Origine et histoire de la Cathédrale de Bourges
La cathédrale Saint-Étienne de Bourges, siège de l'archidiocèse couvrant les départements du Cher et de l'Indre, est un édifice catholique construit entre la fin du XIIe et la fin du XIIIe siècle et dédié à saint Étienne. Elle se distingue par l'unité de sa conception, la qualité de ses tympans, sculptures et vitraux, et par la recherche d'un espace intérieur unifié ; fait exceptionnel pour une cathédrale gothique en France, elle ne possède pas de transept. Classée parmi les monuments historiques depuis la liste de 1862 et inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO en 1992, elle se situe dans le centre historique de Bourges, secteur sauvegardé depuis 1965. L'origine du site remonte à l'Antiquité chrétienne et, avant la cathédrale gothique, plusieurs églises se sont succédé, dont une cathédrale romane construite au début du XIe siècle. La construction de l'édifice actuel débute après la donation de 1195 faite par l'archevêque Henri de Sully pour remplacer la cathédrale romane trop petite. Le choeur fut établi au-delà du rempart gallo-romain, ce qui entraîna la construction d'un soubassement appelé « église basse » et relié à la crypte romane. Dès 1214, près de la moitié du bâtiment était achevée ; des campagnes successives aboutirent au gros œuvre de la nef et de la façade au début du XIIIe siècle, tandis que la façade occidentale fut poursuivie plus lentement. Pour pallier des fissures apparues dans la tour sud, un massif de butée fut implanté en 1313 — cette tour, trop fragile pour recevoir des cloches, est surnommée « tour sourde » — et la cathédrale fut consacrée le 13 mai 1324 par l'archevêque Guillaume de Brosse. Au XVe et XVIe siècles la tour nord, achevée vers 1480, s'effondra en 1506 et fut reconstruite de 1508 à 1542 en respectant l'harmonie gothique tout en intégrant des éléments décoratifs de style Renaissance ; elle porte le surnom de « tour de beurre » lié à son mode de financement. Les sculptures furent gravement endommagées lors des guerres de religion en 1562 et, pendant la Révolution, la cathédrale fut vidée de son mobilier et transformée en Temple de l'Unité le 10 décembre 1793. Au XIXe siècle, une restauration importante conduite par l'architecte Antoine-Nicolas Bailly comprit notamment des grilles de chœur réalisées par le ferronnier Pierre Boulanger. Des campagnes de restauration récentes ont porté sur les portes et la toiture entre 2008 et 2013. Sur le plan architectural, le plan reprend certains traits de Notre-Dame de Paris — double déambulatoire et voûtes sexpartites — mais sans transept ni tribunes ; l'alternance de piles fortes et faibles et l'usage d'arcs-boutants et de chaînages en fer contribuent à la légèreté et à la luminosité de l'élévation. La « coupure Branner » marque une variation constructive à l'ouest, où les appuis et contreforts sont plus massifs. Les matériaux employés reflètent la connaissance médiévale des pierres : le calcaire local de Bourges, fragile, a été réservé aux parties abritées, tandis que la majeure partie de l'ouvrage provient de calcaires bathoniens plus résistants des carrières voisines et que les gros blocs de soubassement sont en calcaire tertiaire issu des environs de Saint-Florent-sur-Cher. La façade occidentale, large de 55 mètres, s'ouvre par cinq portails correspondant aux cinq nefs ; le portail central offre un Jugement dernier particulièrement remarquable. L'absence de transept et la présence de cinq portails distinguent l'édifice dans le panorama gothique. À l'intérieur, la juxtaposition de deux bas-côtés de part et d'autre de la nef centrale permet une perspective longitudinale continue et un éclairage latéral qui participent de l'effet d'unité spatiale. La charpente conserve des pièces du XIIIe siècle malgré des démontages et remaniements aux XVIIIe et XIXe siècles et des travaux de restauration durant les années 2010 qui ont fait l'objet de critiques. La décoration associe sculptures, vitraux du XIIIe au XVIIe siècle — avec des ajouts au XVIe siècle par Jean Lecuyer — et une série de portails dédiés, de gauche à droite, à Guillaume de Bourges, à la Vierge, au Jugement dernier, au martyr Étienne et à Ursin de Bourges. Le mobilier comprend notamment les priants du duc et de la duchesse de Berry (vers 1400), une girouette en forme de pélican du XVIe siècle, une statue du Christ Sauveur de 1714 et une Vierge du XIXe siècle, plusieurs pièces étant classées objets des monuments historiques. Les orgues sont attestées dès le XVe siècle ; après diverses interventions aux XVIIe, XIXe et XXe siècles, l'instrument a été repensé à partir de 1977 puis reconstruit par Daniel Kern de 1982 à 1985 en intégrant des éléments anciens ; les titulaires récents sont Olivier Salandini (2011-2022) et Augustin Belliot (depuis 2022). Le clocher abrite sept cloches, dont une fixe. La cathédrale, longue de 125 mètres et dotée d'une hauteur sous voûte de l'ordre de la trentaine de mètres, a inspiré artistes et créateurs : elle figure dans les Très Riches Heures du duc de Berry peintes par Jean Colombe, a été représentée par des peintres contemporains et utilisée comme décor pour le film Notre-Dame brûle (2022), et elle a été reproduite sur des timbres et des monnaies.