Origine et histoire de la Cathédrale Saint-Jean-Baptiste
La cathédrale Saint-Jean-Baptiste de Perpignan est un édifice gothique méridional édifié entre 1324 et 1509, situé dans le centre de Perpignan et implanté au nord de l'ancienne église romane Saint-Jean-le-Vieux qui subsiste sur son flanc nord. À l'origine collégiale, elle devint cathédrale en 1602 lors du transfert du siège épiscopal d'Elne vers Perpignan. L'ensemble forme un ensemble religieux urbain comprenant le cloître-cimetière dit Campo Santo, l'église Saint-Jean-le-Vieux, la chapelle de la Funéraria, la chapelle du Dévot-Christ, l'ancien palais épiscopal et le bâtiment dit du Syndicat ; l'hôpital Saint-Jean et le presbytère ont été démolis. La construction, lancée par le roi Sanche en 1324, connut d'abord une activité soutenue durant moins de vingt ans, puis un long ralentissement après la chute du petit royaume et les ravages de la peste, avant de reprendre au début du XVe siècle sous l'impulsion de Jérôme d'Ocon et de l'administrateur Galceran Albert. Le maître d'œuvre cité pour cette période est le Majorquin Guillem Sagrera ; en 1436 le plan fut modifié par Galceran Albert pour réduire l'édifice à une nef unique large de 18 m et haute de 26 m, flanquée de chapelles entre contreforts en lieu et place des bas-côtés initialement prévus. La construction progresse d'ouest en est : le sanctuaire fut voûté pendant la première occupation française du Roussillon et la première messe fut célébrée en 1504 ; l'édifice a été solennellement consacré le 16 mai 1509. En 2024, la cathédrale a célébré le sept centième anniversaire de la pose de sa première pierre lors d'une cérémonie présidée par les évêques mentionnés dans les archives.
Les matériaux reposent sur l'emploi de petites pierres : le calcaire de Baixas sert pour les points d'appui et les nervures des voûtes, les galets de la Têt sont maçonnés au mortier de chaux et, par endroit, au ciment romain, tandis que la brique est massivement utilisée pour les murs porteurs, les voûtes, les murettes de toiture et les ébrasements des baies. De petits chéneaux en poterie vernissée verte et des décors en grès rouge complètent l'architecture, le calcaire de Baixas étant peu propice à la sculpture ; les remplages en mortier de ciment moulé, établis sur une armature de fer, datent de la fin du XVe siècle.
L'édifice présente une nef unique de sept travées quadripartites, s'ouvrant sur un transept et une vaste abside rayonnante à sept pans ; la massivité se lit dans la largeur de la nef, l'épaisseur des piliers et les petites ouvertures des chapelles, tandis que les ogives reposent sur des culots, accentuant l'impression d'horizontalité. L'intérieur, souvent sombre en raison d'une faible luminosité et d'un enduit gris sur la pierre de Baixas, est atténué par un enduit beige qui couvre les quartiers des voûtes et les murs de l'abside centrale. La cathédrale compte dix-huit chapelles, dont celles des transepts, qui accueillent de nombreux retables et œuvres remarquables.
Parmi les éléments mobiliers notables figurent le retable tardo-médiéval en bois peint de Saint-Pierre, provenant de Saint-Jean-le-Vieux, un retable de la chapelle des chanoines dédié à sainte Julie et sainte Eulalie, sculpté par Jean-Jacques Melair entre 1675 et 1677, doré par Jean Scriba en 1682 et enrichi de tableaux italiens en 1680, ainsi que le retable de Notre-Dame-de-la-Mangrana, composé de panneaux peints du premier quart du XVIe siècle et représentatif de la Renaissance locale. D'autres retables et œuvres couvrent une large chronologie locale, depuis la fin du XVe siècle jusqu'au XIXe siècle.
La façade occidentale montre l'alliance caractéristique du Roussillon entre brique, galets de rivière et pierre de taille : les galets piégés dans du mortier sont rythmiques et complétés par quatre arcs de décharge en brique encadrés par deux angles en pierre de taille servant de contreforts ; l'angle droit porte une horloge et un campanile construits en 1743 et la façade est surmontée d'un petit clocheton. Un porche en marbre blanc a été élevé au XVIIe siècle et des aménagements successifs aux XIXe et XXe siècles ont modifié l'ouverture principale pour y insérer une fenêtre de style gothique.
Le Campo Santo, adossé au côté sud, est le plus ancien cloître-cimetière urbain subsistant en France ; sa construction s'étend sans doute du tout début du XIVe siècle à la première moitié de ce siècle. Après la Révolution, l'espace accueillit le Grand Séminaire en 1825 et la galerie ouest fut détruite ; une opération menée à partir de 1984 permit de dégager et restaurer le cloître, avec achèvement des travaux en 1991, laissant aujourd'hui des enfeus et des éléments funéraires intégrés aux murs.
La chapelle du Dévot-Christ, édifiée en 1534 dans l'espace libéré entre la cathédrale et le cloître, abrite un crucifix dont l'étude et la découverte de reliques cachées ont permis de le dater de 1307 et d'envisager une origine rhénane ; ce Christ gothique douloureux, arrivé à Perpignan en 1528 selon les sources, fut utilisé lors de la procession de la Sanch jusqu'en 1988, date à laquelle une copie consacrée prit le relais en raison de l'état de conservation de l'original.
La cathédrale possède deux orgues construits par Aristide Cavaillé-Coll au XIXe siècle : l'orgue de tribune est installé en nid d'hirondelle au milieu de la nef dans un buffet de style gothique flamboyant hispanique daté de la fin du XVe siècle, et des transmissions mécaniques avec deux machines Barker caractérisent l'instrument ; l'orgue de chœur, également signé Cavaillé-Coll, ne possède pas de pédalier indépendant.
Le carillon de quarante-six cloches, fondu en 1878 par la fonderie Amédée Bollée et restauré en 1996, est installé dans le clocher de l'église Saint-Jean-le-Vieux mitoyenne et constitue le deuxième ensemble campanaire régional après Carcassonne ; il couvre quatre octaves, dispose d'un clavier de type « coup de poing », est classé Monument historique et comprend un bourdon de 1,63 tonne. La cathédrale conserve en outre un petit carillon d'horloge dans un campanile en fer forgé, et le bourdon principal du beffroi, fondu en 1418 et d'un diamètre de 202 cm, figure parmi les plus anciennes et imposantes cloches de la région.
Le mobilier de la cathédrale est riche mais a subi des pertes : le retable du maître-autel, le retable de la Mangrana, l'orgue dont des panneaux remontent à 1504, les vitraux néo-gothiques et le Dévot-Christ font partie des pièces remarquables, et le vol nocturne du 12 octobre 2007 privant le trésor liturgique historique de 80 % de ses éléments reste un fait notable des dernières décennies.