Origine et histoire de la Cathédrale Sainte-Croix
La cathédrale Sainte‑Croix d’Orléans, siège du diocèse et dédiée à la Sainte‑Croix, est un édifice gothique situé dans le Loiret, en région Centre‑Val de Loire ; elle est classée au titre des monuments historiques depuis la liste de 1862 et a été élevée au rang de basilique par le pape Pie IX le 26 janvier 1855. Deux traditions hagiographiques expliquent sa fondation : la Vie de saint Euverte (IXe siècle) fait d’Euverte un sous‑diacre romain choisi miraculeusement pour l’épiscopat à Orléans, qui aurait retrouvé un trésor, reçu des subsides et un fragment de la Vraie Croix et fait édifier une cathédrale consacrée par un prodige divin ; la Grande Passion d’Auxerre (XIe siècle) prétend, plus tardivement, une origine apostolique en attribuant à des missionnaires envoyés par saint Pierre la création de l’Église locale, récit qui relève d’une visée anachronique et de propagande pour le siège métropolitain de Sens. Jusqu’au VIIe siècle, les données sur les constructions et leur emplacement restent incertaines ; le nom du premier évêque connu, Diclopetus, témoigne toutefois de l’existence précoce d’une ecclesia à l’intérieur de l’enceinte urbaine. Des textes médiévaux attribuent à Euverte des travaux sur l’édifice primitif et Grégoire de Tours rapporte la présence du roi Gontran à la messe dans la cathédrale en 585 ; les premières mentions du vocable Sainte‑Croix figurent sur des monnaies du VIIIe siècle. La cathédrale fut le théâtre d’événements historiques : le sacre de Charles le Chauve y est relaté, la ville supporta des incursions vikings et l’édifice aurait été incendié entre 877 et 879, tandis que d’autres cérémonies royales et princières y sont également documentées. Les vestiges archéologiques les plus anciens comprennent des fragments de mosaïque parfois datés du VIIIe siècle, voire attribués au IVe siècle, dont l’inscription partielle renvoie à un texte biblique. Après un incendie signalé en 989, une cathédrale romane reconstruite par l’évêque Arnoul comportait une nef de sept travées, un transept, un chœur avec déambulatoire et chapelles rayonnantes et une croisée marquée par quatre piliers carrés supportant probablement une tour centrale ; une façade harmonique à deux tours fut ajoutée à l’ouest, connue par une abondante iconographie avant sa démolition au XVIIIe siècle. La cathédrale romane a conservé des aménagements tels que le massif du maître‑autel et des restes de mosaïque, mais sa restitution suscite encore des débats sur la configuration des bas‑côtés, du chevet et des tribunes. Au cours du bas Moyen Âge, un vaste chantier gothique débuta à la fin du XIIIe siècle — avec un plan inspiré de Notre‑Dame d’Amiens mais doté de neuf chapelles absidiales — et se poursuivit, entre interruptions et reprises, jusqu’au XVIe siècle ; les travaux furent ralentis par la guerre de Cent Ans et le siège d’Orléans en 1428–1429. Lors des guerres de Religion la cathédrale fut pillée en 1562 et fortement endommagée en mars 1568 lorsque l’explosion des piliers de la croisée entraîna l’effondrement d’une grande partie de l’édifice ; subsistèrent alors, à l’est, la couronne de chapelles rayonnantes et les murs du chœur gothique, au transept des parties muraires et des façades romanes, et à l’ouest quelques travées gothiques et les tours romanes. La reconstruction dite « cathédrale des Bourbons » s’organisa à partir du XVIIe siècle : le chœur et le transept furent relevaillés sous la direction d’architectes comme Étienne Martellange, Jacques‑V. Gabriel et Louis‑François Trouard, et la façade occidentale fut reprise aux XVIIIe–XIXe siècles ; la façade jusqu’à la base des tours fut achevée en 1773, les travaux interrompus par la Révolution, puis repris au XIXe siècle avec une inauguration en 1829 à l’occasion du quatre‑centième anniversaire de la levée du siège. Depuis son achèvement moderne, la cathédrale a subi de nouveaux aléas : le clocher détruit en 1854 fut reconstruit en 1858, les vitraux du chœur dus à Lobin furent posés en 1859, les voûtes du sanctuaire s’effondrèrent dans la nuit du 8 au 9 septembre 1904, et l’édifice subit des dégâts limités lors des bombardements de 1940 et de 1944 ; certaines réparations restent inachevées, l’accès aux tours ayant été interdit depuis 1940, et le bourdon fissuré en 1971 a été refondu et réinstallé en 2012. Les fouilles archéologiques ont confirmé et précisé plusieurs phases : des sondages de la fin du XIXe siècle et des campagnes menées entre 1937 et 1942 par Georges Chenesseau ont mis au jour le chœur roman, le déambulatoire, des tombes, des substructions carolingiennes et des vestiges gallo‑romains, tandis que des sondages de 1903 ont établi l’absence de crypte et ceux de 1940–1942 ont démontré que la nef romane n’avait qu’un seul bas‑côté et que le chevet roman comptait trois chapelles rayonnantes. Jeanne d’Arc est liée indirectement à l’édifice : elle assista à un office vespéral le 2 mai 1429 durant le siège, et la ville commémore chaque année, le 7 mai, une cérémonie johannique sur le parvis, tandis que la rue Jeanne d’Arc, percée au XIXe siècle, débouche sur la façade principale. La cathédrale présente d’importantes dimensions : 143,85 mètres de longueur hors‑œuvre, cinq nefs pour une largeur hors‑œuvre de 50,86 mètres, une hauteur du vaisseau principal de 31,75 mètres, des tours culminant aux alentours de 78 à 82 mètres selon les points mesurés et une flèche centrale qui s’élève à 114 mètres. Le grand orgue, issu d’un échange avec l’abbaye de Saint‑Benoît‑sur‑Loire en 1822, a été remodelé par Louis Callinet, transformé par Cavaillé‑Coll en 1880 puis restauré au début du XXIe siècle ; il compte quatre claviers, pédalier, 54 jeux et plus de 3 700 tuyaux, et fait l’objet d’un service musical assuré par trois titulaires. L’orgue de chœur, également signé Cavaillé‑Coll, comprend deux claviers et seize jeux et est classé au titre des monuments historiques. Les cinq cloches sont logées dans la tour nord ; la plupart datent de 1898 et proviennent de la fonderie Bollée, certaines ayant été refondues après les dégâts de la Seconde Guerre mondiale et le bourdon refondu en 2012 par la maison Paccard. La cathédrale conserve de riches ensembles de vitraux anciens et modernes, notamment des lancettes du chœur et plusieurs verrières consacrées aux épisodes johanniques, tandis que des créations contemporaines ont été installées entre 1996 et 2000. Elle a enfin accueilli une longue tradition musicale et de maîtres de musique dès le XVe siècle — parmi lesquels Johannes Tinctoris, Eloy d’Amerval, Guillaume Minoret, Pierre Tabart et François Giroust —, puis des maîtres et maîtres de chapelle des XIXe au XXIe siècles ; la maîtrise et la direction musicale contemporaines sont assurées par des personnalités qui se sont succédé jusqu’au maître de chapelle nommé en 2021. La façade et la silhouette de la cathédrale ont inspiré des artistes, comme Maurice Utrillo qui en fit une représentation vers 1913.