Période
XIe siècle, 3e quart XVe siècle, XVIIe siècle, XIXe siècle
Patrimoine classé
La cathédrale Saint-Pierre et ses dépendances, telles que teintées en bleu sur le plan annexé à l'arrêté et appartenant : à l’État pour les parcelles n° 2102 et n° 2103, figurant au cadastre section A et à la commune de Moûtiers, pour les parcelles n° 406, n° 409 et n° 410, figurant au cadastre section A : classement par arrêté du 25 mars 2015
Origine et histoire de la Cathédrale Saint-Pierre
La cathédrale Saint-Pierre de Moûtiers, située à Moûtiers dans la vallée de la Tarentaise (Savoie), présente un plan en croix latine de dimensions modestes : une nef divisée en trois nefs sur quatre travées voûtées d'arêtes, un transept saillant et une coupole à lanternon à la croisée. Ses nombreux remaniements témoignent de l'histoire complexe du diocèse de Tarentaise ; la partie intermédiaire conserve notamment le blason de l'archevêque Milliet de Challes et le campanile illustre le « style sarde », caractéristique de l'architecture religieuse savoyarde du XIXe siècle. L'évêché de Tarentaise a été créé au Ve siècle ; une lettre du pape saint Léon (450) rattache cet évêché à la métropole de Vienne. La première mention connue de la cathédrale figure dans l'homélie de saint Avit, prononcée lors de la dédicace de l'édifice reconstruit par l'évêque Sanctus entre 517 et 525, qui remplaçait un bâtiment devenu trop petit. Des fouilles du XIXe siècle ont mis au jour, au chevet, un bâtiment circulaire témoignant de l'existence d'un groupe épiscopal comprenant probablement église, paroisse et baptistère. Les incursions sarrasines ont atteint la région et ont probablement contribué à la destruction de la cathédrale avant les reconstructions médiévales ; au Xe siècle, les archevêques reçurent le comitatus d'une partie de la vallée, les élevant au rang de princes d'Empire et leur procurant des ressources pour rebâtir. Au XIe siècle, un archevêque (peut-être Aymon dit Amizon ou son successeur) entreprit la reconstruction de la cathédrale et des bâtiments épiscopaux ; de l'édifice roman subsistent principalement le chœur et l'abside, ainsi que deux des quatre tours originelles, la tour nord assurant la fonction de clocher. La crypte romane, servant de martyrium et provoquant une surélévation du chœur, fut supprimée pour des raisons de stabilité, et des fresques du chœur, recouvertes au XVIIe siècle par Mgr Milliet de Challes, furent partiellement dégagées en 1882 par l'architecte Borrel. Les études récentes montrent une construction en deux temps : la partie orientale vers 1020 et la nef occidentale vers 1050 ; de la nef romane subsiste notamment le mur gouttereau sud remanié. Entre 1141 et 1175 l'archevêque Pierre II fit voûter la nef en pierre, et au XVe siècle le cardinal Jean d'Arces fonda la chapelle des Innocents et fit reconstruire des éléments dans le style gothique, comme l'atteste une plaque de 1461 mentionnant le maître maçon François Cirgat. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, l'archevêque François-Amédée Milliet de Challes adapta l'édifice à la liturgie tridentine en abaissant le niveau du chœur par la destruction de la crypte, en percant des baies dans les bras du transept et en faisant édifier la coupole à lanternon par Louis Billot ; des actes datés de 1669 et 1671 concernent ces travaux, et un porche construit en 1686 fut détruit à la Révolution puis reconstruit en 1864. Pendant la Révolution, la cathédrale fut transformée en Temple de la Raison et, sur ordre du représentant Antoine Louis Albitte, les clochers furent abattus, ce qui provoqua l'affaissement de la charpente et l'effondrement des voûtes romanes et gothiques le 24 décembre 1794 ; les clercs se réfugièrent en Piémont et la réorganisation concordataire de 1801 supprima l'archidiocèse au profit de Chambéry. Au XIXe siècle, après le rétablissement du diocèse de Tarentaise en 1825, la cathédrale, fortement endommagée, fit l'objet d'une restauration : la nef fut reconstruite dans un style classique, les travaux confiés à Ernesto Melano et Sogno à partir de 1827, la décoration confiée au peintre Casimir Vicario selon un contrat du 13 février 1829, la cathédrale étant bénite le 31 octobre 1829 et consacrée le 3 juillet 1831. L'édifice a été classé monument historique le 30 octobre 1862 ; une chapelle latérale a été ajoutée en 1869 et, en 1882, l'architecte Borrel a reconstitué une crypte romane en supprimant certaines décorations du XVIIe siècle dans le chœur. Architecturalement, le chœur se compose d'une travée voûtée flanquée de deux chapelles qui occupaient la base des tours orientales détruites à la Révolution, seule la tour nord ayant été reconstituée après 1860, et se termine par une abside romane en cul-de-four. La façade, remaniée à la fin du Moyen Âge, présente un portail baroque ; la coupole peinte par Casimir Vicario date de 1829 et la nef actuelle résulte de la reconstruction entreprise vers 1827.