Origine et histoire de la Cathédrale Saint-Maurice
L’église Saint-Maurice, ancienne cathédrale de Vienne en Isère, est mentionnée dès 314 ; jusqu’à la suppression de l’archevêché en 1790 elle fut le siège de la Primatie des Sept Provinces. Elle est aujourd’hui co-cathédrale du diocèse de Grenoble-Vienne et fait l’objet d’un classement au titre des monuments historiques depuis la liste de 1840. L’édifice occupe le même site depuis le IVe siècle, mais aucune construction antérieure au Xe siècle n’en subsiste. Une reconstruction menée par l’archevêque Léger a lieu au cours du XIe siècle, et l’essentiel du bâtiment actuel est engagé entre 1120 et 1150 dans le style roman ; les parties les plus anciennes correspondent à la nef entre les cinquième et onzième travées. Au XIIIe siècle l’architecture évolue vers le gothique, comme le montre le chœur et les parties hautes de la nef ; le nom de Guillaume de l’Œuvre est avancé comme architecte. La cathédrale est consacrée par le pape Innocent IV le 20 avril 1251 et sa construction se poursuit jusqu’au XVIe siècle, la dernière pierre étant posée en 1529. L’édifice subit de lourds dommages lors des guerres de Religion : la plupart des vitraux et l’ensemble des sculptures de la façade sont détruits par les Huguenots le 20 mars 1562. Pendant la Révolution, la cathédrale est transformée en grenier et en caserne ; elle retrouve le culte en 1802, mais deux cloîtres, trois chapelles et le palais épiscopal sont supprimés en 1803–1804. La tour nord est ensuite victime d’un incendie en 1869. Depuis septembre 2006 l’église fait l’objet d’une campagne de restauration comprenant sablage, remplacement partiel du mobilier sculpté et surveillance archéologique ; la tour nord a été entièrement restaurée entre 2015 et 2017.
La façade principale, située au sommet d’un escalier sur la place Saint-Maurice, est la partie la plus récente ; elle relève d’un gothique tardif développé entre le XIVe et le XVIe siècle et présente deux tours, une grande rose accompagnée de lancettes et trois portails de style flamboyant richement décorés. Les tympans et les statues des niches ont été détruits, mais les voussures conservent de riches sculptures. Le portail sud, daté de la fin du XIVe siècle, est orné d’anges musiciens et de prophètes ; le portail nord, de la fin du XVe siècle, est dédié à la Vierge et représente des anges et des choristes célébrant son couronnement ; le portail central, également de la fin du XVe siècle, illustre des scènes de l’Ancien et du Nouveau Testament, des prophètes et des rois, et débute par des statues personifiant l’Ecclesia et la Synagoga. Au nord, un portail du XIIIe siècle conserve un linteau à griffons remployé d’un édifice antique, et le mur nord est couronné par une série d’arcatures sculptées du XIIe siècle.
À l’intérieur, l’église offre trois vaisseaux sans transept ; le vaisseau central présente trois étages — grandes arcades, triforium et fenêtres hautes — et le chœur est surélevé pour tenir compte de la déclivité du terrain. La nef mesure 90 mètres de long et 33 mètres de haut, la largeur totale de l’édifice atteignant 33 mètres, et l’intérieur garde une belle harmonie malgré quatre siècles de construction.
La cathédrale conserve de nombreuses œuvres d’art : une série de cinq tapisseries flamandes de la fin du XVIe siècle retrace la vie de saint Maurice et encadre le chœur ; un vitrail du XVIe siècle dans le chevet du collatéral droit représente en haut l’Adoration des mages et en bas saint Maurice et saint Jacques encadrant le donateur accompagné de son saint patron, saint Antoine. Le chef-reliquaire de saint Maurice renferme les ossements de saint Maurice d’Agaune, reliques reçues en 718, tandis que la majeure partie du trésor demeure à l’abbaye territoriale de Saint-Maurice d’Agaune. Un ensemble d’environ soixante chapiteaux romans de la première moitié du XIIe siècle présente des scènes historiées et des décors végétaux. Des groupes sculptés du XIIIe siècle, probablement issus de l’ancien jubé, comprennent notamment des bas-reliefs représentant les Rois mages devant Hérode et l’Adoration des mages. Dans le porche nord, trois statues monumentales d’apôtres du milieu du XIIe siècle témoignent d’échanges artistiques avec Autun. Dans le chœur à droite se trouve le mausolée des archevêques Armand de Montmorin et Henri Oswald de La Tour d’Auvergne, œuvre de Michel-Ange Slodtz, commandée en 1740, exécutée à Rome et livrée en 1747 ; le maître-autel, également de Slodtz et orné de marbres antiques, est le seul autel antérieur au XIXe siècle, et la cathèdre en pierre du XIIIe siècle subsiste dans le mur de l’abside centrale.
Cinq cloches occupent le beffroi de la tour nord ; elles ont été fondues par la fonderie Paccard d’Annecy, deux en 1870 — provenant de la chapelle Saint-Théodore voisine — et trois en 1929.