Origine et histoire
La cathédrale Saint-Julien du Mans, située sur une butte du Vieux-Mans dans la Sarthe, est le siège du diocèse et l’un des grands ensembles gothico-romans de France, souvent présentée comme un témoignage du gothique angevin. Commencée sous l’épiscopat de Vulgrin vers 1060 et achevée aux alentours de 1430, elle a connu de multiples constructions, reconstructions et élévations qui lui donnent son aspect actuel. L’édifice abrite les tombes de saint Julien et de Charles d’Anjou et sa tour culminant à 64 mètres en fait le bâtiment le plus élevé de l’agglomération mancelle. Établie sur un promontoire entre le vallon d’Isaac et la Sarthe, la cathédrale conserve en son flanc occidental un menhir en grès de 4,55 mètres, déplacé place Saint-Michel en 1778 après la destruction d’un dolmen, et classé monument historique depuis 1889.
Le site primitif remonterait au IVe ou Ve siècle et la cathédrale primitive, dédiée à la Vierge et aux saints Gervais et Protais, fut remplacée au XIe siècle par la nouvelle construction voulue par Vulgrin ; cette dernière s’effondra une première fois et fut reprise par ses successeurs. Sous les évêques Arnaud et Hoël, la crypte, le chœur, le transept et les tours furent édifiés à la fin du XIe siècle, et une partie de l’édifice fut ouverte aux fidèles en 1093. Les travaux se poursuivirent au XIIe siècle : la cathédrale fut considérée comme achevée en 1120 et consacrée par Hildebert de Lavardin en présence des seigneurs de l’époque ; elle accueillit notamment le mariage de Geoffroy Plantagenêt et Mathilde et le baptême de leur fils, futur roi.
Des incendies au XIIe siècle entraînèrent des reconstructions importantes de la nef et de la tour sud, qui se traduisirent par des voûtes, piliers et baies de style roman remaniés ensuite par des techniques d’ogives. Au XIIIe siècle, un nouveau chœur à treize chapelles rayonnantes fut entrepris pour obtenir un espace plus vaste et lumineux ; ce chœur, achevé en avril 1254, dépasse de dix mètres le niveau du reste de l’édifice. À la fin du XIVe siècle, l’évêque Geoffroy de Loudon et l’architecte Jehan le Mazçon relevèrent la nef et le transept afin d’harmoniser l’ensemble avec le chœur ; le transept sud fut achevé vers 1392, alors que la guerre de Cent Ans retarda la suite des travaux. À partir de 1419, des consolidations de fondations furent nécessaires et le transept nord fut finalement achevé vers 1430, date à laquelle la cathédrale acquit l’essentiel de sa silhouette actuelle.
Des projets d’agrandissement ultérieurs n’ont pas été réalisés faute de ressources, malgré des lettres patentes royales de soutien au XVe siècle ; au fil des siècles, des éléments intérieurs comme le jubé et l’horloge astronomique furent détruits puis remplacés. L’édifice a connu plusieurs interventions modernes : un décor intérieur remanié à la fin du XVIIIe siècle, des décapages au XIXe siècle, la restauration de l’orgue et des vitraux après des sinistres et son inscription au titre des monuments historiques en 1862. Aucun bombardement n’a endommagé la cathédrale au XXe siècle ; au XXIe siècle, des fouilles en 2019 ont mis au jour un reliquaire en plomb en forme de cœur et, en 2020, un financement de 2,5 millions d’euros a été annoncé pour des travaux de rénovation.
Architecturalement, la cathédrale associe la nef romane et le chœur et transept gothiques, tandis que ses vitraux constituent l’un des éléments les plus remarquables de cette jonction de styles. La nef conserve une vingtaine de verrières romanes, parmi les plus anciennes d’Europe, dont le vitrail de l’Ascension daté vers 1120, tandis que les verrières gothiques, surtout des XIIIe et XIVe siècles, ornent principalement le chœur et la chapelle de la Vierge. Entre 1230 et 1270, plusieurs vitraux furent financés par des corporations de métiers et figurent parfois leurs activités ; la grande rose du transept nord, création du XVe siècle, illustre le Credo.
La chapelle de la Vierge a livré en 1842 des peintures murales du XIVe siècle montrant quarante-sept anges musiciens, œuvres attribuées par certains à un peintre proche des cours royales. Le mobilier sculpté et funéraire est riche : terracottes du XVIIe siècle, deux Mises au tombeau dont la Grande Mise au tombeau attribuée à Gervais Delabarre, plusieurs œuvres de Charles Hoyau, le tombeau de Charles IV d’Anjou attribué à Francesco Laurana vers 1480 et la tombe de Guillaume du Bellay datée de 1557 et attribuée à Pierre Bontemps. La cathédrale conserve également une collection rare de tapisseries, notamment le cycle de la Vie de saint Gervais et saint Protais (vers 1510) tissé à Paris par Gauthier de Campes, un cycle sur la Vie de saint Julien du début du XVIe siècle et plusieurs pièces d’Aubusson du XVIIe siècle.
La sacristie gothique, située au sud du chœur, abrite des stalles du XVIe siècle remontées le long des parois, des portraits d’évêques des XVIIe et XVIIIe siècles, un lavabo en marbre dans un retable baroque et des verrières transparentes du XVIIIe siècle. Le grand orgue, construit entre 1529 et 1535 par Pierre Bert dans un buffet de style Renaissance, a fait l’objet de multiples restaurations et enrichissements ; restauré entre 2016 et 2018, il compte aujourd’hui 63 jeux sur quatre claviers et un pédalier pour environ 4 204 tuyaux. La tour abrite sept cloches, dont un timbre du XIVe siècle et une sonnerie de six cloches fondues en 1859 par la fonderie Bollée père et fils, parmi lesquelles le bourdon Julien de 6 423 kg ; l’ensemble a été largement restauré en 2014. Une croix contemporaine de l’artiste Goudji a été élevée dans le chœur en octobre 2013.
Monument très visité, Saint-Julien a attiré 283 613 visiteurs en 2009 et a été sacré « plus belle cathédrale de France » en 2023.