Origine et histoire du Banc-reposoir
Le banc-reposoir dit « Banc du Roi de Rome » appartient à une série de sièges publics érigés en Alsace au début du XIXe siècle. Ces bancs-reposoirs répondaient à un usage pratique : lors des marchés et foires, paysans et paysannes, lourdement chargés, pouvaient y déposer leurs fardeaux et se reposer. Les paysannes portaient souvent un panier sur la tête, protégé par un coussinet dit der Wisch, tandis que les paysans transportaient leurs produits dans une hotte portée au dos ; ils pouvaient déposer ces charges sur le linteau et s’asseoir sur la dalle inférieure, généralement à l’ombre de quatre tilleuls. De part et d’autre du siège, deux bornes permettaient aux hommes de poser leurs hottes ou aux cavaliers de se remettre en selle.
L’initiative de ces bancs du Roi de Rome revient au préfet du Bas-Rhin Adrien de Lezay-Marnésia, qui, par une lettre du 22 avril 1811, invita les municipalités à établir des reposoirs en pierre espacés d’une demi-lieue, accompagnés d’un banc et plantés d’arbres, afin de commémorer la naissance du Roi de Rome et d’offrir des lieux d’arrêt aux voyageurs et cultivateurs ; la lettre précise que chacun devra penser : « Nous le devons au Roi de Rome ». Cent vingt-cinq bancs furent construits en 1811, et d’autres suivirent les années suivantes, mais très peu ont survécu.
Une seconde série, dite des bancs de l’Impératrice Eugénie, fut lancée sur l’initiative du préfet Auguste-César West en 1853 pour répondre à un souhait de l’Impératrice et soutenir financièrement les communes après la crise de 1846–1848 ; pour ces bancs de 1854, le département prit en charge l’achat et la taille des pierres et quatre cent quarante-huit monuments en grès des Vosges furent implantés le long des chemins et routes d’Alsace.
Des bancs-reposoirs plus anciens, remontant au XVIIIe siècle, répondent à des besoins locaux tels que l’agrément du promeneur ou le repos des vendangeurs ; certains exemplaires antérieurs subsistent encore. À la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle apparurent d’autres variantes : des bancs-sièges en grès datés des années 1875–1880, des bancs commémoratifs liés à des travaux publics, et des modèles plus simples utilisant le bois.
Pendant l’annexion allemande après 1870, des mesures d’entretien furent prescrites en 1906 après une campagne de presse, mais elles restèrent sans effet ; en 1910, l’administration jugea que la forme ancienne ne répondait plus aux besoins modernes et déclara inutile la dalle supérieure, estimant que le port de fardeaux sur la tête avait disparu et que le banc en pierre était devenu inconfortable, de sorte que les bancs endommagés n’avaient plus à être restaurés. Dans les années 1980, plusieurs bancs-reposoirs d’Alsace furent inscrits à l’inventaire des monuments historiques et bénéficièrent d’une protection.
On distingue plusieurs types de bancs-reposoirs selon leur forme : banc curviligne à une dalle-siège avec dossier ; banc semi-circulaire à une dalle-siège avec montants et petit chapiteau de type classique ; banc à linteau-siège avec montants à chapiteau ; banc à double linteau et montants à chapiteau ; banc à double linteau avec montants à base élargie ; banc à linteau-siège aux extrémités arrondies ; et banc à linteau supérieur associé à une dalle-siège extérieure. Ces variantes témoignent de la diversité des modèles construits en Alsace et de leur adaptation aux usages locaux.