Origine et histoire
Camp central de Crique Anguille
Le camp central de Crique Anguille, plus connu sous le nom de bagne des Annamites en raison de la forte proportion de détenus originaires d’Indochine, est un ancien bagne situé sur la commune de Montsinéry-Tonnegrande en Guyane. L’établissement pénitentiaire spécial a été édifié sur un terrain occupé auparavant par une habitation coloniale des XVIIIe‑XIXe siècles ; les vestiges visibles datent de la première moitié du XXe siècle. Fonctionnant comme bagne entre 1930 et 1945, il a été créé en avril 1931 en même temps que les camps de La Forestière et de Saut Tigre, et il dépendait directement du gouverneur de la Guyane plutôt que de l’administration pénitentiaire. À l’origine, le camp comprenait sept bâtiments en bois, la maison du chef de camp, des cachots et un réfectoire, tous construits par les premiers bagnards. Outre la mise à l’écart d’environ 500 opposants indochinois après le soulèvement de Yên Bái, le camp visait à développer la région de l’Inini alors entièrement forestière ; des pistes furent tracées et une voie ferrée Decauville installée. À partir de 1939, les détenus furent progressivement libérés à la fin de leur peine ; au déclenchement de la guerre en 1940, les tirailleurs sénégalais alors chargés de la garde furent remplacés par des militaires guyanais. Le camp fut définitivement fermé en 1945 ; les Indochinois encore présents reçurent la grâce et s’installèrent à Cayenne, où ils contribuèrent à la formation du quartier dit « chinois ». Protégé par le Conservatoire du littoral depuis 2012, le site est accessible au public : on l’atteint après environ trente minutes de marche sur un sentier en caillebotis au cœur de la forêt, depuis la sortie de Montsinéry‑Tonnegrande sur la route de Tonnégrande, après la crique Coco. À partir de 2013 le sentier a été réhabilité et dégagé jusqu’à la rivière Tonnégrande par des travaux menés en collaboration avec l’association Chantiers histoire et architecture médiévales, le lycée professionnel de Matiti, le Conservatoire du littoral et la commune de Montsinéry‑Tonnegrande ; des bénévoles de l’association ont participé à la restauration entre 2014 et 2015. Durant ces interventions, plusieurs vestiges ont été redécouverts, notamment la colline administrative, la continuité des rails ainsi que des wagons et des moteurs d’exploitation de l’époque. Le camp central est inscrit au titre des Monuments historiques depuis le 25 mai 2023. Des documents et images historiques montrent notamment la voie ferrée vers 1936, l’entrée du camp, les vestiges des bâtiments et l’allée entre les ruines. La bibliographie et les ressources en ligne comprennent notamment l’ouvrage de Christèle Dedebant (Actes Sud, 2024) ainsi que des notices et dossiers disponibles auprès du Conservatoire du littoral, de la base Mérimée et du site de la ville de Montsinéry.
