Origine et histoire de la Cathédrale Saint-Mammès
La cathédrale Saint-Mammes de Langres est un édifice catholique situé à Langres, en Haute-Marne (région Champagne-Ardenne). Elle a été édifiée entre 1150 et 1196 au cœur du quartier canonial et est dédiée à saint Mammès, martyr de Cappadoce. Son architecture associe volumes romans bourguignons et éléments gothiques, avec des voûtes d'ogives et une façade occidentale reconstruite au XVIIIe siècle dans un style classique. L'édifice fait l'objet d'un classement parmi les monuments historiques depuis la liste de 1862.
Vers 1140, l'évêque Geoffroy de La Roche-Vanneau décida la reconstruction de la cathédrale; les travaux commencèrent par le chœur, dont l'élévation à trois niveaux s'inspire de Cluny III. Les arcs-boutants du chœur furent dissimulés sous les combles tandis que ceux de la nef restèrent visibles à l'extérieur; en 1170 une bulle du pape Alexandre III atteste l'avancement du chantier. Une dernière campagne d'ouvrages, engagée après l'acquisition de terrains à l'ouest, permit l'achèvement et la dédicace de la cathédrale en 1196, les voûtes de la nef semblant alors encore à bâtir. En 1209, la cathédrale reçut la relique du chef de saint Mammès. Le XIIIe siècle vit la construction du cloître, dont deux galeries subsistent, et l'édification de la chapelle de la Vierge dans l'axe de l'abside. Un incendie détruisit la toiture de la nef en 1314 ; les chapelles rayonnantes furent construites entre 1324 et 1366. Au XVIe siècle, le chanoine Jean d'Amoncourt fit édifier la chapelle de la Sainte-Croix (1547-1551) et en 1562 la cathédrale subit un nouvel incendie dû à la foudre. La façade occidentale menaçant ruine fut démolie en 1746 puis reconstruite de 1761 à 1768 d'après le projet de Claude-Louis d'Aviler et sous la direction de Jean-Antoine Caristie. Fermée en décembre 1790, la cathédrale fut rouverte en 1791 pour l'évêque constitutionnel Hubert-Antoine Wandelaincourt, qui fit détruire le jubé en 1792. Au XIXe siècle, Alphonse Durand restaura les parties hautes à partir de 1852 et construisit la sacristie de 1857 à 1862. Un chantier de restauration a été lancé en novembre 2020 pour une durée estimée à 37 mois.
L'édifice relève d'un vocabulaire clunisien adapté : plan roman plus modeste que Cluny III, chœur en plein cintre entouré d'un déambulatoire, transept saillant et nef composée d'un vaisseau central flanqué de deux collatéraux. L'élévation conserve trois niveaux inspirés de Cluny — grandes arcades brisées, arcatures sous combles et baies hautes brisées — séparés par une corniche et reposant sur des supports composés d'un pilastre flanqué de colonnettes. L'architecture de Langres simplifie et réinterprète le modèle clunisien, tout en conservant un important décor sculpté : une frise court sous la corniche du premier niveau et les chapiteaux des bas-côtés portent un programme iconographique. L'église fut voûtée au XIIIe siècle en ogives tandis que les bas-côtés sont voûtés en arêtes ; la façade médiévale a été remplacée au XVIIIe siècle par un mur d'ordre classique. L'intérieur mêle influences romanes bourguignonnes et premières pratiques gothiques ; la chapelle de la Sainte-Croix, datée de 1549, présente une voûte en berceau à caissons sculptés, un autel et un dallage en faïence polychrome de Rouen. Le cloître conserve deux galeries gothiques du XIIIe siècle et abrite aujourd'hui la bibliothèque municipale.
L'édifice mesure 94,3 mètres de longueur intérieure, la hauteur sous voûte de la nef et du chœur est de 23 mètres, la largeur du vaisseau central entre axes est de 11,36 mètres et la largeur totale de la nef, y compris les bas-côtés, est de 24,4 mètres ; les colonnes ont un diamètre de 1,25 mètre. Le transept a une largeur de 13 mètres et une longueur intérieure de 41,6 mètres ; les tours culminent à 45 mètres, la tour sud étant accessible par 227 marches.
Au XVIe siècle, Claude de Longwy de Givry offrit huit tapisseries figurant la légende de saint Mammès, attribuées à Jean Cousin l'Ancien : deux subsistent dans la cathédrale et une au musée du Louvre, les cinq autres ont disparu.
Le grand orgue, initialement construit au début du XVIIIe siècle pour l'abbaye de Morimond par le sculpteur Jean-François Béchamp (buffet, à partir de 1714) et le facteur Jean Treuillot (1714-1718), fut acquis pour la cathédrale après la Révolution et modifié en 1837, 1875 et 1931. Endommagé en 1943, l'orgue fut classé Monument historique en 1970 (le buffet l'était depuis 1949), restauré en 1972 par Haerpfer-Ermann et inauguré en 1975 ; il compte aujourd'hui 4 071 tuyaux et 53 jeux répartis sur quatre claviers et un pédalier. L'orgue accompagne la liturgie et les concerts d'été organisés par l'association des amis de l'orgue ; la cathédrale possède par ailleurs un orgue de chœur plus modeste, à un clavier, pédalier et quelques jeux (Salicional 8', Flûte 8', Prestant 4', Doublette 2', Bourdons 16' et 8', Trompettes et Clairon).
La sonnerie compte cinq cloches de volée — Jean (bourdon) Si b2, 2 830 kg, fondue en 1868 par Petitfour et Richebourg à Arbot ; une cloche sans nom Do3, 1 900 kg, 1835, Goussel et les Barret à Breuvannes ; Martin Ré3, 1 320 kg, 1810, Mutel, Varinot, Joseph et Nicolas Goussel ; Amatre Mi b3, 1 050 kg, 1808, Goussel et les Barret à Breuvannes ; Didier Fa3, 874 kg, 1868, Petitfour à Arbot — la cinquième ayant été refondue en 1868 par Petitfour après un premier tirage. La salle du trésor conserve notamment un buste-reliquaire contenant le crâne de saint Mammès, un reliquaire provenant de l'abbaye de Clairvaux contenant un fragment présumé de la Vraie Croix et une petite statue en ivoire du XVe siècle représentant saint Mammès ; la légende relate que des lions refusèrent de dévorer le jeune Mammès, qui fut finalement étripé au moyen d'un trident. Le mobilier classé comprend les tapisseries "La vie de Mammès" (en deux pièces), une sculpture de la résurrection de Lazare, la chaire à prêcher, les boiseries derrière l'orant de Mgr Guerrin et des tableaux des évangélistes.
