Origine et histoire
Le bureau de poste Gambetta à Caen, œuvre de l'architecte régional Pierre Chirol, date de 1932. Construit en béton armé, il présente de vastes baies et de grands plateaux, une composition de façades d'inspiration classique et un modernisme Art déco mesuré perceptible notamment dans le toit-terrasse et le second œuvre. Inauguré le 10 juillet 1932 par le président Albert Lebrun, l'édifice voit ses façades et sa toiture inscrites aux monuments historiques en août 2010.
Jusqu'en 1826, le service des postes était installé dans l'hôtel de ville, mais au début du XXe siècle cet emplacement apparaît trop exigu, ce qui conduit à plusieurs études et projets. En 1908 une commission est nommée pour envisager l'agrandissement, et après un rapport rejeté en 1909 la décision de construire un nouvel hôtel des postes est prise. Trois emplacements sont alors proposés — à l'angle de la rue Auber et du boulevard du Théâtre, à l'angle de la rue Saint-Pierre et de la rue de la Fontaine, et sur le site du pensionnat de la rue de l'Hôtel-de-Ville (actuelle rue Jean-Eudes) — la commission privilégiant ce dernier malgré la couverture envisagée du Petit-Odon et la disparition de l'école municipale de filles de la place de la République.
En 1910 l'État propose de prendre en charge la construction, la ville devant seulement fournir le terrain ; une première proposition est toutefois rejetée en 1913. Un projet acquis en 1921 au 214 rue Saint-Jean échoue et, après de nouvelles discussions reprenant les emplacements étudiés en 1909, le terrain compris entre la rue Auber, le boulevard du Théâtre et la place Gambetta est retenu et accepté par le conseil municipal le 29 décembre 1924. Une convention est signée en 1925 et la construction approuvée en février 1926 ; le projet définitif est adopté le 31 mai 1928.
Le nouvel hôtel des postes, situé au cœur du quartier administratif entre l'hôtel de la préfecture et l'hôtel de ville, occupe tout l'îlot et se compose initialement de trois ailes en U organisées autour d'une cour ouverte sur la rue nouvellement percée (rue Lebret). Les premiers travaux commencent en décembre 1929 et l'adjudication des travaux annexes intervient en avril 1930. La construction est marquée par plusieurs incidents, dont la mort d'un peintre en mai 1932.
Lors de l'inauguration de juillet 1932, Lebrun coupe le ruban tricolore et visite la salle du public où le personnel des PTT est rassemblé ; l'inauguration avait été prévue initialement avec Paul Doumer, dont le décès en mai 1932 a changé le protocole. Pendant l'Occupation, le central téléphonique installé à l'étage est camouflé, mais au cours de la bataille de Caen deux bombes tombent dans la cour et causent d'importants dommages : l'aile droite le long du boulevard des Alliés est fortement atteinte et l'angle entre les rues Lebret et Auber est détruit. Le réseau de la résistance PTT permet de remettre en service le central téléphonique en août 1944.
Le bâtiment est ensuite restauré et agrandi par l'ajout d'une quatrième aile fermant la cour sur la rue Lebret ; ces travaux, menés sous la direction de Pierre Chirol dans le respect du décor initial, s'achèvent en 1953. À la suite de la partition des PTT en 1991, la propriété revient à France Télécom ; La Poste demeure locataire du rez-de-chaussée, où se trouvent un guichet postal et une agence de la Banque Postale, et l'édifice abrite toujours un central téléphonique. Une rénovation profonde en 1993 reconstruit totalement les espaces intérieurs, si bien que l'arrêté d'inscription de 2010 ne concerne que les façades et les toitures.
En mars 2021, environ deux tiers du bâtiment sont vendus à la société Normand’Invest pour aménager une trentaine d'appartements haut de gamme ; la commercialisation du deuxième étage est programmée en septembre pour des premières livraisons début 2022. Sur le plan architectural, l'édifice occupe un quadrilatère irrégulier de 55 mètres sur la rue Auber, 40 mètres sur le boulevard Maréchal-Leclerc et 35 mètres sur la place Gambetta. Il s'inscrit dans le modèle des grands bureaux de poste inspirés par Julien Guadet : organisation autour d'une cour centrale, séparation des fonctions par aile, techniques de construction industrielles en béton armé et façades en pierre de taille, notamment en pierre de Caen.