Origine et histoire de l'Arc de Campanus
L'Arc de Campanus est un monument antique d'Aix-les-Bains (Savoie) probablement édifié à la fin du Ier siècle et rattaché, dans la géographie administrative romaine, à la cité de Vienne en territoire allobroge. Il doit son nom au cognomen du dédicant, Lucius Pompeius Campanus, inscrit sur plusieurs parties du monument. Les inscriptions comptent quatorze cartouches dédiés à des membres de la famille des Pompeii, dont une partie seulement est lisible et dont les liens généalogiques restent incertains. La fonction de l'ouvrage a été discutée : arc funéraire, arc votif ou de triomphe et, plus vraisemblablement, porte monumentale ouvrant vers les thermes. Intégré dès le Moyen Âge à d'autres constructions, l'arc fut partiellement enfoui puis réutilisé comme mur d'écurie ou de grange avant d'être dégagé au XIXe siècle. Vers 1535 Aymar du Rivail déchiffre l'inscription principale et décrit l'arc comme l'entrée de la salle de justice ; au cours des siècles suivants il est signalé comme muré ou enfoui, et l'intervention de l'administration en 1821–1822 permit d'éviter sa destruction. Au milieu du XIXe siècle il se trouvait dans la cour de l'hôtel dit de l'Arc romain ; cet hôtel fut abattu en 1867, les abords de l'arc furent dégagés, et l'État acquit le monument un an plus tard ; il est classé au titre des monuments historiques depuis le 7 août 1890. Les premières occupations romaines d'Aix-les-Bains semblent remonter à la seconde moitié du Ier siècle, avec l'aménagement de sources thermales chaudes, et le site bénéficiait d'un microclimat lié à la proximité du lac du Bourget. L'épigraphie mentionne des vicani, mais la nature exacte de l'agglomération antique reste discutée : la topographie, marquée par un important dénivelé, rend problématique l'interprétation de l'arc comme monument funéraire au cœur d'une ville. Une hypothèse propose plutôt un bourg rural d'activités agropastorales dirigé par des possessores, à proximité duquel se serait développé un sanctuaire de cures fréquenté par l'aristocratie locale ; dans ce modèle, des familles aisées finançaient les thermes et faisaient édifier à leur proximité des monuments commémoratifs, dont l'arc de Campanus et le mausolée-temple de Diane. L'arc se situe aujourd'hui devant les thermes Pellegrini, entre la place des Thermes et la place Maurice-Mollard, à l'angle nord-est de cette dernière. Mesuré au XXIe siècle, le monument atteint 9,15 m de hauteur, 7,10 m de largeur pour seulement 0,75 m d'épaisseur, et sa base est à 265 m d'altitude. Il présente une unique ouverture en plein cintre de 6 × 3,50 m ; le passage dallé sous l'arc conserve des ornières laissées par le passage des véhicules et l'arc est encadré par deux pilastres. Au-dessus de l'ouverture se dispose un entablement et une architrave ; côté occidental une frise de huit niches, très peu profondes et symétriquement disposées, suggère des baies éclairant une galerie supérieure plutôt que des supports pour statuettes ou urnes. Un niveau supérieur associe une corniche et un attique, aujourd'hui détériorés, qui ne permettent pas de confirmer la présence de bustes commémoratifs. L'édifice est bâti en grand appareil de calcaire assemblé à joints vifs sans mortier ; la « pierre de Seyssel », blanche et fine, provient vraisemblablement des carrières de Franclens et de Surjoux et répond à des usages nobles ; la décoration fait appel à l'ordre toscan. Sur la façade occidentale, les inscriptions mentionnent des membres de la famille du dédicant : l'attique comporte des dédicaces à Lucius Pompeius Campanus, fils de Caius, à ses grands-parents paternels — dont Catia Secundina — ainsi qu'à une sœur, Pompeia Maxima, et à un frère, Pompeius Campanus, deux cartouches étant illisibles et pouvant concerner ses parents. L'architrave porte d'autres noms, parmi lesquels Decimus Valerius Gratus, Caius Sentius Agricola (peut‑être un oncle), Pompeia Secundina (une tante paternelle), Caius Pompeius Justus, Voluntilia Censa et Caius Sentius Iustus (probablement grands-parents maternels), ainsi que Titus Cannutius Atticus Perpessus ; une inscription précise que Lucius Pompeius Campanus fit ériger le monument de son vivant. La lecture des cartouches reste fragmentaire et sujette à révision, si bien que la parenté exacte des personnages ne peut être entièrement reconstituée ; le cognomen « Atticus » laisse en outre envisager la présence d'ancêtres hellénophones ou d'affranchis. Selon le modèle retenu pour l'agglomération, la fonction de l'arc varie : dans une perspective « urbaine » secondaire il pourrait matérialiser une porte marquant le passage entre le temple et les thermes, tandis que dans une lecture « rurale » il retrouve une fonction funéraire comparable à certains arcs marquant des limites ou des itinéraires. Les études se sont succédé du XVIIe siècle à nos jours : après des descriptions anciennes, l'étude de François de Mouxy de Loche à la fin du XIXe siècle a été marquante, Annette Küpper‑Böhm a proposé en 1996 la lecture d'une porte monumentale et Philippe Leveau a reconsidéré au début des années 2000 l'ensemble des données à la lumière des fouilles récentes.