Origine et histoire du Banc-reposoir
Ce banc a été commandité par le préfet. Le banc-reposoir d'Alsace est un type de banc public en pierre, apparu au XIXe siècle. Les jours de marché ou de foire, paysans et paysannes venaient chargés des produits de la ferme; les femmes portaient un panier sur la tête protégé par un coussinet appelé der Wisch, rempli de son et de balle de blé, tandis que les hommes transportaient leurs marchandises dans une hotte portée au dos. Lors des haltes, on déposait les fardeaux sur le linteau et l'on se reposait sur la dalle inférieure, souvent à l'ombre de quatre tilleuls; de part et d'autre se dressaient deux bornes destinées à soutenir les hottes ou à aider les cavaliers à remonter en selle. En Alsace coexistent plusieurs catégories de bancs-reposoirs, parmi lesquelles ceux dits du Roi de Rome (ou Marie-Louise) et ceux de l'Impératrice Eugénie. Les bancs du Roi de Rome ont été érigés à l'initiative du préfet du Bas-Rhin Adrien de Lezay-Marnésia pour commémorer la naissance de l'héritier impérial; dans une lettre aux municipalités le préfet demandait d'établir, à intervalles réguliers, des reposoirs en pierre accompagnés de bancs et d'arbres afin que l'on se souvienne du Roi de Rome. Toutes les dépenses étaient à la charge des communes, qui réalisèrent les Nabele Bänk, bien que quelques-unes aient refusé en raison d'un terrain trop vallonné. Cent vingt-cinq bancs furent construits en 1811 et sans doute davantage les années suivantes, mais très peu ont subsisté. L'initiative des bancs de l'Impératrice Eugénie reprend l'idée précédente : le préfet Auguste-César West concrétisa un vœu de l'impératrice et le département prit en charge l'achat et la taille des pierres afin d'encourager les communes après la crise économique des années 1846-1848. Quatre cent quarante-huit monuments commémoratifs en grès des Vosges furent ainsi implantés le long des chemins et routes d'Alsace en 1854; souvent mutilés par le temps et les hommes, ils demeurent néanmoins visibles dans les campagnes. Des bancs plus anciens, répondant à des besoins locaux comme le repos du vendangeur ou l'agrément des promeneurs, datent du XVIIIe siècle; un exemplaire subsiste à la sortie de Molsheim sur la RD 422 et celui de Ribeauvillé pourrait être antérieur aux bancs du Roi de Rome. Après 1875 apparaissent des bancs-sièges en grès, quelques-uns encore autour d'Erstein et d'Obernai; on trouve aussi des bancs commémoratifs liés à des réalisations locales et des bancs supplétifs plus simples, parfois en bois. Sous l'administration allemande après l'annexion de 1870, des mesures d'entretien furent prescrites en 1906, sans suite effective, puis en 1910 un administrateur déclara que la forme de ces bancs ne répondait plus aux besoins, jugeant la dalle supérieure inutile avec l'apparition de petites carrioles et le siège en pierre trop bas et inconfortable. Il fut donc décidé de ne plus restaurer systématiquement les bancs brisés ou endommagés. Dans les années 1980, plusieurs bancs-reposoirs d'Alsace ont été inscrits à l'inventaire des monuments historiques et ont bénéficié d'une protection. Ces petits monuments, malgré les pertes et les mutilations, restent des témoins visibles des usages et des commémorations du XIXe siècle en Alsace.