Origine et histoire de la Basilique Notre-Dame-de-la-fin-des-Terres
La basilique Notre‑Dame de la Fin‑des‑Terres, basilique mineure catholique, est située à Soulac‑sur‑Mer (Gironde) dans l'archidiocèse de Bordeaux. Son nom, lié à la proximité de la pointe de Grave, renvoie selon Pierre Boule à la fragmentation ancienne du Nord‑Médoc en îlots. L'édifice est classé monument historique et inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco au titre des chemins de Saint‑Jacques‑de‑Compostelle.
Le site dépendait d'un prieuré bénédictin rattaché à l'abbaye Sainte‑Croix de Bordeaux et des traditions orales ont attribué sa fondation à Charlemagne ou à Louis le Débonnaire. Les premières mentions documentaires remontent au début du XIe siècle, lorsque le monastère apparaît dans le cartulaire de Sainte‑Croix. La communauté est alors modeste, environ onze personnes, dont quatre moines en 1166, et fait l'objet de querelles de juridiction avec l'abbaye de Saint‑Sever avant de rester sous l'autorité de Sainte‑Croix.
Le prieuré profite de l'essor du pèlerinage vers Compostelle et devient une halte pour des pèlerins débarquant par la mer, qui poursuivaient leur route le long du littoral par la voie de Soulac ou, selon d'autres récits, par une traversée de l'estuaire depuis Talmont. Des hospices, notamment celui des Hospitaliers de Saint‑Jean‑de‑Jérusalem à Grayannes, ainsi que d'autres établissements à Talais et Vensac, accueillaient les pèlerins en difficulté.
Le sanctuaire actuel est construit probablement dans la seconde moitié du XIIe siècle comme vaste église de pèlerinage, avec un plan favorisant la circulation des fidèles autour des reliques. Ces reliques, nombreuses et d'origine souvent indéterminée, suscitent une vive dévotion : on y vénère notamment la châsse de sainte Véronique et des gouttes de lait de la Vierge rapportées de Terre sainte, éléments qui contribuent à l'appellation de Soulac (Solum lac).
Dès le Moyen Âge, l'édifice subit les effets des dunes et d'une nappe phréatique haute : l'ensablement et les inondations régulières imposent des travaux d'exhaussement, le sol du chœur et de la nef étant relevé d'environ 3,60 mètres au XIVe siècle. Des transformations font que des fenêtres romanes deviennent des ouvertures au niveau du sol et qu'une abside pentagonale est élevée sur le chevet roman, précédée d'un chœur droit.
L'église est décrite dès 1532 comme fortement ruinée, des voûtes s'étant effondrées, et des mesures de fortification sont prises au tournant des XVe et XVIe siècles. Elle est attaquée en 1621 par les Huguenots ; en 1642‑1643, de la poudre est achetée et des réparations sont effectuées pour défendre l'édifice contre des incursions espagnoles.
Au XVIIIe siècle la situation se dégrade : les dunes finissent par recouvrir le village et les habitants l'évacuent, un nouveau bourg dit « Jeune‑Soulac » est construit plus à l'est et la basilique, abandonnée, est progressivement ensevelie, seul le sommet du clocher servant d'amer aux navigateurs. Au XIXe siècle, après des inventaires, l'archevêque de Bordeaux, le cardinal Donnet, décide de dégager et de restaurer l'édifice ; les travaux, conduits par l'architecte Charles Durand, commencent en 1859, une première messe est célébrée l'année suivante et l'édifice est classé monument historique le 20 juillet 1891, les chantiers se poursuivant jusqu'en 1905.
Sur le plan architectural, la basilique est un édifice roman du XIIe siècle marqué par des influences saintongeaises et poitevines ; son plan a été remanié et le transept supprimé lors des restaurations du XIXe siècle, laissant une structure basilicale à cinq travées. La nef centrale, flanquée de deux collatéraux de même hauteur, est voûtée en arcs brisés ; les doubleaux reposent sur des demi‑colonnes engagées et la quatrième travée conserve des piliers massifs et un petit escalier à vis qui signalent l'emplacement de l'ancien clocher, remplacé au XVIe siècle par la tour carrée adossée à la travée occidentale du bas‑côté nord. La façade occidentale est en grande partie romane.
Le vocabulaire sculpté associe chapiteaux végétaux et géométriques dans la nef et chapiteaux historiés dans le chœur, où sont représentés des épisodes bibliques comme le sacrifice d'Isaac ou Daniel dans la fosse aux lions. Le chœur comprend une travée droite précédant une abside voûtée en cul‑de‑fou, dont le rond‑point est percé de larges baies en plein cintre garnies de vitraux modernes signés Francis Chigot.
En élévation extérieure, l'abside conserve des parties supérieures dégagées : une arcature originale montre des pilastres à imposte remplaçant les colonnettes habituelles, et deux absidioles prolongent les collatéraux ; certaines arcades vers la travée droite restent partiellement enterrées pour préserver la structure. Le mobilier comprend une chaire monumentale en pierre, plusieurs tableaux et des statues vénérées, notamment une Vierge polychrome du XIXe siècle et une statue de saint Jacques offerte par des pèlerins. La basilique conserve enfin la châsse de sainte Véronique, qui renferme des reliques attribuées à sainte Véronique, à son époux Zachée (saint Amadour) et à saint Fort, ainsi qu'un autel et une statue de sainte Véronique autrefois utilisés lors de serments judiciaires.