Période
Moyen Age, XVIe siècle, XVIIe siècle, XVIIIe siècle, XIXe siècle
Patrimoine classé
Les carrières de meules de moulins dites la " Molière à Vachat ", la " Grand'Gueule " ou caverne aux fées, la " Meulière Noire " et la " Meulière Longue " et le sol des parcelles D 2026 à 2028 et D 2030 sur lesquelles elles se trouvent : classement par arrêté du 11 mars 2009
Origine et histoire des Meulières
Les carrières de meules de moulins, ou meulières, du Mont Vouan forment un ensemble remarquable d'extraction de meules situé en Haute-Savoie, en région Auvergne-Rhône-Alpes. Parmi ces sites, on distingue un groupe de sept meulières, dont l'une a été creusée dans un bloc erratique appelé Rocher de la Gouille au Mort et six autres au pied de falaise ; certains chantiers s'étendent sur plusieurs centaines de mètres en une succession de chambres profondément ménagées dans la montagne. Les carrières se concentrent principalement sur les versants du mont de Vouan (978 m), qui marque la limite sud de la vallée Verte, et des sites ont aussi été exploités sur le versant sud-est du massif des Voirons ; aujourd'hui elles sont réparties entre les communes de Fillinges, Viuz-en-Sallaz et Saint-André-de-Boëge. Géologiquement, le mont de Vouan et les Voirons appartiennent à la nappe des Voirons, une unité du massif du Chablais constituée d'un flysch d'âge éocène mêlant grès, conglomérat et marne. Les carrières ont été creusées dans le conglomérat du Vouan, où des bancs de grès grossiers riches en galets et blocs alternent avec des niveaux conglomératiques d'épaisseurs métriques formant les falaises surplombant la Ménoge. L'extraction visait les niveaux grésoseux relativement dépourvus de galets afin d'obtenir des meules homogènes, et les cellules ont été creusées en suivant des bancs inclinés vers le sud-est, ce qui confère parfois un aspect triangulaire à certaines meulières, comme la Grand'Gueule. Le site a été exploité de la période romaine et du Haut Moyen Âge jusqu'à la fin du XIXe siècle et porte de nombreuses marques d'outils témoignantes d'une activité industrielle soutenue. Entre 2010 et 2011, une équipe d'historiens et d'archéologues de l'université de Grenoble et du CNRS (Laboratoire de recherche historique Rhône-Alpes, UMR 5190) a mené une prospection aérienne et de terrain, y compris en escaladant des falaises, et a recensé 72 carrières de meules et de meules à main, faisant du Mont Vouan la plus grande concentration connue dans le sud-est de la France. Quatre carrières ont fait l'objet de fouilles : la Grand'Gueule, exploitée au cours du Moyen Âge et abandonnée aux XVe–XVIe siècles ; la meulière dite des "73 mètres", active du Moyen Âge au XVIIIe siècle ; la Molière à Vachat, abandonnée à la fin du XIXe siècle ; et la Molière de la Corbière (ou de Roche-Parée) à Saint-André-de-Boëge, dont les chantiers étaient en activité dès le XIIIe siècle. La production totale de ces sites a dépassé cent mille meules, ce qui illustre l'ampleur industrielle de l'exploitation ; naguère, une seule meule valait le prix d'une maison, et la montagne représentait pour les habitants une ressource comparable à une mine d'or. La Molière à Vachat, la Grand'Gueule, la Meulière Noire et la Meulière Longue, ainsi que le sol de leurs parcelles, sont classées au titre des monuments historiques depuis le 11 mars 2009. Les carrières ne sont plus en activité et sont ouvertes au public : la Grand'Gueule, la Molière à Vachat et la Molière de la Corbière figurent sur les cartes IGN au 1/25 000 et leur accès est signalé par un fléchage permettant de découvrir l'histoire du travail, du pain et de la vie quotidienne des ouvriers. Une légende locale, l'une des plus connues, évoque la Gouille aux Morts, un étang au pied du Mont Vouan, où l'on raconte qu'un homme travaillant sa meule le soir de Noël glissa et se noya dans la vase, son corps n'ayant jamais été retrouvé.