètre. Le franchissement final vers Lyon se fait par le siphon du col de Trion, dont le réservoir de chasse est localisé dans l'enceinte du fort Saint-Irénée ; le réservoir terminal en ville a disparu. L'aqueduc met en œuvre presque toutes les techniques romaines : pente très faible, longues tranchées couvertes d'environ 73 km, conduits enterrés de dimensions importantes, une douzaine de tunnels, de nombreux passages aériens et siphons, et un grand nombre de regards de visite régulièrement espacés ; on estime que le nombre réel de regards pouvait atteindre le millier. Plusieurs sections ont été classées ou inscrites au titre des monuments historiques depuis le XIXe siècle et la protection s'est poursuivie jusqu'à nos jours.
