Origine et histoire du Castrum du Castlar
Le castrum du Castlar, ou castrum de Durfort, est un ancien village fortifié médiéval doté d’un château-fort, perché sur les hauteurs de la commune de Durfort, à mi-hauteur du puech de Berniquaut, lui‑même surmonté d’un oppidum, dans le département du Tarn en Occitanie. Le site est attesté dès le début du XIIIe siècle sous le nom de « Castlar ». Selon Jean‑Louis Biget (1992), il aurait été fondé par la famille des seigneurs de Roquefort après une donation de terres par Roger Ier Trencavel en 1141 ; un certain Isarn de Castlar est également cité comme témoin entre 1142 et 1153. Attribué aux Roquefort et théoriquement rattaché au comté de Toulouse, le castrum relève cependant, sur le plan féodal, de la maison Trencavel, puissante vicomté rivale des comtes de Toulouse. Le village dépendait du diocèse de Toulouse jusqu’à la création du diocèse de Lavaur en 1317. La fondation du Castlar fut rapidement couronnée de succès et attira de nombreux habitants, principalement venus du castrum voisin de Berniquaut alors en déclin. Au début du XIIIe siècle, pendant la croisade des Albigeois, les seigneurs de Roquefort se rallient au parti cathare sous la direction de Jourdain de Roquefort ; le castrum abrite alors plusieurs parfaits protégés par la famille, parmi lesquels Arnaud Raymond Gauti, qui combattra plus tard à Montségur et y sera brûlé après la défaite cathare en 1244. Après la soumission de Raimond II Trencavel au roi de France en 1246, le Castlar échappe à la destruction imposée à d’autres places fortes, mais ses habitants doivent prêter allégeance au roi. Le 20 juillet 1257, le comte de Toulouse Alphonse de Poitiers confisque une partie des terres des Roquefort, notamment une part de la seigneurie de Durfort, qu’il attribue à l’abbaye de Sorèze, motif avancé : affaiblir des seigneurs accusés d’hérésie. En 1274 apparaît un nouveau centre d’habitation en contrebas du castrum, plus accessible et bientôt centre économique de la seigneurie, tandis que le Castlar reste le siège du pouvoir seigneurial. Ce déplacement de population vers le bourg naissant — probablement l’emplacement du Durfort actuel — s’explique par des conditions de vie plus faciles et par des revenus liés aux moulins drapiers du Sor. Les pandémies, notamment la peste noire, puis les ravages des Grandes compagnies pendant la guerre de Cent Ans entraînent de nouveaux départs vers Revel ou le village nouveau de Durfort, et, à la fin du XIVe siècle, le castrum semble définitivement abandonné. Il ne subsiste aujourd’hui que de rares ruines dominant le village de Durfort. Une première campagne de fouilles engagée en 1976 a révélé une grande partie des fondations, puis une seconde campagne (1988–1992) a permis de mieux comprendre l’histoire du lieu ; l’étude des débris d’un grenier incendié a en outre apporté des informations sur l’alimentation médiévale. Les vestiges du Castlar ont été inscrits au titre des monuments historiques par arrêté du 24 juillet 1996. Le site, d’environ 3 400 m2 et inspiré du castrum de Roquefort, était défendu par une enceinte fortifiée percée de deux ouvertures et par plusieurs douves sèches, et se composait de trois ensembles distincts. Au point culminant se trouvaient la tour du château‑fort, le logis seigneurial, des dépendances et une basse‑cour fermée par des courtines ; en contrebas s’organisaient deux centres d’habitation, l’un plus ancien sur une première terrasse et un second plus récent sur une terrasse inférieure, tandis que quelques maisons se développaient à l’extérieur des remparts. Le castrum ne comportait pas d’église, faute d’espace libre et en raison de la présence de nombreux cathares hostiles à sa construction, mais de nombreux silos creusés dans le roc étaient utilisés pour le stockage des grains. Les maisons, généralement modestes et austères, s’adaptaient au relief des terrasses, étaient érigées en schiste et calcaire locaux, séparées en pièces de vie et, pour les plus aisées, parfois dotées d’une petite cour orientée au sud.