Origine et histoire de la Cathédrale Saint-Vincent
La cathédrale Saint-Vincent de Saint‑Malo, dédiée à saint Vincent de Saragosse, mêle les styles roman et gothique et est classée monument historique depuis 1910 ; elle fait partie des sept cathédrales étapes du Tro Breiz. Édifiée sous l'épiscopat de Jean de Châtillon (1146‑1163) sur l'emplacement d'une ancienne église fondée au VIIe siècle et relevée au IXe, elle est issue d'un monastère primitif dépendant de l'abbaye de Marmoutiers. Des éléments du XIIe siècle subsistent : une partie du cloître, la nef, la croisée du transept et une travée des bras nord et sud. Le chœur a été reconstruit au XIIIe siècle, et la tour commencée au XIIe siècle a été surélevée en 1422. Le collatéral sud et trois chapelles du chœur datent du XVe siècle. À la fin du XVIe siècle et au début du XVIIe siècle (1583‑1607), le collatéral nord fut reconstruit et le transept nord agrandi, tandis que l'aile du rosaire au sud fut commencée entre 1623 et 1631. En 1676 le sol du sanctuaire, du déambulatoire et du chœur fut élevé au même niveau que la nef, et en 1695 la rosace du chevet, détruite par la flotte anglo‑hollandaise, fut remplacée par trois baies en plein cintre. Au XVIIIe siècle la chapelle sud fut édifiée, la tour du clocher surélevée et coiffée d'un dôme en ardoise, puis la façade fut reconstruite en 1772‑1773 en style néoclassique sur les maçonneries médiévales. Des aménagements du XIXe siècle comprennent notamment une porte de style Renaissance en 1851 et l'érection d'une flèche en pierre de Caen à partir de 1858, couronnée d'une croix en 1860.
La ville devint siège épiscopal en 1145 ; le diocèse fut supprimé en 1790 et son territoire réparti entre les diocèses de Rennes, de Saint‑Brieuc et de Vannes. Gravement endommagée lors des bombardements d'août 1944, la cathédrale fut restaurée de 1944 à 1972 sous la direction de Raymond Cornon puis de Pierre Prunet. Les travaux révélèrent des destructions plus vastes que prévu : la reconstruction de la nef absorba une grande partie des crédits et la flèche ne put être rebâtie qu'après des collectes, la nouvelle flèche, de même hauteur (77 m) mais d'allure plus sobre, dessinée par Prunet, fut achevée et célébrée en 1972 ; une nouvelle croix de couronnement fut posée en 1987.
Le plan est en croix latine ; la nef comporte trois travées et le chœur quatre travées. Le vaisseau central de la nef et la croisée du transept, vestiges du XIIe siècle, présentent des voûtes fortement bombées d'influence angevine, des croisées d'ogive à rôle décoratif et des chapiteaux romans dont l'ornementation, souvent rustique, varie largement (têtes humaines, figures animales, motifs végétaux et autres sculptures). Le collatéral sud est du XVe siècle et le collatéral nord de la fin du XVIe siècle ; au sol une mosaïque commémore l'agenouillement de Jacques Cartier avant son départ pour le Canada le 16 mai 1535.
Le chœur, datant du milieu du XIIIe siècle et influencé par l'art gothique anglo‑normand, présente un chevet plat dont la grande rose, détruite au XVIIe siècle, a été restituée après 1944 ; les chapelles au nord renferment notamment les tombes de Jacques Cartier, inhumé en 1557, et de René Duguay‑Trouin, dont les restes furent ramenés de Paris en 1973. Les vitraux, refaits après 1944, illustrent l'évolution de l'art du vitrail religieux d'après‑guerre : Max Ingrand a réalisé des verrières historiées dans la nef, la chapelle du Saint‑Sacrement et la façade occidentale dans les années 1950, Michel Durand et Jean Gourmelin ont signé des baies du collatéral nord en 1971, tandis que Jean Le Moal et le maître verrier Bernard Allain ont conçu, dans un langage non figuratif, les verrières du transept et du chœur, dont le "mur de lumière" de la rosace.
Le mobilier comprend une chaire du XVIIIe siècle, la statue de la Vierge à l'Enfant dite Notre‑Dame de la Grand'Porte déposée dans le bas‑côté nord en 2005, et trois statues en marbre blanc de Francesco Maria Schiaffino dans la chapelle du Saint‑Sacrement représentant saint Benoît, saint Maur et une allégorie de la Foi. Un nouveau mobilier liturgique du chœur, commandé en 1991 à Arcabas père et fils, a notamment fourni un maître‑autel en bronze et en marbre noir d'Afrique représentant les Quatre Vivants, accompagné d'une cathèdre et de fonts baptismaux. Depuis août 2020 un tableau d'Augustin Frison‑Roche, inspiré de l'Apocalypse, a été déposé dans la chapelle du transept sud.
La cathédrale possède trois orgues construits par la Manufacture Koenig de Sarre‑Union qui ont remplacé les instruments détruits en 1944. Les Grandes‑Orgues, réalisées en 1977 et inaugurées en 1980, comportent quatre claviers, un pédalier, 35 jeux, une transmission mécanique et des claviers en fenêtre. L'orgue de chœur, construit en 2014 par Yves Koenig grâce à un legs, dispose de deux consoles — une fixe pour l'accompagnement liturgique et une mobile pour les concerts — et d'un équipement moderne incluant un combinateur électronique ; il fut béni lors de son installation. Le petit positif de la chapelle du Saint‑Sacrement, orgue‑coffre de quatre jeux acquis en 1986 et réalisé par Yves Koenig, sert au soutien des chœurs pendant la messe.
Le clocher abrite une sonnerie de cinq cloches : quatre nouvelles cloches — Malo (bourdon), Jacques Cartier, Jean de la Grille et Notre‑Dame de la Grand'Porte — ont été fondues en 2019 par Cornille‑Havard et baptisées le 28 juillet 2019, la nouvelle sonnerie complète ayant été inaugurée le 9 novembre 2019 ; la cloche Noguette, fondue en 1989 par Dominique Bollée, remplace une cloche antérieure et, selon la tradition, sonne l'ancien couvre‑feu chaque soir à 22h00 depuis le XVIe siècle ; son nom vient du latin nox quieta.