Basilique et Mosaïque romaine de Grand dans les Vosges

Patrimoine classé Vestiges Gallo-romain Patrimoine religieux Basilique

Basilique et Mosaïque romaine de Grand

  • 4 Rue de la Mosaïque
  • 88350 Grand
Basilique et Mosaïque romaine de Grand
Basilique et Mosaïque romaine de Grand
Basilique et Mosaïque romaine de Grand
Basilique et Mosaïque romaine de Grand
Basilique et Mosaïque romaine de Grand
Basilique et Mosaïque romaine de Grand
Basilique et Mosaïque romaine de Grand
Basilique et Mosaïque romaine de Grand
Basilique et Mosaïque romaine de Grand
Basilique et Mosaïque romaine de Grand
Basilique et Mosaïque romaine de Grand
Basilique et Mosaïque romaine de Grand
Crédit photo : Pethrus - Sous licence Creative Commons
Propriété du département

Période

IIIe siècle

Patrimoine classé

Basilique romaine (ruines) avec sa mosaïque : classement par arrêté du 19 janvier 1884

Origine et histoire de la Basilique romaine (ruines) avec sa mosaïque

La basilique civile de Grand (Vosges) abrite une mosaïque romaine datée de la première moitié du IIIe siècle et attribuée à l'époque de l'empereur Caracalla ; l'ensemble couvre 232 m², ce qui en fait la plus grande mosaïque de l'espace lorrain antique. Découverte progressivement à partir de 1873, la dalle entière fut mise au jour en mai 1883 par Félix Voulot, conservateur au musée départemental des Vosges à Épinal, et la mosaïque ainsi que la basilique ont été classées monuments historiques par arrêté du 19 janvier 1884. La commune fit rapidement construire un bâtiment de protection en 1883–1884, respectant le tracé des substructions antiques, et la mosaïque a été déposée puis reposée sur un support moderne en 1959 après des aménagements réalisés au milieu du XXe siècle. Depuis 1956, l'œuvre appartient au Conseil général des Vosges.

La salle mise au jour, entourée de murs romains, délimitait une pièce rectangulaire de 14,12 × 13,87 m prolongée côté ouest par une abside profonde de 5,43 m. Dès le début du XXe siècle, des préoccupations de conservation furent signalées face à l'action de l'air, de l'humidité et de l'usure due au passage des visiteurs, ce qui motiva des interventions de protection et la création d'une balustrade pour préserver les tesselles. La mosaïque est une œuvre polychrome en tesselles de calcaire local, le rouge provenant des Ardennes, et utilise des tons variés — blanc, noir, crème, rouge, jaune, beige-gris, rose, bleu, gris foncé — selon des analyses récentes.

Des observations au microscope polarisant et au microscope électronique à balayage, ainsi que des analyses thermogravimétriques réalisées en 2004, ont précisé la composition du support et des mortiers. Le terrazzo repose sur une pâte à base de chaux (60 %), enrichie de tuile pilée et d'un granulat calcaire extrait du sous-sol de Grand ; le mortier de pose est une chaux pure de grande finesse, posée progressivement pour permettre des corrections de motif. L'emploi de matériaux locaux invite à penser que la mosaïque fut exécutée sur place par des équipes itinérantes plutôt que par un atelier éloigné. Le géoradar a livré des indications sur les soubassements et les prolongements de murs au droit de l'emblema et de l'abside, soulevant la question d'un arasement antérieur du mur ou d'une construction ultérieure de l'abside.

L'ornementation de la basilique associait un cordon de marbre rouge entre la mosaïque et les murs, des plaques de marbre et de porphyre formant une marqueterie murale haute de 160 cm, des stucs peints et des moulures de marbre, l'ensemble faisant intervenir plus de soixante variétés de marbre dont certaines venues de Grèce et d'Afrique du Nord. Le décor de la mosaïque présente un encadrement simple en bande blanche semée de petites croix noires, un champ quadrillé de carrés et une frise de triangles et de filets séparant le tapis de son pourtour. Le tapis central, d'environ 100 m², est bordé d'un méandre blanc sur fond noir et d'une tresse à deux brins en crème et rouge ; sa composition générale, symétrique, articule triangles et rectangles délimités par ces tresses.

Les rectangles intérieurs abritent ornements végétaux, motifs géométriques et figures animales, tandis que le petit côté tourné vers l'abside comporte sept carrés alternant fleuron et croix pattée. Aux quatre angles de l'emblema figurent quatre animaux — un tigre, une panthère, un ours et un sanglier — souvent interprétés comme évoquant des venationes propres aux spectacles d'amphithéâtre, interprétation cohérente avec d'autres mosaïques datées de la même période. L'emblema lui‑même n'est conservé qu'à hauteur d'un tiers ; il montre deux personnages exécutés en « peinture de pierre » par un artiste de qualité, qui a travaillé avec des tesselles très fines et un choix de fond noir inhabituel. Le personnage de gauche, âgé, est debout sous un auvent et porte un masque comique ainsi qu'un vêtement orné ; il s'avance tenant un bâton recourbé vers un second personnage, en partie détruit, qui tend la main sous une arcade. En rapprochant cette scène d'exemples connus, J.-P. Darmon a proposé une attribution possible au Phasme de Ménandre, sans que l'emblema ne soit conservé dans son intégralité.

Deux bandeaux parallèles marquent la séparation entre la grande salle et l'abside : le plus long, contigu à la salle rectangulaire, est organisé en panneaux géométriques autour d'un rectangle central à peltes, tandis que le second, plus élégant, présente sur fond noir des rinceaux blancs partant d'un culot d'acanthe. L'espace de l'abside contraste par ses lignes courbes et par une trame de demi-écailles en alternance noire et blanche sur quinze rangs, un motif attesté aussi dans d'autres sites antiques. La qualité d'exécution varie dans l'ensemble : l'emblema témoigne d'un travail de maître, alors que le décor de champ, répétitif, semble avoir été confié à des ouvriers moins qualifiés ; la réalisation a duré un an, la taille des tesselles occupant environ six mois.

Liens externes