Origine et histoire de la Cathédrale Saint-Fulcran
La cathédrale Saint-Fulcran de Lodève, située dans l'Hérault en région Occitanie, est l'ancien siège du diocèse de Lodève, supprimé à la Révolution et rattaché au diocèse de Montpellier ; l'édifice a été classé monument historique en 1840. Elle a été élevée sur l'emplacement de trois édifices antérieurs successifs, peut‑être installés sur un site gallo‑romain, et la cathédrale consacrée par l'évêque Fulcran en 975 remplaça un sanctuaire plus ancien. La crypte conserve des vestiges de ces constructions antérieures ; des chapiteaux des VIe–VIIe siècles sont conservés au musée Fleury et les murs extérieurs de la crypte semblent appartenir à cette période, tandis que certains blocs de grand appareil ont été rapprochés des remparts gallo‑romains. L'évêque Fulcran a fait rebâtir ou agrandir la cathédrale au Xe siècle et la nouvelle église de 975 comprenait, selon des témoins anciens, une « église haute » appuyée sur la crypte ; hormis cette dernière, peu de parties de cet édifice subsistent. Le clocher et une nef unique datent du XIIIe siècle, et l'édifice actuel, construit au XIVe siècle, intègre l'ancienne église paroissiale Saint‑André ; le cloître et le baptistère ont été ajoutés au XVe siècle. Une tribune sur trompes a été élevée entre 1750 et 1752 pour l'orgue de Jean François l'Épine, et des vitraux de l'abside datent du milieu du XIXe siècle, l'ancien tympan médiéval ayant été remplacé au XIXe siècle après sa disparition pendant les guerres de Religion. De plan et d'allure, la cathédrale présente les caractéristiques du gothique méridional : un chœur formé d'une nef unique très large se terminant par une abside polygonale à neuf pans éclairée par neuf grandes fenêtres gothiques de 12 m de hauteur, qui se prolonge vers l'ouest par une nef basilicale à trois vaisseaux ; la nef est entourée de chapelles latérales, la façade occidentale, sans tours, est ornée d'une rose et d'un chemin de ronde, et un clocher de plus de 57 m, élevé sur le flanc sud, domine l'ensemble. Dès le XIIe siècle les évêques de Lodève étendirent leurs prérogatives temporelles : une bulle pontificale de 1145 plaça l'église sous la protection du Saint‑Siège et énuméra ses biens, le roi reconnut en 1157 des droits de justice, et des concessions royales et papales au cours du siècle suivant affirmèrent à l'évêque des droits seigneuriaux et le monopole de la frappe monétaire. Les tensions entre l'évêque et les habitants se manifestèrent au tournant du XIIIe siècle, aboutissant à l'assassinat de l'évêque Pierre Frotter en 1207 et à la répression des coupables l'année suivante, tandis que des confirmations royales et papales consolidaient les droits épiscopaux. Le culte de saint Fulcran se développa à la fin du XIIe siècle : ses reliques furent retrouvées en 1198, une Vie fut rédigée entre 1196 et 1201, et la translation des reliques dans la cathédrale eut lieu au début du XIIIe siècle, le culte étant reconnu par le pape Nicolas IV en 1290. La construction gothique de la cathédrale s'est étalée en plusieurs phases et fait l'objet d'interprétations divergentes : des indulgences accordées en 1289 témoignent du lancement d'une campagne de financement, tandis que des mesures prises par Guillaume de Caselles au milieu du XIIIe siècle — statuts synodaux, affectation de dîmes, réglementations sur les droits seigneuriaux et quêtes itinérantes — visèrent à assurer les ressources nécessaires aux travaux. Les historiens situent la réalisation de l'abside et de quelques travées du chœur vers la fin du XIIIe siècle, la phase suivante concerne la nef à trois travées bordée de bas‑côtés avec son portail au collatéral nord et la chapelle Saint‑André, et une troisième campagne a étendu les chapelles latérales et élevé le clocher sud qui servit aussi de tour de guet. Les travaux furent ralentis au XIVe siècle pour raisons financières et reprirent par intermittence ; la peste et la guerre entraînèrent de nouvelles interruptions, puis la façade occidentale fut fortifiée et complétée entre le début du XVe siècle et le début du XVIe siècle. Pendant les guerres de Religion la cathédrale fut gravement atteinte : le 4 juillet 1573 la ville fut prise et la châsse de saint Fulcran profanée, tandis que l'explosion de quatre grands piliers fit s'écrouler les arcades, la claire‑voie et les voûtes de la nef, ne laissant intacts que le chœur, les murs extérieurs de la nef, les chapelles et la tour. Après ces destructions, l'évêque fit d'abord isoler le chœur par un mur, puis Jean de Plantavit de La Pause lança la reconstruction ; le marché fut passé en 1634 à Charles Viguier et les réparations importantes furent menées jusqu'aux environs de 1640, avec la fourniture de stalles et l'installation provisoire d'un jubé. Sous la Révolution la cathédrale fut profanée et utilisée comme entrepôt ; au XIXe siècle la chapelle des reliques fut reconstruite, la chapelle Saint‑Joseph aménagée dans la galerie nord du cloître, et des restaurations aux XIXe et XXe siècles renforcèrent les contreforts, supprimèrent des enduits anciens, rouvrirent des baies obturées et ajoutèrent une couverture de pierre au clocher. Le décor sculpté comprend, sur le clocher, quatre grandes statues en haut‑relief représentant des saints vénérés dans le diocèse — saint Michel, saint Geniez, saint Flour ou saint Amans, et saint Fulcran — ainsi que de nombreux culots, chapiteaux et gargouilles ; le tympan du portail et plusieurs autels sont l'œuvre du sculpteur Auguste Baussan, la Vierge date de 1869 et la statue de saint Fulcran de 1870. Aucun mobilier antérieur à 1573 n'a subsisté ; parmi les objets postérieurs figurent le monument funéraire de l'évêque Plantavit de la Pause (1642‑1645) dans la chapelle Saint‑Michel, le maître‑autel en marbre offert en 1757, huit toiles monumentales des XVIIe et XVIIIe siècles dont plusieurs signées Jean Coustou et Étienne Loys, les vitraux de l'abside par Mauvernay (1854), la chaire de 1867 des Ateliers Froc‑Robert et le reliquaire de saint Fulcran réalisé par Xavier‑Louis Dartis en 1808. La cathédrale possède sept cloches — six de volée et une petite cloche de tintements pour l'horloge (datée de 1676, hors service) — parmi lesquelles le bourdon « Grand Campan » fondu en 1932 par la fonderie Granier et plusieurs autres cloches datées des XIXe et XXe siècles ; une cloche de 1702, anciennement de la chapelle Notre‑Dame de Corbiac, a été classée monument historique en 1959. Enfin, la tribune construite pour l'orgue au milieu du XVIIIe siècle témoigne de l'importance musicale et liturgique de l'édifice au fil des siècles.