Origine et histoire de la Brasserie-malterie
Reconnue pour son architecture industrielle, l'ancienne malterie et l'ancienne brasserie Motte‑Cordonnier à Armentières ont été reconstruites après la Première Guerre mondiale sur des plans de l'architecte Forest ; le corps principal a été inauguré en 1923. L'édifice, bâti en brique à décor alterné de laitier, se distingue par une tour d'escalier centrale rectangulaire, inspirée des beffrois du Nord, et s'inscrit dans un domaine industriel de huit hectares, voisin des réseaux ferroviaires et de la Lys. Fondée à l'emplacement d'une activité de foulage de drap attestée en 1583, la brasserie apparaît dès 1650 et entre dans la famille Motte‑Cordonnier en 1749 ; dix générations se sont succédé jusqu'en 1989. La malterie et la brasserie ont longtemps fonctionné de concert : les orges arrivaient par péniches et étaient entreposées dans les greniers, le maltage se faisait sur place jusqu'en 1965, puis le malt était concassé, acheminé vers la meunerie à l'étage supérieur avant d'alimenter les chaudières à moût et la salle de brassage. La salle de brassage conserve deux grandes chaudières protégées en cuivre rouge, l'une de 400 hectolitres et l'autre de 260 hectolitres, chauffées par serpentins ; l'usine disposait également d'une pompe à vide Seck, d'un compresseur d'ammoniac Phoenix (Gand) et d'une laveuse automatique Vandergeeten (Bruxelles), ainsi que d'une installation de brassage composée de trois cuves (une de 400 hl et deux de 260 hl). Les opérations comprenaient la stérilisation, le houblonnage, l'ensemencement par levure, la fermentation, la filtration et le stockage ; la production s'élevait à 122 000 hectolitres en 1927 et à 300 000 hectolitres en 1947. Après une série de restructurations, la brasserie d'Armentières a cessé de brasser en 1993 ; le site sert depuis de centre de conditionnement et de distribution pour un groupe industriel belge. Face à la concentration du marché dans les années 1970, la brasserie, jugée trop grande pour une microbrasserie mais trop petite pour atteindre une taille critique, a été rachetée par la brasserie Artois ; elle devint la S.A. Sébastien Artois et fut acquise par le groupe belge Interbrew en 1989. Bertrand Motte, dernier brasseur de la lignée, prit sa retraite en 1989 ; à sa mort en 2018, sa famille relança la marque Motte‑Cordonnier. Les façades et toitures de l'ancienne malterie et de l'ancienne brasserie, ainsi que la cage d'escalier et la salle de brassage, ont été inscrites au titre des monuments historiques en 1999 ; la protection a été étendue en 2019 aux bureaux de l'administration, à la maison du directeur, à la canetterie, à la station de pompage, à la salle de fermentation et au grenier à moût. Le projet de reconversion « Domaine Motte‑Cordonnier » prévoit la création de 134 logements collectifs répartis sur deux bâtiments protégés ; une première phase de réhabilitation a aménagé une centaine de logements livrés en 2024 et une seconde phase doit traiter le sort des magasins, des quais, du bâtiment de l'administration et du grenier à moût. En 1956, la malterie produisait 38 quintaux de malt. En 2025, la brasserie a obtenu une médaille d'or au Concours général agricole pour la bière René. La valorisation du site combine la conservation des éléments patrimoniaux remarquables — architecture en brique, tour inspirée des beffrois, salle de brassage historique — et leur adaptation à des usages contemporains.