Origine et histoire du Centre de l'Architecture et du Patrimoine
Le palais de l'Île est une ancienne maison forte du XIIe siècle, remaniée à plusieurs reprises, située sur un îlot formé par le Thiou au cœur de la vieille ville d'Annecy, en Haute‑Savoie. Il commandait le seul passage sur la rivière et le péage qui y était rattaché. Originellement aux mains des seigneurs de l'Île, qui le tenaient en fief des comtes de Genève aux XIIe et XIIIe siècles, le palais passa ensuite sous l'autorité des Monthouz puis fut l'objet de diverses inféodations et acquisitions familiales. Transformé en demeure princière par la famille de Luxembourg‑Martigues, il redevint ensuite propriété des ducs de Genevois‑Nemours, qui y rétablirent les prisons et installèrent le palais de justice, le Conseil présidial au premier étage et la Chambre des comptes du Genevois vers 1550. Au début du XVIIe siècle, le président Antoine Favre y rendait ses arrêts. Après la mort d'Henri II en 1659 et la suppression de l'apanage par Charles‑Emmanuel II de Savoie, le bâtiment conserva principalement ses fonctions judiciaires et carcérales jusqu'à la Révolution française. Il hébergea par la suite des bureaux du cadastre en 1729, la délégation chargée de l'affranchissement des droits féodaux en 1771, puis fut alternativement caserne, entrepôt et asile de vieillards entre 1864 et 1888, avant d'échapper à la démolition en raison du coût élevé de l'opération. Classé au titre des monuments historiques le 16 février 1900, le palais servit de prison durant la Seconde Guerre mondiale. Restauré, il accueille aujourd'hui le Centre d'interprétation de l'architecture et du patrimoine (CIAP), qui propose un parcours permanent sur l'histoire et le patrimoine de l'agglomération d'Annecy ainsi que des expositions temporaires ; les salles historiques évoquent ses anciennes fonctions. D'importants travaux de rénovation de la toiture et des façades ont été menés d'avril 2016 à 2017.
Architecturalement, le palais se présente comme une enceinte fusiforme épousant la forme de l'île. Son noyau le plus ancien est un logis‑tour de la fin du XIIe ou du début du XIIIe siècle, d'environ douze mètres de côté, construit en bel appareil régulier. On y accède aujourd'hui par deux ponts ; autrefois deux portes fermaient l'accès, dont subsistent les arrachements de la porte sud et la porte nord elle‑même. Le rez‑de‑chaussée est divisé en quatre pièces voûtées en plein cintre. Au premier étage se trouve la grande salle d'audience, dont la façade s'ouvre par une loggia ; elle est surmontée de deux autres niveaux. Un escalier à vis a été ajouté au XVe siècle et l'enceinte contemporaine du donjon ainsi que les bâtiments accolés ont été partiellement reconstruits au XIVe siècle. Entre la porte des prisons et celle du palais de justice, une arcade aujourd'hui vitrée abrite « le banc du droit » où se faisaient autrefois les proclamations officielles. À l'est, une cour sépare le donjon d'une chapelle triangulaire flanquée d'une tourelle de latrines. Les cachots s'étagent le long du petit bras du Thiou sur trois niveaux, au‑dessus du logement des geôliers et de la cuisine, tandis que les avocats occupaient des bureaux regroupés dans un bâtiment bas, dit les banches, au nord. Le palais offre des perspectives remarquables depuis l'intérieur, l'est et la rivière.