Origine et histoire du Palais Saint-Firmin et de sa cave
L'hôtel Saint‑Firmin de Gordes, ancien hôtel Gaudin de Lancier, regroupe depuis une trentaine d'années la majeure partie d'un îlot intra muros en grande partie ruiné, dans la haute partie du bourg à l'est de l'église. Ce complexe juxtapose et superpose de multiples éléments redécouverts, dégagés et remis en valeur. Il conserve des vestiges médiévaux dont l'implantation a conditionné la structure de la voirie et du bâti, ainsi que des traces de l'enceinte urbaine du XIVe siècle. L'ensemble illustre l'évolution d'un quartier depuis le Moyen Âge, en matière d'habitat, d'activités économiques, de réseau de rues et de parcellaire. On y trouve l'étage de soubassement d'une demeure médiévale dérasée dont les salles voûtées en berceau sont imputables aux XIIe‑XIIIe siècles. Dans la partie sud, un moulin troglodyte doté de deux pressoirs est daté du XVe siècle, et un autre grand moulin plus récent se situe au deuxième sous‑sol de l'hôtel. De nombreuses salles et équipements troglodytes remarquablement taillés — salles, caves, citernes, cuves, rigoles et passages — sont répartis sur plusieurs niveaux et dissimulés aujourd'hui sous des terrasses qui rattrapent la forte dénivellation. L'hôtel particulier occupe la partie nord‑ouest de la propriété ; il est accessible par la rue du Four et présente une petite cour, une cage d'escalier ouverte sur celle‑ci et deux ailes de taille modeste comprenant rez‑de‑chaussée et deux étages. Bâti au début du XVIIe siècle, l'immeuble a été remanié au fil des ans, notamment au XVIIIe siècle, perdant progressivement plusieurs parties, à l'ouest et au sud‑est où existait probablement une seconde cour fermée. Parmi les éléments remarquables figurent le portail Louis XIII sur la rue, les grandes croisées à bossages ou à ordres superposés du corps principal et, à un moindre degré, le salon des Quatre Saisons au rez‑de‑chaussée. L'escalier à rampe sur rampe, riche en balustres et coiffé de plafonds en stuc à pointes de diamant, est l'un des points d'intérêt majeurs ; malgré une certaine lourdeur et quelques maladresses, il peut être rapproché d'exemples urbains montpelliérains ou lyonnais. D'autres éléments, tels que des portes d'angle, ont des modèles au château de Gordes. Hétérogène et largement restauré, l'ensemble présente néanmoins un intérêt incontestable ; André Lhote écrivait en 1943 qu'il s'agissait de « la plus belle demeure de Gordes ».
Les caves du Palais Saint‑Firmin constituent un vaste réseau troglodyte situé sous le village, posé sur un piton calcaire culminant à environ 300 mètres d'altitude. Aménagées principalement sous la grande maison dite « Palais Saint‑Firmin », elles comprennent salles troglodytes, escaliers souterrains, citernes et un ancien moulin à huile seigneurial répartis sur sept niveaux et 18 mètres de dénivelé. Ces carrières ont ensuite été revoûtées et aménagées ; l'ensemble a évolué du XIIe au XVIIIe siècle, avec de nombreuses pièces redécouvertes à la fin du XXe siècle. Les caves, redécouvertes fortuitement en 1961 et ouvertes au public depuis 1999, ont fait l'objet de travaux de dégagement poursuivis par le même propriétaire. Selon lui, ce réseau constitue « un condensé de vie Gordienne », témoignage des conditions de vie difficiles et du travail exigeant, avec peu de lumière et peu d'air. Parmi les salles dégagées, une chapelle du XIIe‑XIIIe siècle, extension d'un prieuré roman de l'abbaye bénédictine de Saint‑Chaffrey, atteste que ces lieux n'étaient pas uniquement destinés au stockage. La plus vaste pièce servait au pressurage de l'huile d'olive à l'aide de scourtins ; des bacs, citernes et cuves taillés dans la pierre montrent l'importance de cette activité et constituent un système dit « pressoir à chapelle ». Cet ensemble semble remonter à la fin du XVIe siècle, date de la construction de l'Hôtel Saint‑Firmin. Environ deux cinquièmes des pièces excavées sont actuellement accessibles au public ; d'autres restent inaccessibles pour des raisons de sécurité et d'accès, parmi lesquelles figurent des salles de communication et de stockage ainsi qu'un moulin de type romain daté vers 1450. L'entrée des caves se situe entre l'église du village et le belvédère ; la ruelle descendante, exemple typique d'une calade de village perché provençal, permet d'observer le mur extérieur des jardins du palais et conduit, après quelques marches, à l'accueil. L'hôtel Saint‑Firmin et son ensemble — constructions, terrasses, niveaux souterrains, aménagements troglodytes, substructions et vestiges archéologiques — sont inscrits à l'inventaire des monuments historiques par arrêté du 4 mars 1998. Outre les caves, les jardins et terrasses, la cour à façade Renaissance et l'escalier monumental ont fortement contribué à ce classement.